FAIT DU JOUR Michel, brandade et graffitis … Docu réalité
"Quand je quitte Nîmes, j'ai des boutons qui me poussent dans le dos"… Ainsi parlait Michel au tout début du film, Michel, brandade et graffitis … Projeté au Cratère d'Alès lors du festival Itinérances, qui vient tout juste de s'achever, entre fiction et documentaire, une plongée dans l'univers du graff nîmois. L'occasion d'une toile dont on sort moins bête et d'une rencontre avec le réalisateur, deux des protagonistes et la productrice. Immersion dans un petit monde dans notre monde.
Des graffs on en a tous vus. On a presque tous un avis sur la question. Pourtant nous sommes très peu à savoir comment nos murs, nos wagons de chemins de fer ou tout autre support urbain se transforment en toile géantes pour peintres urbains. Artistes ou gribouilleurs? Qui sont les acteurs de ces mutations interdites? Quel est leur carburant ? Univers underground dont les émergences font aujourd'hui parfois référence dans la cour des grands où certains graffeurs ont droit de cité, quand d'autres finissent parfois plus d'une nuit à l'ombre… L'association Da Strom dont le propos est de permettre aux représentants et aux amateurs des cultures urbaines (deejaying, rap, graffiti, danse hip hop, beatbox…) de partager et de faire vivre leur passion, commande un film sur le Graff nîmois à un certain Gecko Ciocca.
Depuis la fin des 90's L'homme est un activiste du hip-hop dans le Sud. À l'origine, c'est un graffeur nîmois donc. Après l'événementiel, la radio et après avoir shooté le globe à travers ses voyages alternatifs, il s'investit dans la vidéo. Avec pour mentor Aymar Koulaninga ou encore le collectif Super Studio, il s’essaie aux clips, courts métrages et vidéos de voyage. Michel, Brandade & Graffiti, est son premier court métrage. Et comme il a évolué dans ce milieu assez opaque, il en connaît donc extrêmement bien ses protagonistes. C'est un bon début mais c'est insuffisant pour assurer la réussite de l'entreprise. L'idée étant d'intéresser au sujet le public le plus vaste possible, Gecko a besoin d'un fil rouge qui nous attache à Nîmes et à ses traditions. Un Nîmois pur et dur. Michel, le père d'une de ses amies, a vraiment été fasciné par la fresque sur la façade de son bâtiment. Son personnage est tout trouvé ! Michel part donc à travers le Gard rencontrer les protagonistes de cette discipline si mystérieuse avec un œil de candide, un enthousiasme d'enfant et une gouaille 100% nîmoise.
Les graffeurs, filmés par l'un des leurs se livrent avec naturel. Sans chauvinisme on est tout de même fier d'apprendre que le graffiti gardois est reconnu au rang national et ce depuis plusieurs décennies, alors même que le mouvement était beaucoup plus « underground ». Le documentaire retrace l'émergence de ce mouvement souvent décrié, des années 90 jusqu'à aujourd'hui. Du coup, c'est aussi une véritable découverte de la "biodiversité" de la faune du graff. Au départ pourtant, il sont tous les mêmes. On commence par des tags au collège… D'abord, c'est le crayon qui démange puis on passe au marqueur puis à la bombe… On ne lâche jamais le marqueur… Puis vite, viennent les premières expériences dans la rue. Partie de cache-cache avec la police, course poursuite, amende, prison parfois … Au début du parcours, on peut parler d'un "tronc commun".
C'est ensuite que l'espèce va se diviser en une grande variété de sous-espèces. Il y a ceux qui se constituent en collectifs, exposent, réalisent des fresques de commande, bref passent à la légalité, tirant reconnaissance et subsides de leur passion. D'autres mutent vers des arts satellites comme Gecko l'image ou Kreo, l'un des protagonistes du film, que le graff a amené au rap. Enfin, il y a les résistants, les purs et durs, les masqués… ceux pour qui le graff doit rester subversif, interdit, nocturne, pourvoyeur d'adrénaline. Ils ont leurs "mensualités amendes" comme d'autres, leurs crédits immobiliers. Il faut dire que c'est cher, graffer sur un wagon coûte 1200 € du M2… Mais ils ne se "vendront" pas. Même s'ils reconnaissent que l'addiction a un prix élevé. Tous parlent de graff. Un conseil, si vous voulez vous faire accepter dans le milieu, évitez de balancer un "street art" dans la conversation, c'est l'expression bobo. De la récupération, lâche Kreo dans un sourire … Aujourd'hui, les institutionnels font mine de s'intéresser au phénomène mais ils ne nous prennent pas vraiment au sérieux. Il nous laissent faire joujou avec des bâtiments appelés à être détruits.
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Le phénomène graff est en marche et de l'avis de tous, Nîmes n'a pas raté le train. Le prochain projet de Gecko : combiner la vidéo et sa passion du voyage... . Kreo poursuit sa carrière de rappeur et travaille à la propreté de la ville de Nîmes,Da Storm continue de promouvoir le mouvement hip hop. Quant à Michel il rêve de Cannes, de tapis rouge … La brandade j'en ai un peu marre, j'en ai trop mangé pendant le tournage…
En attendant de pouvoir le télécharger sur le net, Michel,brandade et graffitis sera en projection à Millau le 26 mai prochain. Et la bande-annonce et d'ores et déjà disponible sur Youtube.
Véronique Palomar
veronique.palomar@objectifgard.com