SAUMANE Fonctionnement de l'Esat critiqué par des parents : la sous-préfète joue la carte de l'apaisement
Sous fond de tension entre un collectif de parents et la direction, Anne Levasseur, sous-préfète de l'arrondissement du Vigan, s'est rendue à l'Esat La Pradelle (Saumane) ce vendredi 1er septembre. En présence de la maire Laurette Angeli et du directeur général de Sésame autisme Occitanie Est, entre autres, la représentante de l'État a joué la carte de l'apaisement en invitant les différents protagonistes à renouer un dialogue serein.
Les remous causés par les changements profonds et le vote d'un nouveau plan stratégique pour Sésame autisme l'an dernier (relire ici) ont tôt fait d'alerter la sous-préfète du Vigan, en poste depuis le printemps dernier. Comme le directeur départemental de l'Agence régionale de santé (ARS) Claude Rols avant elle (relire ici), Anne Levasseur a rencontré un collectif de parents inquiets quant au devenir de l'association, en particulier de celui de l'unité saumanoise.
"J’ai reçu ce collectif de parents qui avaient un certain nombre de griefs à l’égard de la gestion de l’Esat", a enclenché la sous-préfète lors de sa visite de l'Esat La Pradelle ce vendredi 1er septembre. Face à elle, Cédric Vareilhes, directeur général de Sésame autisme Occitanie Est depuis un an, Laurette Angeli, maire de Saumane, et Ampari Monginoux, présidente de Sésame Autisme, entre autres.
"Je vous le dis honnêtement, je n’ai pas à m’immiscer dans une gestion privée, qui plus est dans un dossier suivi par mes collègues de l’ARS. Mais j’ai pour habitude de travail de faire en sorte que les gens se parlent", a enchaîné Anne Levasseur. Dans cette optique, la sous-préfète avait "une idée" toute simple : réunir tous les protagonistes du "conflit" autour d'une table. "Mais apparemment ce n'est pas possible", constate-t-elle après avoir essuyé plusieurs refus, dont celui de l'ARS qui dit avoir déjà donné.
Après quoi Anne Levasseur a eu un petit aperçu de l'ambiance qui règne entre la direction de l'établissement et la maire d'un côté, et le collectif de parents de l'autre qui, d'après Laurette Angeli, ne représenteraient "que 7%" de l'effectif total. Notamment depuis que certains d'entre eux ont quitté le collectif auquel ils s'étaient rattachés car "ils avaient un défaut d'informations qui est aujourd'hui comblé" d'après Cédric Vareilhes.
Alors, au cours d'un échange qui aura duré plus d'une heure, la représentante de l'État a fait en sorte de ménager la chèvre et le chou en faisant preuve d'une écoute attentive et en prenant soin de ne jamais prendre parti. L'ancienne directrice départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations dans le Tarn-et-Garonne a tout de même mis les pieds dans le plat en interrogeant la direction au sujet de l'éventuelle fermeture de l'Esat La Pradelle, motif d'inquiétude de certains parents, ou tout au moins celle relative à la supposée "suppression d'ateliers".
Il n'en sera rien lui a peu ou prou assuré Cédric Vareilhes, indiquant que La Pradelle conservera bien sa capacité d'accueil actuelle (37 travailleurs et 24 hébergés au foyer d'accueil médicalisé). Il en va de même pour la pérennité des ateliers pâtisserie et maraîchage, ainsi que pour le verger, le self, l'élevage de poules pondeuses et l'atelier charcuterie. Une nouveauté concerne toutefois ce dernier. "La seule chose qui a changé, c'est la perte de notre label Terroir Cévennes que nous avions quand nous élevions des cochons sur place pour pouvoir faire la charcuterie", confirme le directeur général.
Lequel s'en explique : "Le week-end, il fallait que ce soit les moniteurs d'ateliers qui viennent nourrir les cochons. Sauf que leur mission primaire, c'est l'accompagnement des travailleurs. Comme ils travaillaient le week-end pour nourrir les cochons, ils étaient en repos lundi et mardi. On faisait donc le choix qu'ils soient auprès des cochons plutôt qu'auprès des résidents. C'est pour moi quelque chose d'aberrant. On pouvait aussi s'interroger sur l'abattage des cochons et ce que ça pouvait renvoyer aux personnes autistes. On a donc décidé d'arrêter en faisant plutôt appel à un producteur local pour continuer à faire tourner l'atelier charcuterie."
Au cours de sa visite exhaustive des lieux qui a suivi le temps des échanges, la sous-préfète a eu l'occasion de s'en apercevoir en s'immisçant dans le séchoir où sont suspendus les saucissons (notre photo). L'avenir de l'atelier bois a également fait l'objet d'un éclaircissement. "Largement déficitaire" de l'aveu du directeur général à l'heure où le prix du bois "explose", il va être couplé avec l'atelier maraîchage dans l'espoir de finir "à l’équilibre". Enfin, l'atelier conditionnement récemment mis en place sur l'unité de Vauvert pourrait bientôt débarquer à Saumane.
Pour Laurette Angeli, ces inquiétudes "infondées" de certains parents ne sont que le fruit d'un héritage du passé. "On a passé six ans avec des directeurs successifs incompétents. C’est pour ça que certains parents ont cru que ça allait fermer", peste l'édile saumanoise. Et d'enfoncer : "L'ancienne directrice disait que c’était le Moyen-Âge ici et qu’il fallait en partir. Il a fallu beaucoup d’énergie pour répondre à ces personnes négatives." C'est donc à son initiative que la visite à Saumane de la sous-préfète a largement été consacrée à l'Esat. "Je voulais qu’elle vienne sur place pour voir le potentiel du site", justifie Laurette Angeli.
Guidée par le directeur des services Olivier Colas, Anne Levasseur a trouvé de quoi se rassurer. À l'aise, celle qui jouit d'une "certaine culture du médico-social" s'est même essayée à la calinothérapie en enlaçant plusieurs résidents qui lui tombaient naturellement dans les bras. "Vous avez un bel outil", a-t-elle conclu au terme de sa visite sur les coups de midi.
Un peu plus tôt, la représentante de l'État avait entendu des nouvelles se voulant elles aussi rassurantes. Notamment en ce qui a trait aux évaluations des travailleurs de l'Esat qui feraient "tiquer" plusieurs parents. "Leur inquiétude, c'était qu'on oriente les évalutations comme ça nous arrange. Or on leur a promis que ça serait un tiers extérieur qui mènerait ces évaluations", a rétorqué Cédric Vareilhes.
Et le directeur général de poursuivre au sujet de ces évaluations : "L'idée c'est de dresser le constat le plus objectif possible avec des outils spécifiques à l'autisme. Le but c'est de savoir si les personnes sont vraiment arrivées en bout de parcours au niveau de leur travail, si leur projet de vie n’est pas simplement d’arrêter, et si le fait de laisser une personne dix ou quinze ans sur le même atelier ce n’est pas légitimement lassant."
Un projet de cuisine centrale et la signature de conventions
En brandissant à titre d'exemples certains projets concrets qu'elle s'apprête à mener, la direction de l'établissement entendait distiller autant de signaux positifs. C'était notamment le cas avec la mention de la récente "négociation" d'un contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens (CPOM) avec l'Agence régionale de santé (ARS) et le Conseil départemental. "Notre objectif principal c’est d’ouvrir des places de foyers de vie qui vont dépendre exclusivement des finances du Conseil départemental", insiste Cédric Vareilhes.
La signature d'une convention avec les compagnons de Maguelone en vue d'y vendre les produits fabriqués à l'Esat serait imminente. "On doit se retrouver courant septembre pour la signer", annonce le directeur général. Celle-ci prévoit notamment un échange de salles pour des séminaires, la formation mutualisée de moniteurs d'ateliers et des actions culturelles conjointes.
Aussi, le projet de création de cuisine centrale sur la commune est au stade des études de faisabilité. "On a aussi pris attache auprès de la mairie d’Anduze car on a appris que leur cuisine centrale cherchait un repreneur", soutiennent de concert les protagonistes de la réunion. C'est avec quelques certitudes supplémentaires et en invitant le directeur général de la structure à formuler une réponse argumentée en vue de l'adresser aux parents inquiets que la sous-préfète a quitté le cadre bucolique de l'Esat La Pradelle, pour que lui soient présentés les projets communaux par Laurette Angeli, depuis un restaurant de Saumane.