Publié il y a 3 mois - Mise à jour le 05.08.2024 - Lïana Delgado - 5 min  - vu 547 fois

FAIT DU JOUR Le directeur et le président de la Ligue contre le cancer : “Avec plus de dépistages, on guérira plus du cancer”

Directeur et président du Comité du Gard de la Ligue contre le cancer :  Docteur André Mathieu, Ricardo Domingues

Docteur André Mathieu (à gauche), Ricardo Domingues (à droite).

- Photo Lïana Delgado

Ricardo Domingues, directeur du Comité du Gard de la Ligue contre le cancer et le docteur André Mathieu, le président, font un bilan sur le début d’année 2024.

Pouvez-vous faire un bilan de ces six premiers mois de l’année ?

Ricardo Domingues : 2024, c’est l’année où on a voulu développer, sécuriser et accompagner encore plus les patients. Nous avons commencé l’année avec un gros temps fort en avril avec les 25 ans des états généraux des malades de cancer. Nous avons consacré le début de l’année à la préparation de cet événement qui s’est déroulé au musée de la Romanité. Nous avons accueilli 150 personnes, beaucoup de patients ont témoigné autour de tables rondes.

Docteur André Mathieu : Le président national de la Ligue contre le cancer de l’époque, Henri Pujol, a organisé les états généraux en 1998 à Paris. L’impact a été très important sur le plan personnel des malades. Pour la première fois, ils ont pu faire part de leurs difficultés et de leurs ressentis. Une deuxième édition a eu lieu puis cet événement a disparu. Daniel Nizri, ex-président national de la Ligue, a décidé de renouveler cette opération sur le plan national et régional. Pour les 25 ans, l’édition nationale est prévue le 28 novembre 2024 à Paris.

R.D : Puis, avec notre conseil d’administration, nous avons revu les aides qu’on propose et nous avons fait quelques changements. Depuis quelques mois, nous travaillons encore plus sur la partie prévention : alcool, cancer du côlon, tabac, soleil, papillomavirus. Notre équipe de prévention est mobilisée dans les établissements scolaires, dans les entreprises et dans l'espace public.

Concrètement, quel est le rôle de la Ligue au sein du Gard ?

Dr A.M : Le rôle de la Ligue contre le cancer n’est pas connu dans son intégralité. On parle toujours de la recherche. C’est évident, nous y participons mais nous aidons surtout les personnes malades et leurs proches. Puis, nous avons un grand rôle dans la prévention. C’est la seule association indépendante nationale structurée qui a un rôle préventif.

R.D : Depuis 2019, avec l’Assurance Maladie du Gard et le centre de dépistage du Gard, nous organisons des journées dédiées aux femmes. Une fois par mois, nous recevons entre 60 à 70 femmes dans une maison de santé. On leur propose un frottis, de prendre rendez-vous pour une mammographie et un médecin remet le test du dépistage du cancer du côlon. Cette action est très efficace. Nous existons pour aider au mieux les Gardois. Nous sommes présents dans 12 communes. Nous sommes à moins d’une demi-heure de chaque patient, si la Ligue existe dans le Gard, elle doit être accessible.

Avez-vous pensé à développer de nouveaux projets en ce début d’année ?

R.D : Oui, en ce moment nous développons “Ma ville se ligue”. L’idée c’est d’aller encore plus loin sur les approches de prévention. Nous souhaitons engager les collectivités et les élus sur la santé et la cancérologie. Aujourd’hui, 50 communes sur 300 sont nos partenaires dans le Gard. Nîmes est l’une des villes les plus engagées en France sur les questions du cancer. Entre 2017 et 2019, elle a mis en place les espaces sans tabac, notamment les aires de jeux. Nous souhaitons généraliser ces démarches en ajoutant le volet environnement et solaire car ils augmentent le risque de cancérologie.

Avez-vous noté une évolution des cancers en ce début d’année ?

Dr A.M : C’est toujours difficile parce qu'on mélange souvent les différentes pathologies. Il existe diverses formes de cancer. Nous ne pouvons pas comparer un cancer des poumons, du sein ou du côlon. Mais globalement, nous analysons qu’il existe une très légère augmentation du nombre de cancers. En réalité, ce chiffre est faussé car il y a une augmentation de diagnostic en stade précoce. Certes, on en découvre plus, mais on en guérit beaucoup plus. Le chiffre de guérison s'est particulièrement amélioré. Aujourd’hui, les cancers précoces sont guéris dans 99% des cas. C’est très important, avec plus de dépistages, on guérira plus du cancer.

R.D : Dans le Gard, notre population est vieillissante et le cancer arrive avec l’âge. Alors entre la population qui vieillit, un dépistage précoce et une augmentation de la population, le nombre de cancers va augmenter.

Est-ce qu’il y a eu des découvertes de traitement en 2024 ?

Dr A.M : Il est difficile de donner une date précise sur une découverte. L’évolution de traitement se fait sur une dizaine d’années de travaux en laboratoire et dans l'industrie pharmaceutique. Par contre, sur les quatre dernières années, nous avons noté une explosion sur le développement de l’immunothérapie. C’est une technique innovante, car on touche directement l'intérieur de la cellule cancéreuse, ce qui permet d’avoir un traitement ciblé. On va adapter le traitement à l’individu. C’est un traitement personnalisé en fonction des découvertes qui sont faites au niveau génétique de la personne porteuse d’un cancer.

R.D : Entre 2023 et 2024, la reconnaissance des soins de supports a beaucoup évolué. Il s’agit de soutien psychologique, d’activité physique adaptée, d’accompagnement diététique, d’aide au retour à l’emploi. Jusqu’à présent, les associations le faisaient mais il manquait une reconnaissance. Depuis peu, des institutions nationales voire internationales travaillent sur les interventions non médicamenteuses. Enfin, les soins de support sont reconnus et les médecins peuvent les prescrire. Dans le Gard, la Ligue est la seule structure reconnue par Santé publique France qui peut faire profiter aux patients de ses soins de supports gratuitement sur prescription.

En ce début d’année, avez-vous constaté une augmentation ou une baisse de dons ?

R.D : Pour le moment, les dons restent stables grâce à notre engagement. Si nous n’avions pas tous ses bénévoles qui mettent en place des événementiels, rencontrent les associations locales et font du porte-à-porte, ce serait très difficile aujourd’hui. L’enjeu de la Ligue contre le cancer est de rester sur le terrain et auprès de ces partenaires. Si on ne veut pas que nos dons diminuent, nous devons continuer à développer nos activités. On souhaite diversifier nos dons, en faisant aussi appel aux entreprises. Ces dons ne nous servent pas seulement à financer la recherche, ils nous aident surtout à aider les malades. Sur 700 000€ de budget, 100 000€ partent à la recherche et plus de 400 000€ vont à l’aide aux malades. Aujourd'hui, quand un Gardois donne à la Ligue contre le cancer du Gard, c’est aussi pour l’humain qui est à côté de chez lui.

Dr A.M : Nous arrivons à maintenir le niveau équivalent de la générosité publique dans les dons grâce à beaucoup plus d’énergie, d’effort et de travail. Et au-delà de la recherche, l’argent récolté est utilisé localement. Les gens s’imaginent que leur argent part partout en France, c’est faux. Les dons sont utilisés pour les Gardois, c'est une redistribution locale.

Comment envisagez-vous la fin de l’année ?

R.D : Très active ! On pensait que juin et juillet seraient calmes mais pas du tout (rire). Mais c’est bon signe. Nous sommes déjà sollicités pour la campagne “Septembre en or” qui nous aide à récolter des fonds pour la recherche sur les cancers de l’enfant et du jeune adulte. On a aussi reçu beaucoup de sollicitations pour "Octobre Rose". En novembre, nous serons sur deux opérations en même temps : le mois sans tabac et la prévention sur le dépistage du cancer masculin. Puis en décembre on sera sur le bilan de fin d’année. Nous avons aussi le projet de réaménager nos locaux. Nous souhaitons repenser l'espace pour encore mieux accueillir les patients et redonner un peu de chaleur.

Dr A.M : Ça fait plaisir d’être autant sollicité, car ça donne de la reconnaissance à notre existence. En même temps, c’est un peu triste car ça montre un manque que la Ligue arrive à combler plus ou moins difficilement. Il y a une réalité de terrain, une fois le traitement fini, les patients sont isolés alors qu’ils ont besoin de soutien. C’est malheureux parce que ça devrait être l’apanage d’un service public, mais ça n’existe pas. Il faut le concevoir, nous comblons un vide.

Lïana Delgado

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