Publié il y a 1 an - Mise à jour le 31.10.2023 - Propos recueillis par Stéphanie Marin - 3 min  - vu 589 fois

L'INTERVIEW Sarah McCoy : "Mon seul espoir, ma seule façon de pouvoir m'exprimer : crier en chanson"

La chanteuse et pianiste américaine, Sarah McCoy sera en concert au Cargo de Nuit à Arles, le vendredi 3 novembre.

- Photo : Anoush Abrar

La chanteuse et pianiste américaine Sarah McCoy est de retour avec un nouvel album "High Priestess" sorti en janvier 2023. Enregistré avec le chevronné producteur Renaud Letang (Keren Ann, Charlotte Gainsbourg...) et sous l’aile bienveillante de Chilly Gonzales (Jarvis Cocker, Feist, Drake ou Daft Punk), ces nouvelles œuvres marquent un tournant pour l’autrice-compositrice-interprète accomplie, dont la voix puissante laisse percer de douloureuses fêlures. Interview.

ObjectifGard : "High Priestess" est sorti en début d'année. Qu'est-ce qui se cache derrière ce titre que l'on traduit en français par "grande prêtesse". Est-ce une affaire de croyance ? D'affirmation de soi ? 

Sarah McCoy : Les expériences humaines, les traumatismes, les douleurs du coeur m'ont permis de me reconnecter à la spiritualité, de retrouver mon âme. Alors je me suis interrogée sur le sens de tout ça, de mes blessures. Mon coeur est-il brisé ? Ou est-ce que je peux prendre un nouveau départ ? Vous savez, je tire les cartes du Tarot, juste pour moi, et un jour lors d'un tirage, la carte de high priestess est venue vers moi pour la première fois de ma vie. C'était au moment où j'en avais le plus besoin, il fallait que je retrouve confiance en moi pour continuer à vivre. Tout le chemin de l'album mène à ce point-là. 

À 38 ans, vous semblez avoir déjà vécu plusieurs vies. Un parcours marqué de moments parfois sombres, plus jeune, vous avez notamment dû faire la manche dans la rue. Qu'en retenez-vous ? Qu’en reste-t-il aujourd’hui dans votre personnalité, votre vie d’artiste confirmée ?

Ça a été un moment très dur. Mais aujourd'hui, je me contente de pas grand-chose, je suis heureuse avec rien. À ce moment-là, j'avais besoin de fuir beaucoup de choses, la musique m'a sauvée. C'était mon seul espoir, ma seule façon de pouvoir m'exprimer : crier en chanson. Être heureuse avec rien est devenu une philosophie et ça m'a accompagné tout au long de ma vie, de mes voyages jusqu'à La Nouvelle Orléans, Paris. La célébrité et ce qui l'entoure, les strass, les paillettes, n'est pas un but, ce n'est qu'une affaire de narcissisme. Faire de la musique, c'est exprimer des émotions. Aujourd'hui, je ne fuis plus, mais je cours vers des choses avec ma musique et ça me rend très heureuse. 

Au-delà de courir vers, vous prenez les armes. On a l'impression que vous avez des combats à mener, ça se ressent en tout cas dans l'ambiance musicale de cet album, très électrique. 

J'en avais besoin, Renaud Letang et Chilly Gonzales m'ont permis de le faire. Je voulais explorer d'autres univers. Cet album a été écrit pendant les confinements, dans une ambiance, elle-même électrique, très étrange, d'autant plus pour moi qui me suis retrouvée enfermée dans un petit appartement, loin de ma famille, de mes amis. Grâce aux éléments électroniques, j'ai pu exprimer d'autres couleurs émotionnelles, différentes du piano-voix. 

La Fenêtre est la seule chanson écrite en français dans cet album. Pourquoi ce choix ?

J'ai commencé à écrire cette chanson il y a quelques années. Mais je n'ai pas réussi à exprimer ce que je voulais. J'ai insisté pour cet album parce que j'avais une colère en moi, je voulais absolument la partager. J'ai été aidée, ce sont des paroles simples, pas extraordinaires...

Il y a pourtant une phrase percutante : je ne suis pas un péché, je suis une femme.

Cette phrase m'a été adressée par un homme. Moi, un péché ? Absolument pas, c******, je suis une femme. Je refuse de devoir porter la honte des actions faites par qui que ce soit. J'étais fâchée. Je pense que c'est un problème pour beaucoup de femmes, qui doivent se sentir honteuses pour quelque raison que ce soit. Il faut porter la honte de notre sexualité, de notre corps etc. Juste parce que des hommes se sentent mal avec eux-mêmes. F***, je suis encore fâchée du fait que quelqu'un a pu avoir l'orgueil de me dire ça.   

L'image de la femme, ce que l'on attend d'elle revient régulièrement...

Parce qu'aujourd'hui encore on nous impose, et notamment à travers les réseaux sociaux et les sites de rencontres, d'être vues, mais surtout d'être validées et de ne pas regarder les autres comme des êtres humains. Et ça vaut aussi dans mon métier, on veut du contenu, les artistes sont parfois vus comme des objets. Ce miroir est devenu une obsession, tout est devenu abusif. On ne se contente plus de quelque chose qui nous plaît, il faut que ce soit validé par des millions de personnes.  

Sarah McCoy sera en concert au Cargo de Nuit à Arles ce vendredi 3 novembre à 21h30. Tarifs : 12 €/15 €/18 €.

Propos recueillis par Stéphanie Marin

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