Publié il y a 1 an - Mise à jour le 25.04.2023 - Propos recueillis par Abdel Samari - 3 min  - vu 3905 fois

L'INTERVIEW Ludovic Martin, directeur général Transdev Nîmes : "Nous avons des difficultés à gérer les individus susceptibles de passer à l'acte"

Ludovic Martin

Ludovic Martin, directeur général de Transdev Nîmes

- Photo Anthony Maurin

Après l'agression de l'un des conducteurs du réseau Tango Bus à Nîmes, l'entreprise a décidé de l'arrêt de son activité hier lundi, entre 12 heures et 14 heures. Ludovic Martin, directeur général Transdev Nîmes, nous explique s'il s'agit d'un cas isolé ou d'une expression de la violence à Nîmes.

Objectif Gard : Après l'agression dimanche d'un conducteur, dans quel état d'esprit se trouve le personnel du réseau Tango ?

Ludovic Martin : Les conducteurs sont interpellés par l'agression de leur collègue, d'autant qu'elle a été particulièrement violente. Heureusement, l'affaire a été bien suivie. À la fois par les pompiers, qui sont rapidement arrivés sur les lieux pour venir en aide au conducteur blessé, et par la police qui a interpellé l'individu en moins de 24 heures. 

Les caméras de surveillance à l'intérieur du bus ont fonctionné ?

Oui, les images ont été réquisitionnées par la police. On voit parfaitement l'individu, son visage et les coups portés. Par ailleurs, le conducteur et la direction de Transdev Nîmes ont été auditionnées pour définir le profil de l'agresseur. 

Quelles sont les causes de cette violence, selon vous ?

L'individu était avec une poussette double. Le bus circulait sur une ligne droite. Il a interpellé le conducteur en lui demandant de rouler moins vite. Le conducteur lui a signifié avec politesse qu'il ne roulait pas vite et sans comprendre, l'agresseur a cassé le plexiglas de protection, a attrapé le conducteur et l'a violenté. C'est un acte purement gratuit, sans aucune raison objective. D'autant que le conducteur agressé est exemplaire. Je n'ai jamais entendu parler de lui...

Est-ce que cet acte est le symptôme d'une violence de plus en plus prégnante à Nîmes ?

C'est en tout cas le reflet de la société d'aujourd'hui et de ses dérives. Nous avons des difficultés à gérer les individus susceptibles de passer à l'acte, qui pourraient potentiellement être porteur d'armes. Nous avons des consignes de sécurité. Les conducteurs ne doivent pas se mettre en danger. Immédiatement, ils doivent donner l'alerte par un appel d'urgence. Une prise en charge s'opère au PC sécurité et les forces de l'ordre se rendent immédiatement sur place. 

Franck Proust, le président de Nîmes métropole, dernièrement dans une interview sur Objectif Gard exprimait le souhait du retour des médiateurs dans les bus. N'est-ce pas l'une des solutions ?

Aujourd'hui, ce n'est pas l'unique solution. Je rappelle que les médiateurs à Nîmes étaient jusque-là sous convention avec l'État. La préfecture du Gard refuse aujourd'hui de nous allouer des moyens pour recruter des médiateurs alors que pendant longtemps, le financement de leur rémunération était pris en charge à près de 80% par l'État. On nous parle depuis des mois d'une police des transports. Une douzaine de recrutements au 1er janvier 2024. Je pense que ce serait la bonne solution qui permettrait une réelle efficacité et une couverture spatiale du territoire. Sans compter les coopérations possibles avec les différents services de sécurité municipaux et nationaux. 

L'une des problématiques rencontrées par le réseau concerne les jets de pierre sur le matériel roulant. Où en sommes-nous ?

Je suis un peu moins inquiet, si je peux m'exprimer ainsi. Les volumes ont baissé si je compare l'année 2019 à celle de 2022. Nous avions 152 caillassages, l'année dernière, le nombre a été divisé par deux.

Comment peut-on l'expliquer ?

Je ne saurai pas l'expliquer par une seule chose. Je pense que c'est un ensemble de solutions qui ont porté leur fruit, même si tout cela reste fragile. Je dirais que nous avons peut-être davantage ouvert l'entreprise à l'extérieur. Nous avons mené des actions auprès des associations de quartier. Nous avons fait le choix de privilégier des stages dans l'entreprise sur des populations issues de ces quartiers. Ces actions de proximité montrent, semble-t-il, leur efficacité.

Enfin, un mot sur la pénurie de conducteurs dont souffre le réseau Tango. Est-ce durable ?

Ce n'est pas une pénurie chez Transdev mais chez nos sous-traitants. Elle est liée aux contenus de l'offre d'emploi, proposée avec des temps partiels, une rémunération plus faible aussi. Et une adaptation post-covid qui touche l'ensemble du pays. Le regard par rapport au travail a changé. Les nouveaux profils cherchent à privilégier la vie personnelle avant tout. Quand nous lançons un recrutement, les premières questions sont liées aux horaires de travail et les jours travaillés le week-end. Il faut dont désormais réfléchir dans les années à venir à un nouveau rythme de travail qui s'adapte à la fois aux attentes individuelles, mais aussi à la nécessité de service. Est-ce qu'il faut généraliser le travail sur quatre jours ? Mais cela implique des journées plus longues de travail et un risque lié à la fatigue. En tout état de cause, il manque 1 000 conducteurs dans toute la France et à Nîmes, une bonne dizaine. Nous ne sommes pas les plus mal lotis. Quand je discute avec mes homologues de Montpellier, qui subissent aussi un manque important de conducteurs, ils se tournent dorénavant vers des profils parisiens qui ont vocation à s'installer dans le sud de la France. C'est peut-être une piste à explorer.

Propos recueillis par Abdel Samari

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