FAIT DU JOUR Dino Bertolo : le Crocodile du Tour de France 1978
L’ancien cycliste installé à Bouillargues, a participé au Tour de France 1978, malgré de nombreuses embuches rencontrées dans sa carrière. Dino Bertolo a aussi été le kiné de Nîmes Olympique pendant presque 20 ans et il est aujourd’hui écrivain. Rencontre avec un sportif qui a plus d’une corde à son arc alors que ce mardi, Nîmes accueille l'arrivée de la 16ème étape du Tour de France pour la 20ème fois de son histoire.
La carrière d’un sportif peut parfois se jouer à peu de choses, quelques détails et un peu de chance. Celle de Dino Bertolo (71 ans) a été marquée par une série d’actes manqués. Pourtant, le natif de Digoin (Saône-et-Loire) a toujours baigné dans le sport de haut niveau et le cyclisme en particulier. Son père, Mario, a participé à trois Tour de France (1956, 1957 et 1958) et il était l’équipier du grand Raphaël Geminiani (décédé le 5 juillet dernier). Enfant, le petit Dino passe dans les bras des légendes comme Louison Bobet et Jacques Anquetil. Mais la petite reine n’a pas encore les faveurs du jeune bourguignon qui préfère le ballon rond et cela lui réussit.
« On était rivaux mais amis avec Bernard Thévenet »
« J’étais un 8 ou un 10 et je me débrouillais bien ». Dino commence à se faire un nom dans le football charolais mais il change de braquet et à l’adolescence il se dirige vers le vélo. Les débuts sont très prometteurs avec des bons résultats au niveau local aux côtés de ses copains Bernard Thévenet et Michel Laurent qui feront des grandes carrières. « On était rivaux mais amis. Avec Bernard Thévenet c’était particulier, il est Charolais comme moi, mon père s’est occupé de lui à ses débuts. Dernièrement, j’ai terminé troisième des vétérans de la Cyclo « Bernard Thévenet ». J’y suis allé pour lui et ça m’a permis de le revoir », précise le Bouillarguais.
Au bataillon de Joinville avec Michel Platini
L’avenir du jeune Bertolo est prometteur mais il mène, en parallèle, des études pour devenir kinésithérapeute. Les deux sont difficilement compatibles et les examens le contraignent à décliner les convocations pour le Giro amateur et le Tour de Yougoslavie en 1975. Cela n’empêche pas, l’année suivante, la prestigieuse équipe Belge Flandria de lui proposer un contrat. C’est une offre qui ne se refuse pas. Pourtant : « le service militaire m’en a empêché et ça a gâché ma carrière. On a tout tenté avec le maire de ma commune et le député de mon département, mais rien n’y a fait. Du coup je suis allé au bataillon de Joinville avec Platini. J’ai perdu deux ans en amateur alors que j’aurais dû m’aguerrir avec les pros ».
Un contrat avec l'équipe Jobo-Spidel-La Roue d'or
Le temps perdu ne se rattrape pas mais les qualités du coureur sont toujours là et il participe au Tour du Maroc en 1976 avec l’équipe de France amateurs. En 1978, la roue tourne enfin dans le bon sens et il signe un contrat avec l’équipe française Jobo-Spidel-La Roue d’or. Et comme un bonheur n’arrive jamais seul, Dino est retenu pour le Tour de France. C’est sûr, cette fois la carrière du jeune homme est lancée, d’autant qu’il fait bonne impression sur la Grande Boucle : « Notre leader Mariano Martinez (NDLR le grand-père de Lenny Martinez) remporte une étape et le Grand Prix de la Montagne (NDLR meilleur grimpeur). Je partais dans l’espoir de finir le Tour. J’ai vu que j’avais le niveau. J’étais chargé de rester auprès du leader. Une de mes plus belle étapes est celle entre Figeac et Super-Besse où je termine 27e à 3’03 du vainqueur, le Belge Paul Wellens ».
La promesse non tenue de Raphaël Geminiani
Avec son numéro 102, Dino se régale dans la montée du Puy-de-Dôme. Il se classe 72e du général et trois fois dans les 30 premiers dans des étapes de montagne. Une belle année et puis les ennuis sont de retour. L’équipe de Bertolo cesse son activité. Il faut rebondir rapidement et une solution se présente avec la formation Fiat dirigée par Raphaël Geminiani, le vieux copain de Mario, le père de Dino. Un accord verbal qui tarde à se concrétiser pour finalement tomber à l’eau : « La promesse n’est pas tenue et il fait signer Jacques Stablinski, le fils de Jean (NDLR Champion du monde sur route en 1962), qui n’a pas fait carrière », se désole Dino.
Dans la roue d'Eddy Merckx pendant 20 kilomètres
La famille Bertolo se tourne alors vers l’équipe La Redoute-Motobécane qui a déjà récupéré Mariano Martinez. Mais le timing est mauvais et l’effectif est déjà bouclé. « À trop attendre Fiat, j’avais perdu la Redoute ». Entre les mauvaises nouvelles, Dino reste dans la course avec quelques jolis moments : « En 1978, j’ai été le soigneur personnel de Bernard Hinault lors des Six jours de Rotterdam. Je l’aime bien car il est entier. ». Puis il y a son meilleur souvenir sur un vélo : « Au Grand prix d’Aix-en-Provence, il y avait Eddy Merckx. Je l’ai cherché partout dans le peloton. Puis quand je l’ai trouvé, je me suis calé pendant 20 bornes dans sa roue. Je suis encore ému en parlant. J’étais comme un gamin émerveillé devant le champion. Il dégageait de la force et de la prestance ».
« J’aurais fait un bon équipier et pourquoi pas sur une course d’un jour… »
Au début des années 1980, Dino doit se résigner à faire une croix sur sa carrière de cycliste professionnel. « J’aurais fait un bon équipier et pourquoi pas sur une course d’un jour… ». Mais Il n’en a pas fini avec le sport et en 1986, il entre à Nîmes Olympique en tant que kiné jusqu’en 2002. Un retour à la case football dans laquelle il s’épanouit. « Les premières années, j’étais au centre de formation avec Patrick Champ. Ensuite chez les pros, j’ai bien accroché avec Nygaard, Sérafin, Boissier, Bellus, Zanon, Poortvliet, des mecs bien. Mais aussi Michel Mézy, le meilleur entraîneur que j'ai vu à Nîmes. Jean Bousquet aurait dû le conserver ».
« Desrousseaux et Anigo m'ont ramené un peu pompette »
La complicité avec les Cocodiles amène Dino à des situations parfois cocasses, comme en novembre 1987 : « Un soir de victoire à Ajaccio, Desrousseaux et Anigo m’ont embarqué en boîte de nuit et ils m’ont ramené un peu pompette. Je ne sais pas ce qu'ils avaient mis dans mon verre. Ils m’ont porté jusqu'à l’hôtel. Je n’avais pas l’habitude de boire. Tout le monde s’est marré, mais je me suis dis que les joueurs m’appréciaient puisqu’ils me mêlaient à eux de cette façon. On était copains ». Mais les meilleures choses ont une fin, et en 2002 Dino quitte le NO : « J’avais Nîmes Olympique, mon cabinet et je travaillais aux Franciscaines. Je suivais aussi mon fils ainé qui commençait la compétition de cyclisme. Mais Je n’avais plus de vie ».
« Marius Zampa est mon petit petit cousin »
Les Crocodiles sont alors loin des yeux, mais pas loin du cœur du Bouillarguais : « Cela fait quelques mois que je n’y vais plus, car la situation actuelle m’a mis un coup au moral mais je pense que l'arrivée d'Adil Hermach est une bonne chose ». Cela ne l’empêche pas de suivre quotidiennement l’actualité du NO qui s'est involontairement rapproché de lui en 2022. « Marius Zampa (NDLR cinq matchs avec les professionnels qui est aujourd’hui à Gueugnon) est mon petit petit cousin et je me suis un peu occupé de lui ». Une fois l’heure de la retraite arrivée, Dino continue à pédaler deux à trois fois par semaine et jamais moins de deux heures et demie.
Un roman en 2021 et un recueil de poèmes en 2024
Il en a profité pour sillonner les routes du monde avec son épouse. Mais Marie-Pierre est décédée l’année dernière des suites d’une longue maladie. Pour lutter contre le chagrin et exprimer ses sentiments, Dino s’est plongé dans l’écriture. Il publie un premier roman en 2021 « Le souffle du destin » et ces dernières semaines, c’est un recueil de poèmes qui est paru intitulé « Rêveries », dans lequel Nîmes Olympique est présent. « Il y a des moments où ça vient très bien et d'autres un peu moins. Ça me fait du bien et cela permet de libérer des choses », explique l’auteur qui travaille sur un second roman.
Une fois que le Tour de France sera passé dans le Gard, Dino prendra la route en direction de la Grèce pour voyager comme il le faisait avec Marie-Pierre. Dans son camping-car il y aura des souvenirs et un vélo. Juste pour balader et peut-être aussi pour se rappeler les belles choses de la vie. Nul doute que la Grande Boucle 1978 sera présente dans les pensées du poète.