Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 29.03.2024 - Propos recueillis par Anthony Maurin - 8 min  - vu 589 fois

L'INTERVIEW Jean-Baptiste Jalabert : "Notre volonté est de toucher différentes sensibilités taurines"

Jean-Baptiste Jalabert (Photo Archives Anthony Maurin).

La feria de Pâques se déroule jusqu'au 1er avril 2024. Elle propose une course camarguaise, deux novilladas dont un mano a mano, une corrida de rejon et trois corridas dont une mixte. Le directeur des arènes, Jean-Baptiste Jalabert, revient sur ces choix. Interview.

Jean-Baptiste Jalabert (Photo Archives Anthony Maurin).

Objectif Gard : Les cartels sortis, comment s’est passé le montage de cette feria ?

Jean-Baptiste Jalabert : Il a fallu aller vite et faire différemment par rapport aux années précédentes simplement parce que le nouveau contrat signé avec la mairie (jusqu’en 2028, NDLR) l’a été en tout début d’année. Ça a retardé l’annonce des cartels que l’on avait l’habitude de faire en janvier, mais ça décale aussi les premières discussions qui ont normalement lieu dès l’automne. Tout s’est fait un peu plus tard, mais je suis content et satisfait de ces cartels et de cette feria.

La nouvelle délégation de service public a-t-elle demandé d’autres choses ?

Dans la programmation de la feria, il y a une novillada piquée supplémentaire qui aura lieu cette année le samedi matin. C’était une des nouvelles exigences de ce nouveau cahier des charges. Alors, nous la respectons dès cette première feria.

Les arènes d'Arles (Photo Archives Anthony Maurin).

Quid de la novillada sans picadors (NSP)…

Il y avait un accord avec l’école taurine par le passé. La NSP organisée à Pâques l’était par l’école taurine directement et nous organisions celle de septembre. Bien entendu, nous allons continuer à organiser celle de septembre, pour la feria du Riz, le dimanche 8 septembre prochain. Nous voulons favoriser les jeunes élèves de l’école taurine d’Arles et pour leur faciliter les échanges. Le cartel sera fait sur-mesure avec l’école taurine. Mais c’est un fait, l’exigence du cahier des charges ne donne plus la possibilité à l’école taurine d’organiser la NSP de la feria de Pâques, donc à Pâques il n’y aura pas de NSP.

Sur la place du Forum, le coeur battant de la feria d'Arles (photo d'illustration Norman Jardin)

Retour à la présentation des cartels. Elle a aussi changé de forme n’est-ce pas ?

En effet, des choses ont changé. On a annoncé les cartels au Mas de la Chassagne, c’était une volonté de délocaliser l’événement et de le faire dans des ganaderias ou des manades des alentours d’Arles. Bon, cette année c’était simple et, pris par le temps, on l’a fait à la maison. Mais pour les années à venir on le fera dans différents endroits.

Première course avec la novillada en mano a mano avec quatre novillos, c’est spécial !

En fait, la première course aura lieu la veille avec la course camarguaise. Il ne faut pas oublier la course d’ouverture du vendredi. Ce sera une course pour la tradition camarguaise, une course de haut niveau !

Jean-Baptiste Jalabert (Photo Archives Anthony Maurin).

Mea culpa…

(Rires) Monter cette novillada comme ça était une volonté. Nous voulons soutenir les éleveurs français et nous donnons de nouveau une opportunité à deux éleveurs qui ne sont pas venus aux arènes d’Arles. Il y aura competencia entre deux encastes Santa Coloma avec La Golosina et Turquay et deux autres Domecq avec Blohorn et Tardieu. Cela permet au public et aux aficionados de découvrir et de voir des élevages, mais aussi des encastes différents.

Nino Julian aux banderilles (Photo Anthony Maurin).

Quatre novillos pour deux novilleros ?

C’est ça ! Nino Jullian et Samuel Navalon. Nino Julian est un jeune nîmois qui a des qualités et qu’il faut soutenir. Arles lui donne l’opportunité de se présenter. Samuel Navalon est un peu comme une surprise. C’est un novillero en qui je vois de grandes qualités pour l’avenir, mais qui n’est pas tout à fait une surprise car il a déjà triomphé à Valdemorillo il y quelques jours.

En parlant d’avenir, continuons avec les jeunes. Marco Perez se présente lors d’un mano a mano qui promet monts et merveilles. Votre histoire est particulière avec ce jeune...

C’est sûr, ça va être un moment émouvant, important. Pour lui, bien entendu, pour moi également. Marco, je l’ai connu jeune (rire), enfin encore plus jeune, quasi bébé, il avait 9 ans et maintenant il en a 17. J’ai vu en lui des qualités incroyables, j’ai fait un pari, j’ai misé sur lui, je lui ai donné beaucoup de temps et d’énergie, j’ai eu la chance d’avoir la confiance de ses parents et de sa famille… J’ai accompagné Marco durant toutes ces années et ce que j’avais imaginé quand il avait 9 ans, tout est en train de se réaliser comme on l’a rêvé. Il a un potentiel incroyable et il le démontre chaque après-midi, il a une évolution toujours formidable, on n’y voit pas vraiment de plafond ! Mais on ne peut pas prédire l’avenir. En tout cas, il a tout pour faire quelque chose de grandiose dans la tauromachie mais nous allons continuer à aller doucement et à mesurer les pas qui se font en avant. C’est une superbe présentation pour lui, dans une arène de première catégorie, en France, ici à Arles.

Les arènes d'Arles (Photo Archives Anthony Maurin).

Et il sera donc en mano a mano avec un autre talent !

Exactement ! Un autre jeune très talentueux, Manuel Roman qui montre de superbes choses depuis l’an dernier et qui est un tout petit peu plus âgé que Marco parce qu’il a un an de plus, mais les deux ont des têtes d’enfants et le public comme les aficionados apprécient de voir ces jeunes. Pour moi, ça fait une novillada qui peut attirer beaucoup de monde et beaucoup de curiosité. Le public pourrait sortir vraiment satisfait d’avoir vu cette nouvelle génération qui peut marquer les esprits très rapidement.

Le mano a mano offre plus de visibilité pour chacun par rapport à une novillada formelle ?

Oui mais je voulais aussi créer une compétition entre ces deux jeunes qui sont de la même génération, ils vont se tirer la bourre tout au long de l’année et ça va commencer à Arles car c’est leur premier rendez-vous important, même s’ils seront à Olivenza quelques jours avant. Avec trois novillos chacun et trois élevages différents, ça ouvre les possibles. Deux novillos seront de chez Gallon, de grande garantie, pour la ganaderia française de et deux élevages de super catégorie avec deux novillos de Nuñez del Cuvillo et deux autres de Santiago Domecq.

Pablo Hermoso de Mendoza vient toujours voir son fils Guillermo triompher comme ici à Nîmes (Photo Archives Anthony Maurin).

Encore un événement matinal avec les adieux du roi des centaure, Pablo Hermoso de Mendoza !

Pablo n’est pas venu à Arles depuis… Pas loin de dix ans tout simplement parce qu’il n’était pas encore avec ses chevaux en Europe à ces dates. La dernière fois qu’il est venu, c’était pour une goyesque en corrida mixte. À Pâques, nous n’arrivions jamais à l’avoir parce qu’il continuait un peu plus sa temporada mexicaine. Cette année, il a décidé et il fait l’effort d’attaquer sa tournée d’adieu dès la première feria française et donc sa despedida aura lieu à Arles le lundi de Pâques en matinée en compagnie de son fils Guillermo et de Léa Vicens.

Une dynastie qui s’achève en se perpétuant !

C’est un beau cartel qui devrait attirer du monde. Pablo, à Arles, on l’a moins vu ces dernières années. Sa temporada de despedida en France va être limitée à quelques événements seulement. Il n’y en aura pas tant que ça donc pour l’instant. Un est sûr et annoncé déjà, c’est celui d’Arles, ce sera émouvant car il a marqué l’histoire de la tauromachie et des arènes d’Arles. Il a énormément fait évoluer la tauromachie à cheval.

Arles, la tour sarrasine sous un soleil couchant lors de la dernière corrida de la feria (Photo Anthony Maurin).

Sébastien Castella revient dans un cartel détonnant.

C’est la corrida d’ouverture, du samedi de Pâques, une journée importante, toujours. Sébastien a fait une superbe temporada l’an dernier où il fut triomphateur de Madrid et de Séville, de Mexico ou d’Arles même si pour son retour en France ça n’a pas été la corrida dont il avait rêvé… Il a été bien soutenu par le public et avait attiré une grosse affluence pour ce mano a mano avec Roca Rey. Castella sera avec l’autre triomphateur de l’an passé, Daniel Luque. Deux toreros en pleine maturité et que l’on sait capables de sortir le maximum de chaque toro qu’ils auront face à eux. On aura aussi la présentation aux arènes d’Arles de Juan Ortega, le torero artiste dont tout le monde parle. On aura donc des toreos différents, des toreros avec de la personnalité, c’est ce que l’on souhaiter proposer aux aficionados !

Sans polémiquer, Roca Rey et Luque…

Nous parlons de la feria de Pâques ! Elle est courte et il y a plein d’absences, notamment celles-là. Je n’ai pas encore annoncé celle du Riz, justement, pour voir évoluer la situation et pour garder la possibilité d’avoir la temporada la plus complète en privilégiant certains de ces absents. N’oublions pas qu’on a été pris par le temps et qu’on n’a pas fait comme nous faisions habituellement à savoir annoncer aussi les cartels de la feria du Riz. Continuer certaines négociations n’était pas simple, on verra. Je pense qu’on annoncera les cartels de la feria du Riz sans doute autour de Pâques.

Diego Ventura dans ce qu'il sait faire de plus beau en septembre 2020 à Arles (Photo Archives Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Corrida mixte avec Ventura à cheval et Manzanares et Talavante. Un triptyque de grands habitués des lieux ?

C’est un cartel de luxe, un cartel de figuras, un cartel de toreros qui parlent au public ! Tout le monde les connaît, ce sont des stars qui ont tous les trois fournis de formidables faenas à Arles. C’est une opportunité d’avoir Ventura pour Pâques donc dans cette même feria, en deux jours, on a les meilleurs rejoneadors de ces 30 dernières années, c’est pas quelque chose de facile ! On n’arrive pas à les réunir mais en moins de 24h vous pourrez les voir fouler le sable des arènes d’Arles. On pourra même faire une comparaison car je suis sûr qu’il y aura une réelle competencia à distance. Après, Manzanares et Talavante, on ne les présente plus, tant ils ont triomphé ici comme ailleurs, notamment l’an dernier pour la goyeque !

Un toro de La Quinta (Photo Anthony Maurin). • Anthony MAURIN

Corrida de clôture de La Quinta pour trois toreros qui cherchent encore leur voie ?

Avec cet élevage différent d’encaste Santa Coloma, qui a beaucoup de personnalité et qui attire et intéresse les aficionados, j’ai voulu un cartel de jeunes toreros pas encore en position de figuras mais qui ont des qualités pour y arriver dans l’avenir. Deux Français avec Juan Leal l’Arlésien et Clemente le multirégional qui a montré de très belles choses l’année dernière devant les Victorino Martin ici-même. Gines Marin revient à Arles après s’y être présenté il y a quelques années. C’est un torero qui a encore triomphé à Séville en 2023 et qui offre des prestations importantes dans les grandes arènes donc il est également aux portes des figuras.

Clemente à gauche sur son second de Victorino (Photo Archives Anthony Maurin).
Clemente à gauche sur son second de Victorino (Photo Archives Anthony Maurin).

Une feria très éclectique, plus qu’habituellement, sans doute du fait de la précipitation pour monter ce cycle pascal ?

Dans la difficulté, souvent, on trouve des choses positives. La feria arrive très tôt cette année, dans un mois les toros seront au corral et pourront être découverts par les aficionados qui pourront aussi assister aux tientas de l’école taurine. Pour la feria, il y a des spectacles pour tous les goûts, toutes les sensibilités. La compétition entre les novilleros du samedi après-midi sera intéressante. Pour les amoureux du toreo à cheval, il y a cette possibilité de voir la corrida formelle du lundi matin, mais aussi la mixte du dimanche après-midi afin de voir les deux tauromachies ensemble. Pour ceux qui aiment voir des encastes et des origines différentes, il y aura la novillada du samedi matin mais aussi la corrida du lundi après-midi et, ensuite, les deux cartels avec des figuras qui sont le samedi après-midi et le dimanche ! Notre volonté à chaque fois est de toucher différentes sensibilités taurines et je crois, qu’au moins sur le papier, c’est déjà un pari réussi. Nous sommes impatients de recevoir les aficionados aux arènes et de procéder à l’ouverture de la temporada française !

Réservation au 08 91 70 03 70 ou sur arenes-arles.com

Propos recueillis par Anthony Maurin

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