FAIT DU JOUR Samuel Roux, le bucheron devenu prêtre
Le 22 septembre dernier, Samuel Roux a été ordonné prêtre dans la cathédrale Notre-Dame-et-Saint-Castor de Nîmes. Ce jeune gardois qui aime la pêche, la chasse et le rugby a été bucheron avant d’avoir une révélation. Amoureux de son territoire, le nouveau prêtre a connu un parcours atypique dans lequel la nature n’est jamais très loin.
« Au cours d’une messe dans l’église de Bagnols-sur-Cèze, J’ai reconnu Jésus présent sur l'autel et là ça a commencé à bouleverser ma vie. Un vrai moment de grâce, une vraie rencontre spirituelle. Ça a été une authentique révélation, je découvrais que le bon Dieu était là. Je me suis mis à genoux, puis me suis senti rempli d’un amour infini qui dépasse l’amour humain. Ça m’a scié, retourné. C’est comme un moment que j'attendais sans même le savoir ». Le destin d’un homme bascule parfois à un moment précis, sans qu’il ne s’y attende. Celui de Samuel Roux connaît un tournant décisif à l’âge de 21 ans. Le moment clé de sa vie le mène à être ordonné prêtre le 22 septembre par Monseigneur Nicolas Brouwet, l’évêque de Nîmes. Cela n’était plus arrivé dans la cité des Antonin depuis neuf ans.
« J’aime le Gard, c’est ma terre. J'aime ce territoire plus que tout autre lieu »
Mais au-delà du côté rare de l’évènement, c’est le parcours non linéaire de l’intéressé qui étonne. Certes, Samuel grandit avec une maman catholique, il va à la messe et devient enfant de chœur. Mais l’histoire entre le jeune gardois et la religion s’arrête, une première fois, à l’adolescence. « J’étais assez fêtard, je sortais dans les bars, j’allais dans les fêtes. Je jouais aussi aux jeux vidéo, particulièrement des RPG (Sigle issu de l'anglais role playing game, qui signifie jeux de rôles, NDLR). À cette époque, je me cherchais complètement, je vivais au jour le jour ». Samuel mène la vie d’un jeune de son âge, ni plus, ni moins. En revanche, les études, ce n’est pas son truc et ni l’école primaire à Saint-André-d'Olérargues, ni le collège Saint-Jean à Bagnols-sur-Cèze ne le captivent. Ce qu’il aime par-dessus tout, c’est la nature, mais pas n’importe où. Il est un grand amoureux de son territoire : « Je suis originaire de Saint-André-d'Olérargues, entre Bagnols-sur-Cèze et Alès. C’est un petit village de 500 habitants. Je suis né à Bagnols-sur-Cèze et la famille du côté de ma mère est de là-bas depuis au moins six générations. Quant à mon père, il est né à Bessèges. J’aime le Gard, c’est ma terre. J'aime ce territoire plus que tout autre lieu. »
La chasse, la pêche et surtout la nature
Gardois pur jus, Samuel n’est pas à l’aise derrière un bureau, il préfère les grands espaces : « Je suis plutôt forêt et garrigue où je chasse le petit gibier. J’adore aussi la pêche au poisson blanc, la carpe, le carnassier ou le silure dans la Cèze ou le Rhône. » Mais arrive le temps où Samuel doit trouver une voie professionnelle. Il pense un temps à devenir menuisier, après des heures passées dans l’atelier d’un grand-père ébéniste, avant d’y renoncer. Toutefois, cette première idée comporte un lien conducteur avec le bois. Cela mène Samuel jusqu’à la Maison familiale rurale de Javols, dans le nord de la Lozère. Il y passe un Bac pro pour être garde forestier et un BTS, « que j’ai brillamment raté. Il y avait trop de gestion et ce n’était pas mon truc. Quand ce n’est pas concret, ça m’intéresse moins ». Tout cela le pousse à s’éloigner encore de son Gard tant adoré.
Bucheron, le long des voies ferrées de la région parisienne
Samuel coupe alors le cordon avec son territoire et il atterrit en région parisienne : « Là-bas, j’ai trouvé un emploi de bucheron au bord des voies ferrées. Ça m’intéressait et je l'ai fait pendant six mois puis je suis rentré, le Gard me manquait trop. » L’attachement à son département et les bons sentiments ne suffisent pas à remplir la marmite. Alors le désormais ex-bucheron se résout à accepter un emploi alimentaire : « Je me suis inscrit dans une agence d’intérim et j’ai décroché un boulot à Laudun, dans une entreprise qui fait des futs en acier. Je chargeais des camions. Le temps de trouver mieux. » Mais où est la vocation religieuse dans tout cela ? Elle est enfouie au plus profond du jeune homme et elle ne tarde pas à refaire surface. Le point de bascule intervient quand Samuel décroche son permis de conduire. Avec la Peugeot 106 offerte par ses parents, et pour laquelle il conserve de l’affection, de nouvelles perspectives s’ouvrent à lui.
La révélation à Bagnols-sur-Cèze
La chasse, la pêche, les sorties avec les amis, mais pas seulement. « Un jour, ma grand-mère Simone m’a demandé de la conduire à la messe. Au fil des semaines je la conduisais dans les églises de Saint-André-d'Olérargues, Bagnols-sur-Cèze, Cavillargues et Saint-Marcel-de-Careiret ». Dès lors, Samuel redécouvre la messe et il y prend goût, au point d’y aller, même sans sa grand-mère. « J’éprouvais de la nostalgie avec les couleurs qui passent dans les vitraux, l’odeur de l’encens. Il y a des choses qui reviennent. C’est réconfortant de trouver un endroit paisible et familier en dehors du boulot et du monde dans lequel on vit ». Samuel passe un cap, et cela le conduit à cette révélation dans l’église de Bagnols-sur-Cèze. Lors de cet épisode très fort, les souvenirs qui se réveillent dans sa mémoire, l'accablent de leur force et de leur multitude. Ses sens se dérèglent, sa raison chavire et son cœur s’emballe.
Sept ans d’étude au séminaire et un peu de rugby
Son existence change avec cette révélation. Mais lire la Bible et prier ne suffisent pas, « Dieu me demandait de le servir ». À l’âge de 22 ans, il entre au séminaire et celui qui n’aimait pas l’école entame une formation de sept années. On lui enseigne notamment la philosophie et la théologie, à Aix-en-Provence et à Toulouse. Dans la Ville rose, il s’adonne à une autre de ses passions : « Au séminaire, je me suis blessé en jouant au rugby, j’évoluais au poste de pilier. Auparavant, j'ai joué en club à Bagnols-sur-Cèze. Alors, en arrivant à Toulouse, j’étais servi en matière de rugby. » En ce début d’automne, Samuel Roux est un tout nouveau prêtre. « Il sait se faire proche tout en restant discret. Je suis heureux qu'il soit originaire d'un milieu rural où il aura à exercer son ministère de prêtre. Heureux aussi qu'il ait appris et exercé un métier avant d'entrer au séminaire. Cela lui a donné une connaissance de la réalité, de la vie quotidienne qui lui sera précieuse. Ordonné prêtre, il doit maintenant apprendre à le devenir concrètement au contact des fidèles, dans la disponibilité à l'Esprit-Saint et en collaborant avec les prêtres du diocèse. Nous l'y aiderons de tout notre cœur », assure Monseigneur Brouwet, l’évêque de Nîmes.
C’est à Villeneuve-lez-Avignon que le père Roux entame sa nouvelle vie. Il l’aborde avec simplicité : « Je veux être à la hauteur, être juste, droit et bon. Mais aussi accompagner les gens pour les amener à Dieu. » Sur ce chemin, les fidèles gardois ont un nouveau guide avec qui ils pourront aussi parler de nature, de rugby et surtout de la beauté du Gard.