FAIT DU JOUR La zone industrielle de l’Ardoise est-elle menacée ?
« Ce qu’il va se passer ? C’est simple, les entreprises vont partir. » Le président de l’association Port l’Ardoise, Thierry Vézinet, n’y va pas par quatre chemins au moment d’évoquer les conséquences du plan de prévention du risque inondation de la commune de Laudun-l’Ardoise pour la zone industrielle de l’Ardoise, la plus importante de l’Agglomération du Gard rhodanien.
Un texte approuvé le 22 juillet dernier par les services de l’État mais qui ne convient pas, en l’état, à la commune ni aux entreprises de la zone industrielle, membres de l’association Port l’Ardoise. Car le zonage retenu classe en "aléa fort", comprendre en zone à fort risque, la plupart de la zone industrielle, et que ce classement s’accompagne de contraintes impactantes. « Sur la superficie de la zone, c’est très significatif », pose Thierry Vézinet.
En clair, en zone aléa fort, les nouvelles constructions seront interdites, sauf rares exceptions. Et les extensions éventuelles de bâtiments existants limitées à pas plus de 20 % de l’emprise au sol, entre autres contraintes. Ce qui est mal compris par les chefs d’entreprises sur place. « Pourquoi nous mettre autant de contraintes sur une zone industrielle, alors qu’on n’a pas de risque humain qu'on peut évacuer rapidement et sans aucun souci si une crue est annoncée ? », pose le président de Port l’Ardoise. La réponse est sans doute plus à chercher du côté du risque économique, donc.
Aujourd’hui, le monde économique local redoute de voir certaines entreprises quitter la zone, contrariées dans leurs projets futurs d’extension, mais pas seulement. « L’impact sera aussi que les entreprises sur place ne seront plus assurées, il y a déjà des compagnies qui ne nous assurent plus », souffle le président de l’association. Sans compter que de nombreuses entreprises de la zone travaillent pour le nucléaire, proximité avec les sites de Marcoule et de Tricastin oblige. Avec ce classement en zone aléa fort, « il y a un risque de perdre l’agrément confidentiel défense, ce qui nous ferait perdre beaucoup de contrats, il y a plein d’entreprises dans ce cas », souligne-t-il.
Alors face à cette situation, l’Agglomération du Gard rhodanien a décidé de lancer un recours contre le PPRI, avant de se retirer. Il concernait initialement aussi la commune de Codolet, qui a décidé d’arrêter les frais. La mairie de Laudun-l’Ardoise, qui a la zone industrielle dans son champ de compétences, a donc repris le flambeau et, après un recours gracieux infructueux, a initié un recours contentieux début janvier. « Et on ne le fait pas seuls. Nous avons Port l’Ardoise avec nous, et nous allons avoir aussi les engagements formels du conseil départemental et de la chambre de commerce et d'industrie », affirme le maire, Yves Cazorla.
« On ne peut pas rayer de la carte notre zone industrielle »
Pour autant, « le but n’est pas de faire péter le PPRI », assure Thierry Vézinet. « On n’est pas là pour dire que le PPRI ne sert à rien, mais il y a quelques incohérences que nous voulons rediscuter », reprend le maire. L’élu ne conteste pas que la zone peut s’inonder, ce que le passé, notamment en 2003, a démontré. « Mais nous avons des arguments qui pourraient permettre de faire en sorte de permettre le fonctionnement de la zone industrielle tout en conservant la sécurité des personnes et des biens », rajoute-t-il.
L’idée est donc de faire du damage control. « Si on peut libérer quelques terrains, ce sera toujours ça de gagné », glisse Thierry Vézinet. Reste que pour l’heure, ce n’est pas gagné. « Concernant la zone industrielle, nous avons déjà proposé plein de choses à l’État, mais elles ont été rejetées », regrette le maire. La Mairie s’est adjoint les services d’un hydraulicien spécialisé, « qui a relevé des points pas pris en compte dans le document de la préfecture », affirme le maire, qui souhaite désormais « se mettre autour d’une table pour en discuter » avec les services de l’État.
Car le maire partage le constat dressé par Port l’Ardoise. « Bien sûr que je suis inquiet », lance-t-il, alors que Thierry Vézinet pronostique que « dans les cinq prochaines années, une grande partie des entreprises de la zone partiront pour aller sur d’autres zones en dehors du Gard rhodanien », ce qui signerait, selon lui, « la mort de la zone, au moins en partie. »
Et au-delà de la zone industrielle, la mairie conteste également une partie du PPRI sur les habitations au pied du bourg de Laudun. Ici, le désaccord concerne la crue de référence retenue pour élaborer le document. « Pour nous, la crue de référence doit être 2002, mais pas pour les services de l’État, résume Yves Cazorla. Ils se basent sur une étude théorique alors que nous avons tout l’historique des crues de la Tave (un affluent de la Cèze qui coule au pied de Laudun, NDLR) sur 300 ans, et ça nous pénalise plus que ça ne le devrait. » Résultat, « certains habitants se retrouvent avec leur bien qui ne vaut plus rien », car classé en zone aléa fort.
À présent, la commune comme les entreprises espèrent être entendus, « pour converger vers une solution acceptable. On sait qu’on est dans le vrai, affirme le maire. On ne peut pas rayer de la carte notre zone industrielle. »
Contactés, les services de l’État n’ont pas souhaité s’exprimer sur le sujet, un recours contentieux étant en cours.