LE DOSSIER Le Gard, champion olympique des fêtes votives : « Ce sont des chiffres multipliés par quatre ou cinq »
À Aigues-Mortes, Saint-Laurent-d’Aigouze ou au Grau-du-roi, les commerçants plébiscitent la fête votive.
« Si je dis que je supprime la fête, je prends le premier train pour le bout du monde », éclate de rire Pierre Mauméjean, maire d’Aigues-Mortes. La fête votive qui s’étale sur 12 à 13 jours en octobre est une des plus longues du Gard. Sa date était traditionnellement calée à la fin des vendanges et de la récolte du sel. « C’est pour cela que l’on disait que c’était une fête riche », ajoute celui qui pilote la commune depuis 2014. Pour lui, la fête est incontournable. Des familles le sollicitent dès janvier pour connaître la date exacte de la fête. Ceux qui vivent loin en profitent pour poser des congés et se retrouver.
Retrouvailles
Aigues-Mortes, ville touristique, propose de nombreuses animations. « La fête votive est la fête la plus intéressante, affirme Jean-Pierre Manolios qui tient les commerces de vêtements Costa Kiss. On travaille beaucoup moins à la fête de la Saint-Louis où les gens viennent voir les costumes et consomment très peu ». À la fête votive, il voit beaucoup d’Aigues-Mortais et de gens des villages voisins qui fuient la foule estivale : « C’est à ce moment-là que l’on fait des braderies, que l’on va déstocker. » Par contre, il ferme ses commerces à 17-18h car « après les gens vont voir les taureaux ». En ce vendredi matin de fin mai, il partage un café avec un natif d’Aigues-Mortes, Pierre Caladou, qui tient le restaurant Le Galion, rue pasteur. Lui affirme que fête votive est intéressante « à 1 000 % ». Sur ses livres de compte, le mois d’octobre dépasse même le mois de juillet. « Grâce à la fête votive, je triple un mois ordinaire », calcule-t-il. Les familles se réunissent bien sûr. Les anciens du collège se retrouvent aussi le deuxième samedi de la fête pour « les repas de classe » au restaurant. Ils y fêtent les chiffres ronds : leurs 30 ans, 35 ans, 40 ans, les 45, les 50 ans…
Parallèle avec la feria de Nîmes
La commune voisine de Saint-Laurent-d’Aigouze applique aussi la tradition des repas de classe le samedi de sa fête votive. « Il y a le déjeuner au pré, l’apéritif à midi et le repas en commun sur la place, décrit Alain Moya dit « Momo » qui possède deux commerces dans ce village camarguais. La fête de Saint-Laurent est très réputée. Tous les jours, il y a une manifestation nouvelle qui attire des publics différents ». Le premier week-end propose par exemple un encierro. Le mardi, c’est la journée des enfants, le mercredi celle des aînés. Le jeudi, la course taurine avec sept manades différentes. « On vit une semaine un peu hors-sol », décrit Thierry Féline, maire de la commune. Pour lui, l’impact économique de la fête pour son village peut être comparé à celui de la feria pour la ville de Nîmes. « Économiquement, c’est énorme. Ce sont des chiffres multipliés par quatre ou cinq », confirme Momo. Lui possède depuis 18 ans une bodega, « la siete de la tarde ». Voisine de la mairie, elle ouvre le week-end toute l’année et tourne tous les jours pendant la fête votive. La bodega attire une clientèle amatrice d’ambiances plus intimes et feutrées, qui ne viendrait pas forcément sur la place. Depuis quatre ans, « Momo » gère aussi le Grand Café, implanté dans la « cocotte minute », sur la place, face aux arènes. Il emploie entre 5 et 8 personnes dans l’année.
Dans la station balnéaire du Grau-du-roi, les commerçants apprécient la fête votive qui arrive en septembre après la ruée touristique estivale. « Un mois de septembre sans fête votive ne sera pas le même, admet Ellio Zaouche, de l’union des commerçants du centre-ville du Grau-du-roi. Tous les commerçants peuvent être touchés : les restaurants, les bars licence IV, les marchands de glace, de vêtements… »
La bouvine en 10 définitions
On trouve des fêtes votives dans tout le département. Elles sont accompagnées de manifestations taurines dans la partie sud du Gard. Quelle est la différence entre un abrivado ou un bandido ?
• Abrivado
Auparavant, cela correspondait à l’arrivée au galop des taureaux. Destinés à la course, ils étaient encadrés par des gardians. Aujourd’hui, les taureaux de course sont emmenés dans des camions. L’abrivado a été maintenue comme un spectacle-jeu spécifique. Des taureaux réservés pour ce type de manifestation sont conduits par des gardians à cheval, au cœur du village, le long d’un itinéraire délimité. Sur le parcours, des spectateurs tentent de faire échapper les taureaux du cercle des chevaux. L’abrivado longue part à plusieurs kilomètres du village. Un concours d’abrivado est une succession d’abrivado où plusieurs manades sont mises en compétition. La meilleure est primée à la fin.
• Attrapaïres
C’est le nom donné aux jeunes gens qui tentent d’attraper les taureaux lors d’une manifestation de rue.
• Bandido
C’est l’inverse de l’abrivado. Cela correspondait au moment où on ramenait aux prés les taureaux après la course camarguaise. Aujourd’hui, comme l’abrivado, c’est un spectacle à part entière. Des taureaux réservés à ce type de manifestations sont conduits en fin d’après-midi, après une course camarguaise. Contrairement à l’abrivado où les taureaux arrivent tous en même temps, ils peuvent être conduits un par un.
• La bouvine
Ce terme désigne l’ensemble du milieu taurin autour du taureau Camargue. Cela concerne l’aire géographique où il est élevé et les jeux qui l’entourent.
• Un encierro
Il s'agit d'un lâcher de taureaux, dans un espace du village ou de la ville, clôturé par des barrières sur un parcours fermé.
• La course camarguaise
C'est l’appellation officielle de la course libre ou course à la cocarde. C’est une manifestation tauromachique qui se pratique en basse Provence et dans l’Est du Languedoc. Les raseteurs équipés d’un crochet tentent d’enlever des attributs (cocarde, glands) placés sur le frontal et les cornes d’un taureau Camargue. Il n’y a pas de mise à mort. Certains taureaux célèbres ont droit à leur statue. Goya, taureau vedette de la manade Laurent dans les années 1970-1980, a la sienne à l’entrée de Beaucaire.
• La cocarde
Il s'agit de l’un des attributs que porte le taureau dans la course camarguaise. C’est un petit morceau de ruban rouge de 5 à 6 centimètres fixé au milieu d’une ficelle et placé sur le frontal entre les cornes de l’animal.
• Le char
C'est le nom donné au camion qui sert à transporter les taureaux et chevaux.
• Gardian
C'est un gardien à cheval d’un troupeau de taureaux, de chevaux en Camargue.
• Manade
C'est un troupeau de taureaux ou de chevaux. Le propriétaire d’une manade est le manadier.
Agenda
180 fêtes votives, avec ou sans taureaux, sont programmées cet été. En voici quelques-unes. Pour avoir une liste plus exhaustive, scrutez objectifgard.com
Fêtes traditionnelles avec taureaux
• Codognan du 18 au 23 juin
• Garons du 20 au 23 juin
• Aubord du 4 au 7 juillet
• Poulx du 5 au 7 juillet
• Montcalm du 5 juillet au 7 juillet
• Aimargues du 13 au 21 juillet
• Calvisson du 16 au 21 juillet
• Sanilhac du 18 au 21 juillet
• Bourdic du 18 au 21 juillet
• Gallician du 23 au 28 juillet
• Le Cailar du 3 au 11 août
• Vauvert du 10 au 18 août
• Saint-Laurent-d’Aigouze du 17 au 25 août
• Saint-Quentin-la-Poterie du 15 au 18 août
• Beauvoisin du 17 au 25 août
• Saint-Gilles du 29 août au 1er septembre
• Le Grau-du-roi du 7 au 15 septembre
• Aigues-Mortes du 5 au 13 octobre et les 18, 19, et 20 octobre
Et aussi des fêtes locales sans manifestations taurines
• Valliguières du 4 au 8 juillet
• Blauzac du 12 au 14 juillet
• Uzès du 2 au 6 août
• Saint-Ambroix du 15 au 18 août