L'INTERVIEW Christophe Perrin (préfecture du Gard) : "En gestion de crise, ce qui est fondamental, c’est de bien se connaître"
Les services de la préfecture du Gard organisent ce mardi un exercice de Sécurité civile à l’aéroport de Nîmes-Garons. L'objectif affiché : se préparer à toute éventualité en cas d'accident d'un avion. Christophe Perrin, chef du service interministériel de défense et protection civile à la préfecture du Gard nous en dit plus. Interview.
Objectif Gard : Pourquoi la préfecture organise-t-elle cet exercice ?
Christophe Perrin : Il s'agit d'un exercice tout à fait classique. Chaque année, une dizaine sont réalisés. C'est une obligation réglementaire quand vous êtes susceptibles de vivre des crises réelles. L'objectif étant d'être meilleurs et performants si un incident survient. Sur un aéroport, un crash d’avion ou une sortie de piste peuvent arriver, on l’a vu dernièrement dans la région. Lors d'un décollage aussi, on peut avoir un problème technique. C'est donc une phase accidentelle que l’on va tester ce mardi. Sachant que les aéroports doivent simuler en interne tous les deux ans ce type d'exercice. Un exercice général avec les services de la préfecture, c'est tous les cinq ans. Tout cela se fait dans le cadre du dispositif « ORSEC » (Organisation de la réponse de sécurité civile), programme d'organisation des secours.
Qui sera concerné par l'exercice ce mardi ?
Tous les services. D'abord, le responsable de la sécurité : l’exploitant. En l'espèce, Edeis qui gère l'aéroport de Nîmes. Et qui doit à la fois assurer la sureté des salariés, c'est une obligation du droit du travail. Il doit donc prévoir des premiers moyens de secours pour faire en sorte que le sinistre ne sorte pas du périmètre de l’entreprise. Et dans le cadre des besoins extra-site, là c’est la préfecture de Région qui doit assurer les interventions.
Combien de temps pour monter un scénario de ce genre ?
Tout dépend de l’ampleur de l’exercice. Et du nombre de services qui participent. Pour une simulation simple, sans déploiement de réel sur le terrain, on peut dire que la préparation est de quelques jours. Jusqu’à l'exercice comme l'an dernier à la gare de Nîmes où nous avions plus de 400 intervenants. Ce sont donc plusieurs mois de préparation. Il faut prendre en compte la logistique. Sans compter le travail colossal à réaliser auprès des populations en amont pour éviter l’inquiétude ou la panique des riverains. J'ai envie de vous dire que parce que c’est du faux, cela demande encore plus de préparation. Et puis, chaque service à leur niveau se prépare. Le Samu, les pompiers, etc. Si l'on intègre un nombre de blessés, faut déterminer le niveau de blessures, l’urgence de l’intervention. Et organiser les transferts dans la foulée. Il y a tout un niveau de détail à prendre en compte. Et tout cela démultiplie le temps de préparation…
Pour quelles conclusions à la fin ?
Un bon exercice c’est un exercice où l’on va réellement détecter des choses. L’idée est d’éviter les fautes en situation réelle. On va faire le bilan à plusieurs moments. Y compris pendant l’exercice, certains services peuvent déployer des observateurs pour s’assurer que toutes les procédures sont bien appliquées. Je pense aux pompiers et au Samu. À l’arrêt de l’exercice, encore à chaud, on fait un tour de table avant de se quitter. Ensuite, on fait un bilan à froid, après un délai de réflexion limité, avec un rapport écrit. On en tire les points positifs et négatifs. Une nouvelle réunion peut même être enregistrée pour valider l’ensemble. Enfin, le retour d’expérience s’inscrit dans un futur plan d’intervention amélioré. Vous savez, de la théorie à la mise en œuvre, on s’aperçoit que les moyens techniques utilisés ne fonctionnent pas au bon endroit par exemple. Les conditions matérielles ne tiennent pas. Il faut alors faire des modifications immédiatement.
Une des clés de la réussite, c'est aussi le travail en confiance, non ?
Parfaitement, c'est même le plus important dans un exercice. C’est comme le tournage d’un film. Le casting que je vais retenir, il faut connaître les personnalités. En gestion de crise, ce qui est fondamental, c’est de bien se connaître.
Un mot pour terminer sur l'exercice de ce mardi plus spécifiquement...
C’est un exercice inédit sur une demi-journée. On part d'un scénario accidentel. Cette fois, on va s'intéresser surtout aux conséquences psychologiques. Nous aurons la chance d'avoir des participants de l’école d’infirmières de la Croix-Rouge. Il faudra à la fois gérer des victimes blessées mais aussi impliquées. Celles qui assistent à l’accident, la famille de personnes dans l’avion, etc. Un volet psychologique très fort donc avec des appuis de services médicaux et des associations de sécurité d’urgence. La cellule d’urgence médico-psychologique fonctionnera à plein régime... Nous aurons enfin une séquence fort utile, celle de la pression médiatique civile avec la préfecture. Sur site, sur le PC aéroport, la mission sera d’assurer la communication et l’interface avec les médias. D'ailleurs, nous avons demandé aux journalistes de participer aussi à cette simulation. Enfin, on va déployer un poste de commandement opérationnel avancé qui visera à organiser les secours et faire des demandes de besoin urgent. En lien avec la base arrière qui cherchera les solutions.
Propos recueillis par Abdel Samari