VILLENEUVE-LEZ-AVIGNON Les "mémoires d'arbre" de Marc Nucera s'exposent à l'Abbaye Saint-André
"C'est le parcours qui fait l'oeuvre". Cette petite phrase que répète Marc Nucera prend tout son sens quand on sait que l'artiste a 35 ans de carrière et 600 sculptures à son actif. Son exposition "De mémoire d'arbre" est visible jusqu'au 4 juin, à l'Abbaye Saint-André.
Quand Marc Nucera sculpte un arbre, on assiste à "une danse, à un engagement fort du corps pour ne pas lâcher la ligne", comme il le décrit. Il ne travaille qu'avec des tronçonneuses. Un outil bien bruyant, aux antipodes de la délicatesse, de la douceur que l'on retrouve dans ses oeuvres au souffle bouillonnant. C'est cette dualité qui fait toute la singularité de l'art de Marc Nucera. Jusqu'au 4 juin, les visiteurs de l'Abbaye Saint-André pourront découvrir une partie de son travail : torsions drapées, colonnes, prieuses ou encore cocons veinés.
Chaque pièce est unique. L'artiste travaille à l'improvisation dans son atelier à Noves, mais tient à respecter "l'identité de chaque arbre, en s'appuyant sur ses noeuds, ses failles, ses incidents..." Il conserve la circonférence initiale du tronc, "c'est pour cela que l'exposition s'appelle "De mémoire d'arbre"", glisse-t-il.
"Je suis pour l'expérience, pour la recherche"
Ce respect du bois, Marc Nucera le tient de son père ébéniste : "Je suis né dans la sciure, j'ai tout de suite compris la valeur, la richesse de cette matière. Alors quand je me trouvais devant un arbre mort, je faisais en sorte qu'il puisse continuer à participer au paysage." L'artiste a commencé avec du land art : "Une grande partie de ce travail a disparu. On ne peut pas maîtriser ce changement incessant, cette puissance du renouvellement." Puis il a basculé sur un travail en atelier et cela fait plus de trente ans que ça dure...
"C'est un investissement pour garder une dynamique en conservant la fluidité. Chaque oeuvre est un fragment d'inachevé. Je suis pour l'expérience, pour la recherche. À chaque fois, c'est un exercice différent", explique Marc Nucera. Au fil des ans, son arbre préféré est devenu le cyprès; il fait partie du patrimoine provençal, parfois mal considéré. L'artiste s'attache toujours à intervenir sur des essences locales. Il les transforme, les réenchante, leur donne une nouvelle vie. Car l'artiste en est persuadé : "un arbre mort est toujours chargé de vie, il garde son identité". En témoigne les effluves résineuses qui émanent de chaque pièce de l'exposition.
L'exposition "De mémoire d'arbre" est visible à l'Abbaye Saint-André jusqu'au 4 juin. Le public pourra également rencontrer Marc Nucera les samedis 25 mars, 29 avril et 27 mai, de 14h à 17h. Il est également possible d'acheter sa monographie, parue chez Actes Sud en mai 2020, à la boutique.