BAR DE VILLAGE La renaissance du Jet d’eau à Caveirac
En pleine préparation de la fête votive du village, qui débute le soir-même, le café du Jet d’eau s’apprête à renaître de ses cendres ce mercredi 13 juillet. Les festivités marqueront en effet le baptême du feu des nouveaux propriétaires de cette adresse incontournable à Caveirac depuis les années 30.
À quelques pas de la mairie, en face de la fontaine qui lui a donné son nom, le café du Jet d’eau rythme paisiblement la vie sociale de Caveirac depuis sa création au début des années 30, avant la guerre. Ce mercredi 13 juillet, à l’heure du déjeuner, alors qu’à l’extérieur on installe les barrières pour l’encierro du lendemain et que le restaurant du café n’est pas encore ouvert, les habitués se succèdent dans la salle simplement décorée pour commander demis et pastis. Ici, tout le monde se connait et se mélange dans une ambiance décontractée. Au comptoir, les conversations se lient tranquillement entre amis, famille et connaissances, toutes générations confondues.
Village natal
Mais l’ancien bar du Jet d’eau a pourtant bien failli mettre la clef sous la porte. Depuis une vilaine bagarre il y a une vingtaine d’années, au cours de laquelle des individus masqués avaient tiré des coups de feu devant l’établissement, forçant les clients, dont plusieurs blessés à se réfugier à l’intérieur. Le seul véritable café-bar de Caveirac avait alors perdu sa clientèle et sa douceur de vivre.
Un lustre qu’une enfant du village, Sandrine Champagne (au nom prédestiné) et son mari Olivier tentent de retrouver. « Nous avons repris le café depuis le 9 juillet seulement après en avoir modifié le nom du Bar du Jet d’eau en Café du Jet d’eau, explique la nouvelle patronne, qui a abandonné sa maison d’hôtes dans les Landes pour revenir vivre dans son village natal. Pour retrouver sa fréquentation historique, sa convivialité et son ambiance familiale, nous allons bientôt rouvrir le restaurant tous les jours, et proposer des soirées à thèmes chaque mois. »
« Maintenant je peux mourir tranquille ! »
Un projet familial puisque Sandrine s’occupera du service, tandis que son mari s’installera derrière le comptoir rouge et blanc. En attendant, le père de Sandrine, George dit Georjou, vient donner un coup de main. Né dans la maison en face en 1934 - soit, à quelques années près, le même âge que le Jet d’eau - l’ancien patron de bars nîmois (Le Flamenco, le Clairon rue Sainte-Catherine et le Mondial sur le Gambetta) retrouve une deuxième jeunesse à servir les clients. « Je voulais revenir derrière le comptoir avant de partir, maintenant je peux mourir tranquille ! », sourit le bientôt nonagénaire. « Pas trop vite tout de même ! », le rabrouent gentiment les habitués, au moment de commander un autre Ricard.
Chacun espère que la nouvelle aventure du Jet d’eau durera le plus longtemps possible « Ce bar est ancré dans le village. À 3 ou 4 ans, j’accompagnais déjà mon père lorsqu’il venait jouer au tiercé. Moi, je suis parti à Nîmes avant de revenir vivre ici. Ce bar fait partie de nos racines. On se connait tous ici, on a grandi ensemble et on aime se retrouver ici, au cœur du village », décrit Fabrice, 43 ans, le cordonnier-serrurier de Caveirac. Entre deux conversations sur la fête votive imminente ou le prochain tournoi organisé par le club de pétanque local - la Boule amicale de Caveirac - certains n’hésitent pas à donner un coup de main aux nouveaux patrons pour préparer les festivités.
« On sait quand on arrive, mais jamais quand on repart »
Parmi eux, Titolin, 34 ans, le neveu de Sandrine se prépare, les yeux pétillants, à revivre ses plus beaux souvenirs de fête au Jet d’eau. « Cet endroit, c’est tout simplement notre maison de génération en génération. Petits, on venait déjà avec nos parents. Et aujourd’hui on renoue avec cette ambiance festive et bouvine, où le Ricard coule à flot, s’enthousiasme-t-il. J’ai passé ma vie ici, j’y ai trop de bons souvenirs d’apéro et de soirées. C’est comme cela ici : on sait quand on arrive, mais jamais quand on repart, selon qui passe ! »
Arrière-petit-fils du fondateur du bar, Louis Montredon, Robin, 22 ans, partage l’émotion de son aîné. « Après mon arrière-grand-père, c’est mon grand-père Jean, puis mon père François qui ont tenu ce bar pendant plus de 30 ans. J’ai grandi ici moi aussi : au lieu de déjeuner à la cantine, je mangeais dans la salle tous les midis. Moi, je continue à venir prendre un café le matin ou pour l’apéro de midi, mon préféré ! », lâche-t-il avant de s’offrir une petite sieste avant la fête tant attendue le soir même. Avec une telle relève, la renaissance du Jet d’eau se présente sous les meilleurs auspices.
Pierre Havez