Publié il y a 9 mois - Mise à jour le 12.02.2024 - Anthony Maurin - 7 min  - vu 1324 fois

FAIT DU JOUR Sophie Roulle : « Je veux une culture de qualité pour tous »

Sophie Roulle, adjointe à la culture à Nîmes (Photo Anthony Maurin).

Sophie Roulle, adjointe à la culture à Nîmes (Photo Anthony Maurin).

Adjointe à la Culture pour la ville de Nîmes, Sophie Roulle prend sa délégation à cœur. Création d’une triennale d’art contemporain et enjeux sociétaux sont ses sujets du moment. Interview.

Carré d'Art Nîmes 2023 (Photo Anthony Maurin)
Carré d'Art Nîmes (Photo Archives Anthony Maurin)

Objectif Gard : Que représente la culture à Nîmes pour vous ?

Sophie Roulle : C’est, actuellement, beaucoup de projets à mettre en œuvre ! Oui, nous avions, lors des élections municipales de 2020, un programme important pour la culture et il faut le mettre en œuvre.

Après votre délégation au commerce, vous êtes à la culture. Comment avez-vous trouvé l’état de la culture à Nîmes à votre arrivée en poste ?

Beaucoup de choses se passaient et des projets étaient déjà présents. Pendant trois mandats, monsieur Valade avait œuvré dans le sens d’une culture forte à Nîmes. Quand nous avons élaboré notre document de campagne et en discutant avec le maire, l’idée de créer une identité un peu plus nouvelle, propre à la ville et en complément à la romanité et des cultures taurines était une idée pertinente. Nîmes avait besoin d’une autre entité, la sienne, et on ne pouvait pas la sortir d’un chapeau !

C’est donc l’art contemporain ?

Oui, cette identité, nous l’avions déjà avec le Carré d’Art qui a 30 ans qui ne vieillit pas. Je rappelle aussi que nous avons une école des Beaux-Arts ! L’architecture a aussi une place forte à Nîmes car de nombreux projets avant-gardistes y sont intimement liés. Nîmes a un ADN qui lui permet d’inscrire son histoire et sa vie dans l’action contemporaine.

Sophie Roulle, adjointe à la culture à Nîmes (Photo Anthony Maurin).
Sophie Roulle, adjointe à la culture à Nîmes (Photo Anthony Maurin).

La Contemporaine de Nîmes sera donc le prochain festival phare de la ville ?

Cette manifestation était sur le programme de Jean-Paul Fournier, elle a pour vocation et objectif de créer le lien entre tous les piliers de la culture à Nîmes. Elle sera comme un fil directeur. Je veux aussi fédérer les Nîmois autour d’elle, c’est important car nous ne sommes ni à Arles, ni à Nantes, ni à Lille, nous sommes à Nîmes et nous voulons créer avec et pour les Nîmois de tous les quartiers de la ville.

La culture peut souvent être perçue comme élitiste. L’art contemporain encore plus…

Justement, la Contemporaine ne sera pas un événement de l’entre-soi de l’Écusson ! Nous voulons la déployer sur toute la ville. Le parti pris des deux directeurs artistiques que nous avons choisis est de concevoir une manifestation qui peut toucher les Nîmois de la maternelle au CCAS, du centre-ville aux quartiers périphériques par des prismes différents mais l’idée est celle-là.

Expo Jérémie Fischer à Carré d'Art (Photo Anthony Maurin).
Expo Jérémie Fischer à Carré d'Art (Photo Anthony Maurin).

Un exemple ?

La maternelle de la place du Chapitre va accueillir un binôme de deux artistes, un émergent et un qui est confirmé, pour cocréer et coconstruire l’œuvre qui sera exposée place du Chapitre. Ce lien va porter sur l’intergénérationnel, la transmission et le mentorat. C’est un fil rouge que les artistes vont tirer sur six lieux de l’espace public. Il y aura aussi six projets dans les musées dont un à la Chapelle des Jésuites (à côté du Muséum d’histoire naturelle). Cela a permis de fédérer aussi les conservateurs des musées, même si nous avions initié cela avec les 30 ans de Carré d’art.

D’ailleurs, les musées auront-ils un peu plus de visibilité au quotidien ?

Pour ce mandat nous voulons, chaque année, mettre à l’honneur un musée différent avec peut-être un peu plus de budget alloué à cela. J’aimerais un thème commun et fédérer les musées autour de ce thème. Après Carré d’Art, ça sera un autre musée mais nous savons déjà lequel. On commence même à réfléchir pour 2026.

Ces œuvres seront donc dans des musées, mais aussi sur des places ?

Dans l’espace public pour que le public puisse toujours aller à la rencontre des œuvres un peu par hasard, tomber dessus. Nous voulons, pour que cela marche, avoir une médiation en cohérence. Il faut que les gens puissent comprendre les propos des artistes et que ça leur donne envie d’aller dans les musées ! On a toujours cette volonté d’amener les gens dans les musées alors on les appâte.

Isabelle et Bernard de l'association des écrans britanniques, Sophie Roulle, adjointe à la Culture à la Ville et Claude Viallat, artiste nîmois (Photo Anthony Maurin).

Mais la culture n’est pas toujours très festive…

C’est aussi pour cela que nous avons opté pour d’autres choses. Nous savons que les Nîmois aiment bien faire la fête, alors on leur propose aussi trois temps fort et le spectacle vivant sera utilisé. Il y aura du théâtre de la danse, une kermesse à Pissevin et, par exemple, la grande boum pour 2 000 personnes dans les arènes avec une DJ délirante ! Tout cela sera gratuit et ouvert à tout le monde.

La gratuité, il faut se battre pour ça ?

Je me bats pour la culture pour tous. Je ne suis pas forcément pour la gratuité pour tout mais pour une accessibilité du plus grand nombre. C’est pour cela que les week-ends festifs et les œuvres dans l’espace public seront libres d’accès. Nous venons de voter un pass à dix euros (avec aussi des pass gratuits selon ressources ou votre condition, NDLR) qui offre une séance au Sémaphore en plus de l’entrée dans les musées ! Ce n’est vraiment pas cher car ça coûte de l’argent mais c’est un geste symbolique.

Au premier plan Sophie Roulle et le maire Jean-Paul Fournier (Photo Anthony Maurin).

La Contemporaine est une triennale mais vous n’en ferez qu’une d’ici la fin du mandat. Comment assurer son avenir ?

C’est vrai, c’est une première édition et les enjeux sont énormes, comme pour toutes les premières éditions, mais les deux directeurs artistiques sont nommés pour deux éditions donc ils s’occuperont aussi de la Contemporaine prévue en 2027, même si notre équipe n’est plus en poste. Une fois la première édition passée nous allons débriefer, voir ce qui a fonctionné ou pas, puis nous ajusterons. Nous ne voulons pas créer un événement hors-sol mais en lien avec les acteurs du territoire, en les associant de manière systématique ! En tout cas, tous ceux qui ont voulu être associé l’ont été.

Comment ce monde culturel a-t-il vécu ces créations ?

Bien ! Il y a une vraie émulation du milieu. Les acteurs sont très contents, ils attendent l’édition, ils sont forces de propositions. Nos deux directeurs artistiques sont jeunes mais ils ont déjà fait leurs preuves. Le thème qu’ils nous ont proposé nous a plus et tout le monde semble y adhérer.

Margot Arrault, Sophie Roulle, Xavier Douais et Marie-Laure Cruschi ont présenté la première édition de Nîmes s'illustre (photo Norman Jardin)

On parle de la triennale mais la culture se vit au quotidien.

Oui. L’exposition de Claude Viallat à Carré d’Art a remporté un vif succès, c’est une fierté pour les Nîmois. En parlant de Claude Viallat, nous avons reçu l’esquisse de Jean-Michel Wilmotte pour la fondation Viallat ! Ça va être très bien et ça ne sera pas un lieu figé mais un endroit vivant. Sinon, nous soutenons les associations au quotidien par des subventions ou des mises à disposition d’espace ou de matiériel. Mais tout au long de l’année nous avons aussi le théâtre de Nîmes pour lequel on se bat pour être classé en scène nationale.

La nouvelle directrice du théâtre, Amélie Casasole, est-elle à la hauteur des attentes ?

Elle est là depuis septembre dernier et elle a fait une programmation qui plaît énormément. Le festival flamenco a très bien marché aussi et maintenant elle se lance dans une recherche de mécénat pour essayer de compléter les 97 % d’aide de la mairie (3,2 millions d’euros, NDLR). Ça serait bien que le privé vienne aider mais nous attendons surtout les 500 000 euros de budget annuel pour le classement en scène nationale en plus de la reconnaissance qui va avec. J’ai d’ailleurs rendez-vous au Ministère avec elle pour plaider cette cause et faire avancer le dossier. On le mérite… Pour la Contemporaine, l’État nous donne 250 000 euros mais pour cela il faut parler, associer, discuter et faire comprendre que Nîmes mérite tout ça. Si ça n’aboutit pas, je ne lâcherais pas cette intention d’être scène nationale jusqu’à la fin du mandat !

Le théâtre de Nîmes, place de la Calade (Photo Archives Anthony Maurin).

Y a-t-il encore de la place pour la culture à Nîmes ?

Chaque mois, il y a des choses mais je ne suis pas sûre qu’il faille remplir le calendrier pour le remplir. Je veux assoir les bases et faire en sorte que ce que l’on propose aux Nîmois soit toujours très qualitatif et ouvert à tous. Il faut que tout le monde s’y retrouve ! On aide les initiatives qui nous semblent qualitatives comme par exemple le festival Nîmes s’illustre. Je pense aussi aux très belles Rencontres musicales aux Jardins de la Fontaine qui plaisent et qui attirent un public différent. Il y a aussi Une salle sous les étoiles, qui avait été initiée au quadrilatère des Jésuites et qui est maintenant très bien à l’Université… Notre rôle c’est de faire le tri et d’aider. Je veux une culture très qualitative mais ouverte au plus grand nombre. Le populaire ne doit pas être de mauvaise qualité !

Les lieux culturels sont-ils en nombre suffisants ?

C’est vrai qu’on manque peut-être de lieux. De lieux d’expositions surtout, nous n’en avons que trois. La problématique, c’est l’argent évidemment. Sur ce mandat ça m’étonnerait, mais le Palais des Congrès a aussi été pensé pour accueillir des expositions en vue d’un tourisme culturel en plus de celui d’affaires qui sera privilégié et prioritaire. Il en va de même avec l’auditorium de Carré d’Art qui est limité en places… Une fois le Palais des Congrès et ses centaines de places assises, ce sera un petit plus. Les Nîmois pourront et devront s’approprier ce Palais des Congrès !

Le Musée du Vieux Nîmes (Photo archive Anthony Maurin).

Quelque chose à rajouter ?

Le musée du Vieux Nîmes. Avec la conservatrice, le travail actuel est de redéfinir le projet scientifique et culturel. Nous orientons cette écriture vers la création d’un musée tu textile et du Denim. C’est en cours, l’État a validé cela à 100 %. J’espère que d’ici la fin du mandat nous aurons lancé la maîtrise d’œuvre pour le concours d’architectes pour la rénovation du musée, du bâtiment comme de la muséographie. Nous sommes cependant dépendants du déménagement du Conservatoire qui occupe une partie de ces locaux… Mais cela ne nous empêche pas de lancer les études pour que le projet soit sur les rails ! Il faudrait aussi s’occuper du Muséum d’histoire naturelle, il faut réfléchir sur tout l’ilôt mais il faut trouver quelques dizaines de millions d’euros…

Le futur Palais des Congrès  • Photo 3xn

Anthony Maurin

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