NÎMES Il offre des cartes cadeaux à 10 euros à ses victimes
Le tribunal correctionnel inflige 5 ans de prison à un papy escroc de 83 ans. Il part en détention.
Le papy escroc a fait couler beaucoup d’encre depuis quelques semaines à Nîmes... Il lui est reproché d’avoir ciblé cinq victimes, des personnes âgées, des dames seules et donc vulnérables. Avec ses vêtements aux couleurs de La Poste, il se faisait passer pour un facteur et parvenait par un tour de passe-passe à détourner l’attention de ses victimes afin de subtiliser leurs cartes bancaires. Il demandait à « ses proies » qu’elles mettent dans une enveloppe les cartes bancaires avant de les voler et de les échanger par une autre enveloppe dans laquelle il plaçait une carte cadeau Auchan de 10 euros.
Mais comment ciblait-il ses victimes ?, se demande le tribunal correctionnel présidé par Jean-Michel Pérez. Mystère. Cette interrogation n’a pas pu être dissipée à l’audience. L’octogénaire « escroc de métier », selon la procureure Sophie Catasso, qui réclame 8 ans de prison, a reconnu les agissements et escroqueries il y a quelques semaines à Nîmes sur cinq dames âgées de 87 ans à 92 ans.
Focalisé sur l'héritage de ses parents
« Je suis sorti (de détention, NDLR), j’avais l’héritage de ma maman, j’avais l’assurance de mes parents 100 000 euros au total », affirme à la barre le prévenu sorti de prison en 2017 après une lourde condamnation par la cour d’appel d’Aix-en-Provence pour des abus de faiblesse sur des personnes vulnérables. « J’avais besoin d’argent, je me suis retrouvé avec 700 euros de retraite et 770 euros de loyer », poursuit l’octogénaire qui arrive à la barre fragilisé par une jambe douloureuse et un bras en écharpe.
Les faits sont dénoncés à Nîmes, le 24 octobre dernier, par une dame de 92 ans qui rentre de ses courses aux Halles. Elle est abordée par un homme qui se fait passer pour un agent de La Poste. La victime va se faire voler sa carte et son code confidentiel : 300 euros lui seront détournés. « Il paraissait plus jeune, je ne pensais pas qu’il avait cet âge-là. Il avait les cheveux plus longs », souligne une autre retraitée, qui avance avec un déambulateur. « Vous inspiriez la confiance », note le président Pérez. Tellement confiance qu'une femme en le croisant dans sa tenue de facteur dans la rue lui demandera de mettre sa lettre à la Poste ! Mauvaise idée... À l’intérieur du courrier : un chèque pour payer ses plateaux repas... Elle aura au final des pénalités à cause du chèque détourné par le papy escroc.
13 mentions sur le casier judiciaire
Un prévenu au casier judiciaire qui débute en 1969 à Rouen, avant d’être condamné à Paris en 1970 pour vol, et à partir de 1974 pour une série illimitée d’escroqueries. « On a le sentiment que la détention, la prison n’a aucune incidence sur vous, ajoute le magistrat. Avez-vous travaillé dans votre vie, monsieur ? » Le papy répond : « Oui entre deux, j’ai travaillé dans le transport de chevaux et sur les chantiers de Normandie », affirme-t-il. « Et quel gage pouvez-vous donner au tribunal ? », poursuit le président. « Que l’on me donne mon héritage, l’héritage de mes parents », complète cet homme totalement "hanté" par ses soucis d’héritage.
« C’est une personne organisée. Il a un discours rodé. Il arrive à subtiliser l’enveloppe et la carte bancaire sans que les victimes ne s’en aperçoivent. Il avait deux clés de La Poste qui permettent d’avoir accès aux boîtes aux lettres », souligne l’avocat de La Poste, Maître Julien Volle. « Les faits sont reconnus. Monsieur a ciblé ses victimes, des femmes âgées vulnérables qui ont toutes des comptes à La Poste. Il est en récidive légale, il encourt une peine de 14 ans, je demande à son encontre 8 ans avec maintien en détention", estime la procureure Sophie Catasso.
« Il sait qu’il est filmé en se rendant au guichet. Il sait qu’il y a des caméras de vidéosurveillance. Il me fait penser à un cleptomane qui vole sans réfléchir", plaide l’avocate de la défense, Maître Camille Alliez. "Pour lui c’est un jeu, je me déguise et je me prends au jeu. Il avait une sorte d’adrénaline. Je me pose la question d’une expertise psychiatrique. L’enjeu aujourd'hui est la peine que vous allez prononcer. Son état de santé est dégradé depuis un mois de détention provisoire. Il faut que la peine soit adaptée à l’état de santé du prévenu. S’il part en détention, dans quelques semaines il sera décédé », ajoute maître Alliez. Les réquisitions ont été diminuées : le prévenu de 83 ans écope de 5 ans de prison et d’un maintien en détention.