FAIT DU JOUR Silence ! Moteur ! Ça recrute !
Films, séries, production américaine ou encore feuilletons TV quotidiens… Les équipes de cinéma ou de télévision misent de plus en plus sur le département et la région Occitanie. Découvrez notre dossier à retrouver dans le magazine Objectif Gard actuellement en kiosque dans tous les marchands de journaux du Gard jusqu'au 26 juin.
« Je ne pensais pas qu’il y avait des débouchés dans l’audiovisuel. Pour moi, c’était un métier presque fantaisiste, impossible à atteindre.» Kevin Brunner a radicalement changé d’avis. Juste après son Master fiction obtenu à Unîmes, il a tout de suite décroché un poste de junior réalisateur. TF1 filme en cette fin juin le Cévenol Julien Doré en Camargue pour sa nouvelle série Panda. La Nîmoise Sarah-Cheyenne Santoni a tourné des séquences avec lui. Depuis 2020, elle incarne Élodie, personnage qui va et vient dans la série de TF1 Ici tout commence. Ce feuilleton est tourné à Saint-Laurent-d’Aigouze. Les Gardois Folco Marchi et Matthieu Rodriguez jouent pour la concurrence du côté de Vendargues. Ils tournent dans Un si grand soleil de France TV. Le réalisateur américain Scott Franck a choisi Sauve pour sa nouvelle série M.Spade. Paris n’a plus le monopole exclusif de l’audiovisuel. Enquête.
Il est pacifiste, mange vegan et boit du thé matcha. Cet ancien flic vit très loin des ordinateurs et autres smartphones. Panda s’est retiré du monde pour tenir une paillote. Le Cévenol Julien Doré est le héros de cette série policière en six épisodes. En cette fin juin, il tourne des séquences en Camargue gardoise.
Les tournages se multiplient depuis un an dans le Gard. Le département a servi de décor pour trois longs métrages destinés au cinéma. Le réalisateur Michel Gondry a tourné en juin 2022, Le livre des solutions, au cœur des Cévennes, entre Saint-Sauveur-Camprieu et Villemagne. Entre le 17 et le 29 octobre, Karim Dridi a posé ses caméras dans une ancienne usine à La Grand’Combe pour un long métrage pour l’instant baptisé Muscles. La partie Est du département n’est pas oubliée. Entre le 11 et le 14 avril, on a pu apercevoir le comédien Ahmed Sylla à Uzès pour le film Ici et là-bas.
Production américaine et série quotidienne
Les villages pittoresques, un peu hors du temps du Gard, ont aussi séduit le réalisateur américain Scott Franck. Celui qui est connu pour la série Le jeu de la dame, énorme succès sur Netflix, est venu l’automne dernier à Sauve pour un nouveau projet : M.Spade avec Clive Owen. Les paysages de Sauve seront-ils téléchargés des milliers de fois sur Netflix ? Mystère. Cette nouvelle production a été développée pour une plateforme américaine et on ne sait pas encore quelle plateforme la diffusera en Europe. Par contre, depuis 2020, on peut voir tous les jours de la semaine, sur TF1, des images de Saint-Laurent-d’Aigouze, dans Ici tout commence. La post production de cette série est faite à Sète qui sert de plateau pour l’autre feuilleton quotidien de TF1, Demain nous appartient. France télévisions n’est pas très loin. Elle a un plateau à Vendargues, à la limite du Gard et de l’Hérault, où elle tourne sa propre série quotidienne Un si grand soleil. Trois feuilletons TV quotidiens sont donc tournés dans le triangle Sète-Montpellier-Nîmes.
Des séries locomotives
« C’est unique en France. C’est une énorme locomotive pour tout le secteur », observe Maxime Beaufey, en charge de l’accueil des tournages chez Occitanie films. Si Scott Franck a tourné l’essentiel de son feuilleton à Sauve, il a aussi utilisé les studios de France télévisions pour des scènes de voiture sur fond vert. « Il y a quelques années, les séries venaient pour quelques jours dans la région. Là, elles s’ancrent dans le territoire », ajoute Maxime Beaufey. Des techniciens choisissent de s’installer ici et offrent un vivier pour attirer de nouvelles productions. Mais si les jours de tournage augmentent autant, c’est aussi grâce aux atouts géographiques de la région. « Villes modernes, littoraux, endroits très sauvages comme les salins d’Aigues-Mortes… On trouve des décors naturels variés à une courte distance, détaille Maxime Beaufey. En plus, le Gard est particulièrement bien desservi en TGV depuis Paris. C’est essentiel. »
Le taux d’ensoleillement garantit de tourner plus facilement des scènes en extérieur. « Il y a tellement de tournages à Paris que c’est plus difficile d’avoir les autorisations car les riverains râlent parfois, indique Guillaume Husson, chargé de production sur la série Ici tout commence. Ici c’est plus facile. »
Mesures incitatives
La région Occitanie incite aussi les réalisateurs à venir. « La moitié des films tournés sur la région reçoivent une aide financière de la région Occitanie. Le montant est évalué au cas par cas », reconnaît Maxime Beaufey. La Région propose également aux productions un fichier avec les coordonnées des professionnels locaux du cinéma. La loi interdit de mettre une clause demandant de favoriser l’emploi régional. Mais les productions jouent le jeu. « On va d’abord regarder le fichier des techniciens de la région, reconnaît Guillaume Husson. En plus, quand on emploie des locaux, on n’a pas à les héberger ni à les transporter. » Il y a environ 70 % d’embauches locales dans la série Ici tout commence. On peut donc trouver des professionnels locaux à tous les postes techniques : coiffure, costume, caméra, machinerie…
Étudiants et figurants
Ce feuilleton raconte les péripéties d’une école de gastronomie. Pour incarner les élèves, elle a systématiquement besoin de figurants entre 18 et 25 ans. Elle recrute aussi ponctuellement des figurants plus âgés, qui jouent les clients des restaurants. Tous sont payés 94 euros brut la journée. « Toutes les semaines, on embauche une centaine de figurants », compte Guillaume Husson. Tous viennent des environs car la production ne paie pas leurs frais d’hébergement ou de route. Les figurants qui jouent les élèves reviennent chaque fois que leur classe est à l’écran. « Il y en a qui sont quasiment là tous les jours. On a pas mal d’étudiants, d’élèves d’écoles de théâtre, de la filière de cinéma de l’université Paul-Valéry, de l’école de cinéma travelling… », constate Guillaume Husson. Ils embauchent aussi parfois des figurants de l’école nîmoise Vatel qui maîtrisent bien la cuisine.
Ici tout commence fait aussi appel à des prestataires du secteur pour l’entretien des espaces verts, la plomberie ou le ménage. « On a un partenariat avec l’ESAT les Chênes verts qui fournit les gâteaux pour la table régie. On va peut-être travailler avec eux pour la carrosserie et avec un autre ESAT pour la blanchisserie », ajoute Guillaume Husson.
Faire vivre les commerces locaux
L’arrivée de la série en 2020 a bouleversé ce village camarguais de 3 620 habitants. Plus de 200 personnes sont présentes chaque jour de tournage sur le plateau. Ici tout commence met en boîte un épisode par jour. Les tournages se déroulent du lundi au vendredi. Ils s’accordent simplement une pause entre Noël et le jour de l’An, ainsi qu’une semaine en août durant la fête votive de Saint-Laurent-d’Aigouze. Les acteurs et techniciens sont logés dans le secteur et font vivre les commerces locaux. La communauté de communes a même ouvert une boutique dédiée à la série et organise des visites guidées. « Pendant les vacances scolaires, il y a beaucoup de monde », observe Thierry Féline, maire du village. Il reconnaît que, côté stationnement, c’est parfois tendu mais il ne regrette rien : « C’est un avantage, cela fait connaître le village. »
Même si pendant près de six semaines, il a fallu vider Sauve de tout véhicule, Olivier Gaillard, maire de cette commune du Piémont cévenol, garde un excellent souvenir de M. Spade. « Ils avaient leur propre cantine à midi. Mais il y avait près de 110 personnes le soir qui devaient manger dans le secteur. Les restaurants ont prolongé la saison estivale », analyse-t-il. Il a fallu aussi loger l’équipe sur place. La production a également joué le jeu de l’emploi local. « Il y a pas mal d’intermittents du spectacle sur Sauve. Tous ceux qui pouvaient travailler en lien avec la série ont été recrutés, précise le maire. Près d’une centaine denon-professionnels de la commune ont même été embauchés comme figurants. Ils les prenaient chacun entre une et trois fois pour que le maximum de personnes puisse participer. » Il l’avoue avec un immense sourire dans la voix : il est très ouvert à toute nouvelle proposition de tournage.
Ils devraient continuer à se développer dans la région. L’Occitanie a remporté onze appels à projet dans le cadre du plan France 2030. Elle est la seconde région la mieux dotée après la région parisienne. D’importantes subventions vont être versées notamment pour deux gros projets de studios. Le studio France télévision de Vendargues va être agrandi pour mettre en place un hub créatif de 8 hectares. Un autre projet, Pics studio, porté notamment par Véronique Cuilhé, prévoit de construire 16 500 m2 de studios d’envergure internationale sur trois communes voisines de Montpellier à l’horizon 2025-2026.
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