Publié il y a 4 ans - Mise à jour le 24.10.2020 - anthony-maurin - 4 min  - vu 7357 fois

FAIT DU JOUR Et le rideau sur le bar est tombé...

" Et voilà... C'est fini, c'est presque plus triste que pour le confinement... ", conclut un serveur (Photo Anthony Maurin).

En centre-ville de Nîmes, les bars se sont tous pliés à la fermeture à 22h hier soir (Photo Anthony Maurin).

Pas de dernière séance comme le chantait Mister Eddy mais une dernière soirée avant fermeture. Voilà ce qu'ont vécu hier soir les bars de la cité des Antonin. Retour sur un instant figé de la vie sociale nîmoise.

" Ce qui me désole le plus c'est le manque de considération des pouvoirs publics à l'égard de notre profession. On ne peut pas être responsables de la situation actuelle. Pourquoi nous ? " Il y a de l'émotion les mots mais les faits sont froids, figés. Si l'automne a pour habitude de voir tomber les feuilles, les bars verront quant à eux tomber leurs rideaux et espèrent les rouvrir aux beaux jours. Et le gérant d'un bar nîmois de poursuivre " On interdit les terrasses et on laisse faire dans les lycées, les transports en commun... Il semblerait qu'on ne circule que dans les bars, les restaurants et les boites de nuit ! "

De 21h à 6h nous sommes sous couvre-feu et nous devons rester à la maison. Officiellement mis en place dès ce samedi minuit et jusqu'au 14 novembre 2020, ce fameux couvre-feu pourrait être prolongé si ces conséquences n'améliorent pas la situation sanitaire. Les bars sont fermés depuis hier soir pour trois semaines et les restaurants doivent fermés à partir de 21h. Ils sont toutefois toujours autorisés à livrer des repas jusqu'à minuit. C'est la même chose partout dans le Gard et les départements voisins.

Une soirée plutôt calme

Aujourd'hui, les bars sont totalement fermés comme pendant de confinement. L'annonce a été brutale mais l'idée trottait dans toutes les têtes depuis un mois. " On a eu la feria sans feria qu'on n'aurait pas dû avoir. On commençait à remonter la pente même si les chiffres ne sont pas fous. On se doutait bien que la sentence allait tomber tôt ou tard... Ils auraient juste pu nous laisser le week-end-end complet ou les vacances dans leur totalité avant de mettre ces nouvelles interdictions en application ", estime un serveur du boulevard Courbet.

Au pied de la Maison carrée, pas grand monde sur les coups de 20h. Il faut dire que la grosse averse tombée en fin d'après-midi a dû freiner les festaïres (Photo Anthony Maurin).

Sur le boulevard Victor-Hugo les bistrots pour jeunots affichent complet sur les coups de 20h. Sage, sobre et respectueuse de toutes les barrières, la clientèle tient tout de même à "fêter" ça. Une étudiante prend la parole : " C'est vendredi donc c'est sortie ! Elle a une saveur spéciale car c'est la dernière avant longtemps... C'est dommage car nous aimons nous retrouver ici. Dès demain, on fera ça à la maison ! Nous nous connaissons, mais tous les jeunes font ça et c'est pas en fermant les bars qu'on va stopper le virus. Ça peut même avoir l'effet contraire. "

Plus au centre, du côté de la place aux Herbes. " Bon, c'est les vacances, nous sommes vendredi soir et il y a un peu de monde. On en profite un peu aujourd'hui mais notre clientèle est plutôt du matin. Fermer pour quelques semaines, c'est compliqué pour le patron comme pour le personnel et la clientèle. Tout le monde est pénalisé, nous avons tous nos habitudes. Ici il n'y a pas de jeunes donc je ne pense pas que le virus circule beaucoup mais il est certain que sur l'agglo les choses vont mal. Je comprends ce couvre-feu mais il se fait au détriment du commerce et de l'économie ", explique un client désappointé.

"J'ai décidé de bloquer les prélèvements"

Alors pourrait-on voir fleurir des bars qui se transforment petit à petit en restaurant pour sauver les meubles ? Que nenni! Le préfet du Gard, Didier Lauga, ne veut pas en entendre parler. Dans un restaurant il y a forcément une cuisine, pas qu'un simple instrument qui sert à réchauffer les plats. Il y a aussi un système d'aspiration d'air... Sans ce minimum, un restaurant n'en est pas un et les bars un peu trop "joueurs" pourraient se voir infliger de belles amendes.

Sur le boulevard Courbet, c'est pas la foule des grands soirs  (Photo Anthony Maurin).

Sur les réseaux sociaux, les propos ne sont pas tendres. " Attendez le mois de janvier que le Gouvernement compte deux à trois millions de chômeur de plus et on en reparlera... Il n'y a pas de concertation avec les syndicats de nos professions, tout était acté d'avance. " Pour un autre, " Moi, j'ai décidé de bloquer tous les prélèvements ! Je paie les salaires de mon personnel et je bloque tout le reste. Je me contrefiche de ce que je risque mais ça sera comme ça. Qu'il vienne me chercher, la vengeance est un plat qui se mange sans sauce ! "

Une obéissance regrettée ?

L'injustice semble régner et pour le patron d'un troquet de l'Écusson, " on a un préfet très à l'écoute de son ministre et qui fait exactement ce qu'on lui dit sans prendre de gants ni réfléchir à la situation de son département. Je ne comprends toujours pas, avec la mise en place d'un couvre-feu à 21h, l'intérêt de fermer les bars la journée ! Nous appliquons les mesures, restrictives, depuis six mois et la seule récompense qu'on a c'est une fermeture ? Quel a été l'intérêt d'obéir sagement ? On va peut-être nous permettre de rouvrir pour les fêtes, j'espère, mais si c'est pour garder les mêmes mesures et un autre couvre-feu, ça ne sert à rien. On reste fermé et l'État nous rachète nos établissement. "

" Et la journée alors, on continue avec le masque sur la tronche ? Comme ça n'a pas marché... Autant respirer le bon air ! ", lance un client. Bon, allez, il est l'heure de se dire au revoir. Certains pensent même aux adieux. Les clients déboussolés, les patrons et serveurs irrités, comment faire pour finir la soirée ? " Bon courage... On se verra quand même ! ", questionne une cliente. " À dans six mois ! ", lui lance un serveur. Et cette fois fois, c'est sûr : sur l'écran blanc de leurs nuits noires, le rideau est tombé.

Et aussi : dernière soirée dans les cinémas

Dernières séances en soirée au Sémaphore. (Photo Boris Boutet)

S'ils n'ont pas fermé leurs portes à minuit, les cinéma ont proposé leurs dernières séances en soirée ce vendredi. "On se débrouillera pour venir en journée sur nos jours de repos, prévoit Yann, un habitué des cinémas nîmois. Je ne voulais pas manquer la dernière séance du soir avant au moins six semaines." Du côté des gérants du Sémaphore, la programmation a été retravaillée en urgence. "Pour les films courts, les dernières séances seront désormais à 19 heures, explique un employé. On s'adapte comme on peu, comme toujours. Il n'y pas plus de monde que d'habitude, l'affluence est assez ordinaire pour un vendredi soir." Car pour beaucoup, l'arrêt des séances du soir ne mènera pas à un abandon des salles de cinéma.

Anthony Maurin

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