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Publié il y a 1 an - Mise à jour le 18.02.2024 - Abdel Samari - 5 min  - vu 563 fois

L'INTERVIEW Kamel Chibli : « Je dois jouer mon rôle aujourd’hui à 500 % »

© Fabien Ferrer

Kamel Chibli, vice-président de la région Occitanie, délégué à l’éducation, à la jeunesse et aux sports s’arrête sur ses ambitions et priorités pour cette année 2024 dans le Gard. L’occasion aussi de revenir sur les drames successifs dans les quartiers populaires nîmois qui mettent à mal l’avenir d’une partie de la jeunesse.

Objectif Gard, le magazine : S'il devait y avoir une seule priorité en cette nouvelle année 2024 ?

Kamel Chibli : Ma priorité est claire : continuer à accompagner l’ensemble des disciplines sportives de tous les territoires. Encore davantage en cette année olympique et paralympique avec les Jeux Olympiques à Paris l’été prochain. On a une situation qui n’est pas neutre. Prenons l’exemple du tir à l’arc, un tiers des sélectionnés est issu de Nîmes. Je pense aussi aux féminines de Bouillargues qui nous sollicitent pour un coup de main. Je vais tenter de remobiliser les énergies des collectivités. Comment le seul club de D2 féminine de handball dans le Gard peut-il être mis de côté ? Il doit être préservé. Le rayonnement de ces clubs est essentiel. Regardez le succès de l’Usam Nîmes-Gard ou encore le RCN qui se maintient bien…

Alors que les JO se déroulent à Paris, comment le vice-président aux Sports en Occitanie peut-il jouer sa carte ?

Dans cette année olympique, il faut faire vivre les jeux dans le Gard et dans la Région avec tous les clubs sportifs. Tout le monde doit participer à la fête. On va faire vivre les jeux, avec des évènements à Nîmes notamment. Nous avons procédé à l’achat de près de 1 000 places avec l’ambition d’offrir à la jeunesse régionale d’y assister. La grande majorité participera donc à la fête avec des déplacements à Paris que l’on va organiser. Enfin, je voudrais évoquer aussi le sujet de l’accueil des délégations étrangères. Je rappelle que nous avons participé aux travaux du centre de nautisme, base de préparation de Beaucaire, un site merveilleux. Il y a également Méjannes-le-Clap. Ou encore Uzès. Un mot aussi sur le magnifique littoral gardois. Le Grau-du-Roi a aujourd’hui un gros potentiel avec les clubs pour accueillir en préparation l’équipe d’Argentine. Un autre évènement populaire aura lieu cette année, c’est le Tour de France, avec en particulier une étape d’arrivée à Nîmes. Et celui-là il est gratuit et populaire…Le Tour de France offre en plus une très belle valorisation et une grande visibilité. Je suis heureux que les organisateurs ont choisi en 2024 de revenir sur des grosses étapes dans la région. Cette histoire, c’est notre patrimoine. Et c’est un évènement populaire, gratuit qui attire jeunes et moins jeunes.

Revenons sur une actualité plus terrible à Nîmes en 2023 avec des drames successifs dans les quartiers populaires nîmois. Comment l’expliquez-vous ?

Par d’abord l’assignation à résidence. L’ensemble de la jeunesse a un avenir dans son pays, sa région, sa ville. Mais ne le mesure peut-être pas, pour tous. Ensuite, il faut le dire, on accompagne des associations, ce n’est pas suffisant. On fait en sorte que l’on ait toutes les informations dans nos lycées, mais ce n’est pas suffisant non plus. Et il y a enfin une question d’incarnation. Nos jeunes ont besoin de se référer à d’autres personnes qui sont passées par ces quartiers. Comment faire ? En étant plus présent sur le terrain ! J’essaie de le faire, j’ai de très bons contacts avec des associations, parfois je fais des interventions dans des lycées. Il n’y a pas de fatalité, il y a la possibilité d’émerger, chacun a sa place dans la société. Mais c’est un travail titanesque. Cela nécessiterait des moyens colossaux et une énergie importante…

« L’ensemble de la jeunesse a un avenir dans son pays, sa région, sa ville »

Est-ce qu’aujourd’hui, on est tout simplement dans l’échec ?

Oui. Il faut dire les choses comme elles sont : quand il y a un drame, c’est toujours un sentiment d’échec. On ne peut pas toujours dire que c’est la faute des autres. Moi, je me mets dans le global même si je n’ai rien à me reprocher. Je pratique la main tendue. Je le fais très souvent quand je peux. Je le fais dans la discrimination positive. J’essaie de favoriser ceux qui en ont le plus besoin. Je considère qu’un jeune qui s’en sort, c’est un bel exemple pour d’autres. La fatalité gangrène nos quartiers. On a le sentiment du repli sur soi. Et in fine, cela provoque du communautarisme. On peut le comprendre. Il y a donc une nouvelle façon de travailler dans les quartiers. La répression, il en faut, je n’ai pas d’état âme. L’image donnée de Nîmes et de ses quartiers depuis ces longs mois, des drames, des blessés : c’est une problématique majeure. Mais ce n’est pas suffisant. La prévention, c’est très utile aussi. Moi je pense que les élus du territoire devraient davantage s’en préoccuper. J’entends des phrases, des mots. Mais où sont les actes concrets ? On parle du service public mais cela ne suffira pas. Il faut encourager les jeunes à s’intéresser à la vie locale. À des évènements sportifs. Il faut remettre les jeunes au cœur de la société. Il ne faut pas attendre qu’ils le fassent seul.

La politique de la Ville engagée à Nîmes est pourtant déjà importante non ?

C’est essentiellement de l’aménagement urbain et paysager. Le problème, c’est que l’on a oublié d’imaginer que les familles, ces hommes et ces femmes pouvaient aussi participer à la vie de leur quartier, au-delà de l’associatif, de la MJC locale ou du club de foot. Ces derniers sont importants sinon ce serait encore plus la catastrophe. Mais je dis que sur les aménagements, à Pissevin ou ailleurs, on pourrait imaginer une consultation massive, sous forme de réunion, en faisant voter chacun d’entre eux. On n’a jamais fait cela dans nos quartiers en France, cela pourrait être une première. En faisant cela, vous rassemblez, et donnez la place à tous.

© Boutonnet L / Darnaud A

« J’essaie de favoriser ceux qui en ont le plus besoin »

Vous, personnellement, comment pouvez-vous engager le mouvement ?

Moi je dois jouer mon rôle aujourd’hui à 500 %. J’ai 46 ans aujourd’hui, j’ai commencé très jeune. Y compris à militer associativement, je n’étais dans aucun parti politique. Mon histoire, c’est la leur. Aujourd’hui, c’est vrai qu’il y a besoin d’accompagner ces jeunes et moins jeunes. La majorité. Le reste, ce n’est qu’une minorité qui fait mal aux quartiers. Moi, je le dis, ma mère elle m’aime. La grande majorité des parents dans les quartiers y compris ceux issus de l’immigration aiment aussi leurs enfants. Ils veulent de la sécurité pour leurs enfants, ils veulent de la répression. Il ne faut pas croire le contraire. Mais on a besoin aussi de se dire quel est le problème. Traitons les causes plutôt que les conséquences. Aujourd’hui, tout est inversé.

Un mot enfin sur les investissements dans les lycées du Gard. Quels sont les axes en 2024 ?

Il y a de gros projets sur le lycée de Bagnols, c’est l’un des plus gros investissements. Un engagement que l’on a pris et que l’on tiendra. À Uzès, on a aussi fait de gros travaux. On va continuer notamment avec la réhabilitation du lycée professionnel de cette commune. On a la plupart des lycées de Nîmes que l’on a bien emménagés. On va terminer la sécurisation des entrées d’établissements. On a aussi un futur lycée, sur la partie limitrophe du Gard, avec le pays de l’Or du côté de Vendargues. Enfin, je voudrais vous dire que l’on est très content du nouveau lycée de Sommières…

Que peut-on vous souhaiter ?

Que la France aille mieux. Que l’on sorte de la sinistrose et de l’ambiance terrible de notre pays. Si l’on veut donner un avenir serein et certain à la jeunesse. Je nous souhaite collectivement de retrouver un peu d’espérance.

Abdel Samari

Gard

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