Précisons que, pour une analyse la plus complète possible, et parce que les bassins d’emploi dépassent les frontières administratives, les zones de Montpellier, Arles et Avignon ont été inclues dans l’analyse. Cependant, puisque les villes-centres ne sont pas dans le Gard, nous laisserons ces zones légèrement en retrait des trois zones entièrement gardoises.

La réponse posée à la question du titre de cet article ne se trouve pas dans la cité des Antonin ni dans les Cévennes, mais bel et bien en bord de Cèze : la zone d’emploi où l’on gagne le mieux sa vie dans le Gard est celle de Bagnols, qui concerne le territoire du Gard rhodanien. Ainsi, Bagnols se classe 37e sur 306 zones, avec un salaire horaire net moyen de 15,67 euros. C’est mieux que Nîmes (14,66 euros, 105e) et qu’Alès-Le Vigan (13,27 euros, 266e). Tout sauf anodin : sur une année complète, la différence entre le salaire moyen à Bagnols et celui à Alès-Le Vigan représente un peu moins de… 4 000 euros !

Le Gard en dessous de la moyenne nationale

Du côté des zones frontalières, Montpellier se taille la part du lion, avec 15,77 euros de salaire horaire net moyen, Avignon s’intercale entre Bagnols et Nîmes avec 14,91 euros, et Arles colle aux basques de Nîmes avec 14,61 euros. Mais quoi qu’il arrive, on reste en dessous de la moyenne nationale, qui est de 16,35 euros. À titre de comparaison, et un peu pour se faire du mal, précisons que la zone au plus fort salaire horaire net moyen est Versailles-Saint-Quentin, dans les Yvelines, avec 23,17 euros, devant Paris et ses 22,76 euros.

Si on regarde dans le détail, on relève quelques faits intéressants. Par exemple, que les écarts de salaires sont beaucoup moins importants du côté des employés (11,51 euros nets de l’heure pour Avignon pour la mieux classée contre 10,93 euros pour Alès-Le Vigan) que des cadres, professions intellectuelles supérieures et chefs d’entreprises salariés (25,13 euros nets de l’heure pour Avignon contre 22,32 euros pour Alès-Le Vigan). Autre enseignement : globalement, les ouvriers sont mieux payés que les employés. C’est flagrant à Bagnols (12,62 euros nets de l’heure pour les ouvriers contre 11,41 euros pour les employés) ou à Alès-Le Vigan (11,54 euros contre 10,93 euros).

Du côté des professions intermédiaires, Bagnols tire une nouvelle fois son épingle du jeu, avec un salaire horaire net moyen de 16,87 euros, ce qui la classe au 11e rang national. Nîmes (15,62 euros) et Alès-Le Vigan (15,06 euros) sont loin derrière.

Les femmes et les jeunes grands perdants

Comme partout en France, dans notre département on est encore loin du compte en ce qui concerne l’égalité salariale hommes/femmes. Ainsi, il est édifiant de constater que dans le Gard, la zone où les femmes gagnent le plus est Bagnols, avec 13,61 euros net de l’heure en moyenne, ce qui est moins que la zone où les hommes gagnent le moins, à savoir Alès-Le Vigan (14,02 euros). Et zone par zone, les écarts hommes/femmes sont importants : 3,29 euros de l’heure à Bagnols, 2,3 euros à Nîmes, 1,79 euros à Alès-Le Vigan. Pour Bagnols, sur une année de salaire, l’écart moyen hommes/femmes est donc de plus de 5 000 euros. Le chemin est encore long…

Enfin, l’observation du salaire moyen par classe d’âge montre des disparités minimes chez les plus jeunes (18/25 ans), de 10,78 euros net de l’heure à Bagnols à 10,19 euros à Alès-Le Vigan, et béantes chez les plus âgés (51 ans et plus), de 18,2 euros net de l’heure à Bagnols à 14,77 euros à Alès-Le Vigan. Sur une année, le quinquagénaire moyen bagnolais gagnera donc environ 5 000 euros de plus que son homologue alésien ou viganais. Et chez les 26/50 ans aussi, mieux vaut travailler à Bagnols (15,15 euros nets moyens de l’heure) qu’à Alès ou au Vigan (13,07 euros).

Bagnols, la bonne affaire

On le constate, les disparités entre les bassins d’emploi gardois sont plutôt marquées. Et il y a fort à parier que si Bagnols tire son épingle du jeu, elle le doit à son tissu industriel, notamment nucléaire avec la présence de gros donneurs d’ordre, où les salaires sont plus élevés. Le fait que les ouvriers y gagnent nettement mieux leur vie que les employés semble aller dans ce sens. Alès-Le Vigan, lui aussi bassin industriel, présente la même particularité, qu’on ne retrouve pas à Nîmes, à Avignon ou à Montpellier par exemple, des bassins à dominante tertiaire.

Les disparités se retrouvent aussi nettement au niveau des classes d’âges, et les jeunes sont les grands perdants en se retrouvant scotchés près du SMIC. Autre enseignement, un Bagnolais d’entre 26 et 50 ans touche presque autant qu’un Montpelliérain (15,56 euros nets de l’heure pour Montpellier contre 15,15 euros pour Bagnols) alors que le coût de la vie, principalement de l’immobilier, est nettement plus cher dans la préfecture de l’Hérault(*). Il en va de même pour les salariés de 51 ans et plus (18,57 euros de l’heure à Montpellier contre 18,2 euros à Bagnols).

C’est là sans doute un autre enseignement de ces chiffres : l’exemple bagnolais vient battre en brèche l’idée que les gros salaires sont l’apanage des grandes villes. De quoi devenir un contre-modèle à la métropolisation ?