Publié il y a 13 h - Mise à jour le 10.12.2024 - Anthony Maurin - 5 min  - vu 220 fois

FAIT DU SOIR Rudy Ricciotti donnera le la du conservatoire nîmois

Nîmes conservatoire Rudy Ricciotti (Photo Anthony Maurin)IMG_3466

Rudy Ricciotti devant du Claude Viallat, tout un symbole (Photo Anthony Maurin)

On a cru que c’était une Arlésienne, pourtant, le nouveau conservatoire de Nîmes sera pensé par l’architecte Rudy Ricciotti, amoureux du sud, défenseur des libertés locales.

Le projet du nouveau conservatoire situé place des Carmes est conçu pour l'apprentissage et la diffusion de la musique, de la danse et du théâtre, disciplines réunies sur un même et unique site. L'ambition du projet est d'offrir un meilleur confort d'usage à tous les utilisateurs. Suite à un dialogue compétitif, c'est l'architecte Rudy Ricciotti qui en assurera la conception.

« Il faudra étayer la critique, car le projet est dans les tuyaux depuis longtemps ! » prévenait Pascal Gourdel, adjoint aux finances de la Ville de Nîmes. Un projet à 30 millions d’euros et les responsabilités qui vont avec.

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À gauche, le bâtiment signé Sir Norman Forster et, à droite, le futur conservatoire de Rudy Ricciotti (Photo Rudy Ricciotti Architecte).

Remontons le temps. Le bâtiment d'origine est un théâtre de style « Renaissance », construit au milieu du XIXe siècle. Incendié par deux fois avant la fin du XIXe siècle, il sera reconstruit quasi entièrement, à l'arrière de sa façade patrimoniale, pour accueillir le grand magasin « Paris-Nîmes » à l'aube du XXe siècle. Après 1945, le grand magasin prend le nom des « Dames de France » et ferme en 1986, laissant place à une galerie d'antiquaires puis à une partie de l’université de Nîmes.

Nîmes et son conservatoire sont en difficulté depuis des lustres. Éclatées sur trois sites, les structures seront déplacées et regroupées en un seul et même site, celui dit des Carmes, Place Gabriel-Péri, au sein de l’actuel bâtiment de l’université, mais, pour les anciens, on parle du magasin des Dames de France !

Le site des Carmes (Photo Anthony Maurin).

Pour l’adjointe à la culture, Sophie Roulle, « C’est un projet qui tient à cœur à Jean-Paul Fournier, le maire de Nîmes. Ce projet, c’est la rénovation d’un bâti existant, la réhabilitation d’un quartier qui en a besoin, car le conservatoire sera un phare culturel, un tremplin pour l’essentiel des acteurs de la culture. » Ainsi, l’accueil du millier d’élèves n’en sera que meilleur.

Le choix de cette implantation n’a pas été facile. Architecte elle-même, Sophie Roulle pense à « créer de nouveaux flux. C’est un choix écologique qui ne grignote pas d’espace ailleurs en ville, l’image et le projet sont forts, Rudy Ricciotti sublime le béton et nous sommes heureux de lui confier le projet. »

La cour du Conservatoire avant son déménagement... plus ou moins proche dans le temps en direction des Carmes (Photo Archives Anthony Maurin).

Il faut rappeler que l’architecte qui a fait le Mucem, le mémorial du camp de Rivesaltes, le pavillon noir d’Aix-en-Provence, le département des arts de l’islam au Louvre… a raté de peu la réalisation du Musée de la Romanité pour lequel il était arrivé en finale.

Adjoint à la culture à l’époque, Daniel Jean Valade est heureux d’enfin voir en ville débarquer l’art de Ricciotti. « Alléluia, on y arrive ! J’étais un très mauvais élève quand j’étais jeune et au conservatoire qui était déjà en ruines… Dans ces lieux, le conservatoire aura la place et tout pour que les 60 professeurs puissent offrir un bon enseignement aux élèves. Ricciotti est ancré dans la région. »

Rudy Ricciotti. On le voit à Nîmes, c’est vrai, comme on le voit à Arles, le plus souvent en feria, aux arènes, pour le plus grand bonheur des aficionados qui adorent le regarder vivre une corrida. Il est d’ailleurs né en 1952, quelques semaines juste après la première feria de Nîmes. Depuis, il est connu à l’international.

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Rudy Ricciotti, Sophie Roulle, Daniel Jean Valade et Pascal Gourdel (Photo Anthony Maurin).

« Internationalement connu ? Oui, j’ai une carrière, mais je suis surtout très attaché au local ! Petit, j’habitais à Port-Saint-Louis-du-Rhône, je sais d’où je viens, car je n’avais aucun destin avant de devenir ingénieur puis architecte. Le sud est mon horizon ! » note le lauréat du concours nîmois.

« Mon voyage, c’est aussi d’être ici, ça me touche d’être à Nîmes et ça me responsabilise, c’est une aventure à risques parce que l’opération est très complexe… J’aurais préféré faire le Musée de la Romanité, mais je suis déjà content d’avoir fait le bâtiment du CD30. » Si vous ne le savez pas encore, c'est Rudy Ricciotti qui a réalisé le long bâtiment avec la façade en verre stickée de jeans de Nîmes !

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L'atrium du futur conservatoire imaginé par Rudy Ricciotti (Photo Rudy Ricciotti Architecte)

La façade historique sera soigneusement conservée et deviendra le socle d'une surélévation légère et moderne qui élèvera le bâtiment tout en maintenant l'équilibre du paysage urbain. Cette extension, réalisée dans des matériaux tels que le métal, le bois et le verre, sera enveloppée d'une peau de lamelles en zinc.

Mais, en ville et sur un site existant et élégant, c’est une autre paire de manches. « Ce projet m’inquiète beaucoup, il est vraiment très difficile. La façade est belle, historique, la linéarité est la profondeur de la parcelle sont importantes, je recycle les fondations et les structures porteuses pour rentrer dans le budget serré, car si on parle de 30 millions d’euros, mais il y a déjà 15 millions d’euros HT juste de travaux ! »

C’est ici que Ricciotti ne se comporte pas comme un nom connu à l’international. « J’ai 72 ans, même si ça ne se voit pas, mais j’ai l’honneur d’éviter de mettre dans le merdier les élus locaux qui nous font confiance. Je suis heureux, ça me touche vraiment de faire ces travaux pour les Nîmois. Et je trouve très belle la proximité avec ce qu’a fait mon ami Norman avec la Porte Romaine. Des lieux culturels, je connais tellement ça par cœur… J’en suis devenu paranoïaque, il faut être solide pour un projet qu’on aborde avec une telle anxiété… »

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Rudy Ricciotti devant du Claude Viallat, tout un symbole (Photo Anthony Maurin)

Le projet prévoit également la création d'un auditorium afin d'accueillir des jurys, des représentations ou des répétitions. Doté de 220 places avec des équipements scénographiques et une arrière-scène, il permettra de faire rayonner les pratiques du conservatoire au niveau départemental.

Selon l’architecte, la façade sera chouchoutée au badigeon de chaux. Le lieu sera un vrai centre d’art, adapté et avec de la lumière naturelle fondamentale dans le processus de création. La cerise sur le gâteau ? « Sur la grande façade il y aura la salle de danse et tout cela donne sur la place, il y a un côté voyeuriste ! »

Le conservatoire de Nîmes, c’est 60 professeurs, un millier d’élèves, donc probablement 6 000 personnes concernées par ces évolutions. Pour l’élu aux finances, qui tient à remercier les services de la Ville, c’est une bonne chose. La logique fonctionnelle du site s'est construite sur la base des principaux espaces qui composent le conservatoire, à savoir les cinq grands pôles d'activités du conservatoire. Le pôle « accueil et convivialité », le pôle « diffusion », le pôle « pratiques collectives » et, enfin, le pôle « formation musicale, chorégraphique et art dramatique » avant de terminer par le pôle « pratiques individuelles ».

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L'auditorium du futur conservatoire imaginé par Rudy Ricciotti (Photo Rudy Ricciotti Architecte)

« Le dialogue a été compétitif, car c’est une école dans laquelle on enseignera. Ça sera un excellent bâtiment d’accueil avec une partie administrative. Cela coûte 30 millions, mais cela libère aussi trois lieux qui vont amener des réflexions quant à leur avenir. Nous allons aussi faire de grandes économies d’énergies, mais nous devions attendre le déménagement de l’université vers le site Hoche pour concrétiser le projet qui devrait voir le jour d'ici à 2030. »

Nîmes est le pays des reboussiers. Faire quelque chose, c’est aussi s’attirer les foudres de certains. En gars du sud, Ricciotti le sait. Mais il sait aussi qu’une ville peut se reconstruire sur elle-même et qu’il faut faire visiter les chantiers aux jeunes, mais surtout aux vieux qui décrochent un peu !

« J’ai une grande gueule, mais je suis mou de l’intérieur, plutôt comme un collabo… J’entends les critiques, je n’ai plus vraiment d’orgueil, mais il y a des limites à l’action participative, tout le monde n’est pas autorisé à donner son avis, son expertise. J’aime beaucoup la ville de Nîmes, je suis peut-être vulgaire et/ou profane, mais je l’aime », conclut l’architecte au vrai grand cœur.

Anthony Maurin

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