FAIT DU SOIR Green4Cloud, un circuit court pour les données numériques
Incubée à l'IMT Mines Alès depuis octobre 2022, Green4Cloud propose une alternative radicale aux services de cloud traditionnels avec un cloud local, écoresponsable, économe en énergie et doté d'une sécurité renforcée. Une start-up fondée par trois amis de longues dates.
"Si l’écosystème numérique était un pays, il représenterait environ 2 à 3 fois l’empreinte environnementale de la France", indique un rapport de l'association The Shift Project. Ce n'est plus niable. La révolution numérique a drastiquement transformé les modes de vie et de travail, des uns et des autres. Si cette avancée fulgurante offre des bénéfices indéniables - comme celui de rédiger un article sur le web -, elle entraîne avec elle un impact environnemental considérable, souvent négligé : la pollution numérique. Un enjeu souvent passé sous silence. Mais depuis les années 2020, et notamment depuis la pandémie, de nombreuses personnes ont pris conscience que l'utilisation d'Internet, le stockage des données, mais aussi l'utilisation des appareils électroniques ont un coût écologique non négligeable.
La fabrication et le recyclage de ces appareils, la consommation énergétique des centres de données et des réseaux de communication, ainsi que l'empreinte carbone liée aux services en ligne sont autant de facteurs contribuant à cette pollution numérique. Diverses initiatives visent désormais à réduire l'impact environnemental du numérique. Parmi elles, celle de Julien, Nicolas et Sébastien, amis de longue date, qui ont fondé Green4Cloud, une start-up incubée à l'IMT Mines Alès, dédiée à cette cause.
Derrière le projet, une amitié de plus de vingt ans
À l'origine, ils sont trois. Julien Delcroix, titulaire d'un diplôme en Génie des télécommunications et réseaux et d'une formation en commerce, a occupé des postes clés chez Vinci et Engie, spécialisés dans les télécommunications et l'informatique. Nicolas Leseignoux, expert en sécurité des réseaux, a travaillé chez Airbus et à l'université de Bordeaux, gérant d'importantes infrastructures. Sébastien Lannes, formé en ingénierie informatique à Supinfo, a contribué aux missions humanitaires de Télécoms Sans Frontières, offrant des communications d'urgence dans les zones sinistrées.
Trois itinéraires distincts, mais entrelacés depuis leurs années d'études, unissent finalement ces individus originaires de Mont-de-Marsan (Landes). Leur parcours professionnel les a menés à explorer, se spécialiser et approfondir leurs compétences respectives dans divers domaines, avant de se réunir à nouveau pour les mettre à profit. "Nous avons réalisé qu'il était peut-être temps de donner un sens à nos actions et nous nous sommes demandé, avec nos complémentarités et nos spécialités, ce que nous pourrions entreprendre." C'est ainsi qu'ils ont eu l'idée de fournir des services de cloud, en accordant une attention particulière à l'aspect éco-responsable, ce qui constituait leur contrainte principale. Et pour cause. Comment concevoir un cloud, différent de ce qui peut exister sur le marché, afin de réduire l'empreinte environnementale du numérique ?
Messagerie, sauvegarde, stockage, hébergement web... le cloud de proximité, mais en vert
Pour les moins familiers, le cloud désigne l'utilisation de serveurs informatiques distants, logés dans des centres de données connectés à Internet. Une pratique qui permet de stocker, gérer et traiter des données, en lieu et place d'un serveur local ou d'un ordinateur personnel. Au quotidien, le cloud se manifeste à travers une multitude de services et d'applications familières. YouTube, Uber, Netflix, Waze, Gmail, WhatsApp, TikTok, parmi tant d'autres, ainsi que les plateformes de jeux en ligne et de partage de données : les photos et les vidéos. Ce "nuage" inclut également la sauvegarde des données stockées sur les téléphones portables et les tablettes.
"Ce n'est pas nous forcément qui portons la charge de ce qu'il se passe aujourd'hui, mais nous sommes la génération qui peut changer, faire évoluer ce qui a été fait."
Julien Delcroix, co-fondateur Green4Cloud
Avec l'ambition de contrer ces modèles traditionnels de cloud, qui reposent sur quelques gros centres de données, également appelés hyperscalers, comprenant des dizaines de milliers de serveurs, la start-up créée en décembre 2022 par les trois amis, adopte une approche nouvelle. Leur stratégie consiste à déployer un maillage complet du territoire avec de nombreux micro-centres de données (micro data center), de taille bien plus réduite. L'objectif est d'avoir des centres de données en France "à moins d'une heure de toute organisation du pays." Tout comme les circuits courts en agriculture, Green4Cloud propose une approche similaire mais appliquée au stockage de données.
"Ce qui est avantageux avec ces micro-centres de données est que nous pouvons les alimenter en énergie solaire pendant la journée grâce au photovoltaïque, alors que pour les centres très grands, il faut des surfaces considérables pour fournir toute l'électricité nécessaire, explique Julien Delcroix. Avec les petits centres, l'autoconsommation est plus facile à mettre en place. Chaque micro centre de données peut héberger jusqu'à 400 clients." À titre de comparaison, Green4Cloud utilise seulement la moitié d'une baie informatique en termes d'espace. Alors qu'un centre de données départemental classique peut occuper entre 150 et 300 mètres carrés, selon l'un des fondateurs de la société incubée à l'IMT Mines Alès. Leur infrastructure ne nécessite que 10 mètres carrés.
Actuellement, seuls deux de ces centres sont opérationnels en France, à Vézenobres (ESI), et à Saint-Aunès, dans l'Hérault (avec HDC34). Green4Cloud envisage d'en créer entre 300 et 400 d'ici à terme. Le projet a été lancée en décembre 2022 et est incubé à l'IMT Mines Alès, une véritable fierté pour ses fondateurs. "L'IMT Mines Alès a une très belle image de marque, de très bonnes compétences en interne. Puis ça nous donnait aussi accès au laboratoire de recherche de son école."
Au-delà des aspects environnementaux et de sécurité, les fondateurs attachent une grande importance au pilier social de leur projet. Ils souhaitent conserver une dimension humaine dans leur démarche, en mettant l'accent sur la sobriété numérique certes, mais aussi, le bien-être des employés et un sens du service informatique global. Leur vision est d'instaurer un "cloud partout" pour favoriser la proximité entre les données et les individus, tout en soutenant les acteurs locaux avec lesquels ils collaborent. Dans le Gard, Green4Cloud commercialise directement ses services auprès des PME, TPE, start-up et collectivités notamment, tout en développant un réseau de distributeurs locaux, tels que des entreprises informatiques et des agences de communication.
INFORMATION
Récemment, Georges Hadziioannou, directeur de recherche et professeur émérite à l'université de Bordeaux, a rejoint l'équipe Green4Cloud en tant que co-fondateur. Un plus pour l'équipe. Il apporte son expertise pour orchestrer la recherche et le développement (R&D) au sein de l'entreprise.
TARIFS
Pour 2,50 € HT par mois, une adresse e-mail et 10 Go de stockage avec sauvegarde incluse sont accessibles. Les tarifs varient selon le volume, se situant entre 0,10 € HT et 0,15 € HT par mois pour chaque Go sauvegardé et dupliqué entre deux centres de données interconnectés. Concernant la vCpu, les prix vont de 6 € HT à 8 € HT par mois, tandis que la RAM est disponible à 2 € HT par mois pour chaque Go.