FAIT DU SOIR Un exercice national de sûreté nucléaire organisé bientôt à Codolet et Chusclan
Le mercredi 6 décembre, si vous êtes proche du site nucléaire de Marcoule, vous entendrez les sirènes et recevrez un message d’alerte sur votre téléphone : pas de panique, il s’agit d’un exercice.
Un exercice national de sûreté nucléaire, organisé tous les cinq ans, pour « tester le PPI (*), la bible qui détermine ce que nous devons faire dans chaque situation de crise, en situation réelle, pour voir si nous avons besoin d’ajustements », présentait le directeur de cabinet du préfet du Gard, Grégoire Pierre-Dessaux, jeudi soir à Marcoule lors d’une réunion de préparation. Pour ce faire, l’usine de fabrication de combustible nucléaire MOX, Orano Melox, va servir de théâtre à un scénario « écrit par l’IRSN (l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire, NDLR) et l’exploitant, scénario que nous, acteurs de l’exercice, ne connaissons pas », explique Julien Bachelet, adjoint au chef du service interministériel de défense et de protection civile à la préfecture du Gard.
Tout juste sait-on que, dans ce scénario fictif mais voulu plausible, Melox subira un problème suffisamment important pour déclencher le fameux PPI. Le scénario se jouera dans la zone dite "réflexe", de 2 750 mètres autour de l’usine, celle où la règle en cas d’incident est de « mettre à l’abri » la population, à savoir la confiner, et concernera donc les communes de Codolet et Chusclan pour le Gard, et de Caderousse pour le Vaucluse. L’occasion aussi de tester la coordination entre les différents services de l’État sur les deux rives du Rhône. Autre élément inconnu, la météo. « L’exercice se jouera en météo réelle, que nous ne pourrons donc pas connaître à l’avance », glisse Julien Bachelet. Précision importante quand on connaît l’impact de la météo sur d’éventuels rejets dans l’atmosphère.
Tout le monde jouera
L’occasion de tester tous les volets du PPI. « Lalerte et la protection de la population, l’anticipation de la suite des événements et l’organisation des secours, mais aussi la gestion de la communication de crise, puis la gestion post-accidentelle de la crise », développe Julien Bachelet. Les communes concernées vont elles aussi jouer, et mettre en œuvre leur plan communal de sauvegarde. Elles seront aussi un relais précieux de la préfecture de par leur connaissance du terrain et de leurs administrés, sachant que la gestion d’une crise de ce type « s’organise à l’échelon national », rappelle Julien Vieublé, de la division de Marseille de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN).
Quant aux exploitants, Orano et CEA en tête, ils feront jouer leurs PC de crise, « pour gérer une crise nucléaire selon le scénario », note Florent Novain, directeur protection, sûreté, santé, sécurité et environnement chez Orano, « le principal protagoniste » de l’exercice. Pas le seul, Michel Bedoucha, le directeur du CEA Marcoule, qui occupe la majeure partie du site nucléaire, rappelant « la multiplicité des exploitants sur le site, tous liés par des conventions ». De toute façon, en cas d’incident important, tous les exploitants du site de Marcoule sont concernés.
Et enfin, la population sera elle aussi amenée à participer. Outre le déclenchement des bien connues sirènes d’alerte et d’information à la population, même si l’exercice coïncidera avec le déclenchement du premier mercredi du mois, tous les téléphones accrochant les antennes relais les plus proches du site de Marcoule recevront un message d’alerte FR-Alert, un système testé pour la première fois lors d’un exercice à Marcoule puisqu’il a été déployé à l’échelle nationale en juin 2022. L’occasion de « rappeler les bons réflexes pour que les gens ne se mettent pas en danger », souligne Grégoire Pierre-Dessaux. L’Éducation nationale jouera aussi, avec le déclenchement du PPMES, le plan particulier de mise en sécurité, dans 19 établissements gardois.
Le deuxième jour verra un exercice différent, au scénario décorrélé de celui de la veille, sera tourné plus vers la gestion de l’articulation entre les deux départements et une simulation d’évacuation massive. Pas question toutefois d’évacuer pour de vrai. Il s’agira d’un exercice « sur table », précise Julien Bachelet. Du reste, tout au long de l’exercice, « il n’y aura pas de blocages de routes ni d’évacuation des entreprises et des écoles », souligne le directeur de cabinet du préfet. Pas de panique, donc.
* Le PPI, pour Plan particulier d’intervention, définit les moyens de secours mis en oeuvre par les pouvoirs publics à l’occasion d’un incident dépassant les limites géographiques d’un site. Il est particulier à une installation, d’où son nom. Il est rédigé par le préfet. Celui de Marcoule concerne une zone située dans un rayon de 10 km autour de l’installation, soit 25 communes dont 18 dans le Gard et 7 dans le Vaucluse, de Saint-Nazaire à Roquemaure, en passant par Bagnols pour le Gard. Trois zones sont définies à l’intérieur du PPI : la zone réflexe (2,75 kms autour du site), le rayon des 5 000 mètres, où les pouvoirs publics peuvent déclencher une évacuation de la population et le rayon des 10 000 mètres, où la population peut se voir demander de rester à l’abri ou d’évacuer. Toutefois, précise Julien Vieublé de l’ASN, « le PPI ne correspond pas au périmètre de danger, mais de celui où les autorités se préparent à une gestion de crise, le périmètre de danger peut dépasser. »