L'INTERVIEW Mouss Guiza (AS Rousson) : "Je pense qu'ils vont faire quelque chose de grand !"
Mustapha Guiza, plus communément appelé "Mouss", est un sacré personnage du football amateur local. Avec son franc-parler habituel qui en amuse beaucoup et en dérange certains, ce directeur sportif passionné de l'AS Rousson revient sur la saison galère que vient de traverser l'équipe première en R2, les bons résultats des catégories de jeunes, sa relation avec Julien Ritas, tout en se montrant admiratif de la démarche de fusion actée par deux présidents de clubs beaucairois. Interview.
Objectif Gard : Après la relégation de R1 à R2, peut-on parler de la saison qui vient de s'écouler comme une saison de transition pour l'équipe première ?
Mouss Guiza : J'avais hâte qu'elle se termine ! Je savais qu'on partait pour une saison galère. Après la relégation, on n'a pas pu faire de recrutement ni de préparation. On a encaissé 14 départs. Il fallait se reconstruire. On a obtenu le maintien assez tard alors qu'on avait largement la place de le faire avant. On avait d'énormes difficultés pour marquer des buts. On a fait jouer cinq jeunes qui avaient gagné la Coupe Gard-Lozère quelques mois plus tôt avec les U17. C'est le côté réjouissant.
Bien réputées localement, les catégories de jeunes ont quant à elle brillé à nouveau...
Ce n'est pas le fruit du hasard. Mon fils Mehdi et Ziober Zerguine ont fait un travail énorme. Les éducateurs du club, tous bénévoles, ont été à la hauteur. Chaque année ils font face à la difficulté de reconstruire un groupe. Car tous les parents ont dans la tête l'ambition de faire signer leur enfant à Alès ou à Nîmes. C'est tout à notre honneur de pouvoir repartir chaque année avec des équipes compétitives. Les U13 ont joué en Inter-ligues. La grosse satisfaction c'est les U15. Ils ont fait un sans faute en championnat pour accéder au niveau Ligue, une première pour le club depuis plus de 30 ans ! Et puis les U17 ont fait un joli parcours en championnat tout en gagnant la Coupe Gard-Lozère.
Par la force des choses, l'effectif R2 de la saison 2022/2023 était très jeune. Le début du mercato avec les recrutements d'Aloïs Chabassut et Aïssam Fadil (ex-Aigues-Mortes, N3) notamment donne l'impression que vous voulez encadrer cette jeunesse talentueuse avec des joueurs expérimentés. C'est le cas ?
On a sept ou huit jeunes issus du club qui vont intégrer l'équipe première. Il nous manquait cinq ou six joueurs d'expérience pour les encadrer. Aloïs et Aïssam ont ce profil là puisqu'ils ont toujours joué en N3. On travaille sereinement, on a le temps, on ne se précipite pas. Ce qui est bien, c'est que Rousson reste attractif.
Le club de l'AS Rousson n'est-il pas en train de se créer une belle réputation ?
C'est vrai qu'on travaille pour changer notre image. Par le passé on a pris beaucoup de cartons pour des contestations bêtes. Dernièrement, on a des retours des arbitres qui s'aperçoivent qu'on est en train de changer en bien. Dans tous les clubs, l'équipe première est la vitrine. Il faut qu'elle soit exemplaire !
On a le sentiment que Julien Ritas, le coach, incarne à merveille ce côté "exemplaire"...
Julien, ça fait très longtemps que je le connais. Je l'ai découvert cette année en tant qu'entraîneur. J'ai été très agréablement surpris par son investissement pour le club. Il est allé voir jouer toutes les équipes de jeunes, chose que ne faisait pas les entraîneurs précédents. Il est vraiment impliqué et c'est apprécié par tous. En termes d'image, il a fait un énorme boulot. Les gens qui connaissent Julien savent qu'humainement c'est quelqu'un de formidable.
Quel est l'objectif que vous fixez à l'équipe première cette saison ? La montée ?
Je pourrai plus facilement y répondre à la fin du mercato. Mais c'est vachement aléatoire. Tu peux recruter 8 joueurs qui ont joué au haut niveau, si la mayonnaise ne prend pas tu n'arrives à rien. L'année où on monte de R2 à R1 en finissant champion, on avait perdu 13 joueurs. Le 15 juin, on n'avait que 5 joueurs ! André Basile, et je le salue, n'avait pas quitté le navire. D'ailleurs, je trouve qu'ils ont beaucoup de similitudes avec Julien Ritas. Cette année, en R2 il va y avoir une sacrée poule ! Il va y avoir Alès, Chemin-Bas, Sète et Castelnau-le-Crès qui sont descendus, donc on part un peu dans l'inconnu.
"À la dernière réunion, j'ai décidé de ne pas donner suite"
Mouss Guiza
Dernièrement, le Stade beaucairois 30 et l'Espoir football club beaucairois ont fusionné pour ne faire qu'un sous l'égide du Stade beaucairois football club (SBFC). Que pensez-vous de la démarche ? Faudrait-il l'appliquer ailleurs, notamment ici en Cévennes ?
Déjà quand je vois le montant des subventions qu'ils vont percevoir de la mairie, ça fait saliver ! Je dis bravo au maire, Julien Sanchez. Je n'ai pas les idées du RN, mais j'ai bien aimé son discours sur le sport. Les deux présidents Xavier Mouret et Johnny Ecker sont deux garçons que je connais bien. Ils sont très intelligents. Je pense qu'ils vont faire quelque chose de grand. C'est très bien ce qu'ils font. Ils ont leurs connaissances tous les deux. Xavier a fait un travail formidable avec la N3, Johnny pareil avec les jeunes. Avec le Nîmes Olympique qui est en grosse difficulté, je pense qu'ils vont saisir l'opportunité. La fusion, moi j'ai essayé de le faire avec Salindres l'an dernier. On avait trouvé un accord avec deux anciens du club, des vrais salindrois. On a fait plusieurs réunions. À la dernière réunion, j'ai décidé de ne pas donner suite. Il y a des personnes qui ne connaissent rien au football et qui ne sont plus au club aujourd'hui qui ont exprimé des réticences. Moi quand il y a des réticences je n'insiste pas. J'ai dit stop. À mon grand regret, parce que j'aurais bien aimé essayer de faire quelque chose.
Qu'est-ce qui avait motivé cette tentative de fusion ?
Aujourd'hui, on a 350 licenciés. On veut essayer de préserver notre terrain pelousé qui a subi énormément de dégâts. Toutes les catégories s'entraînent à peu près à la même heure, donc on se retrouve coincés. On se retrouve à refuser des gamins. Ça me fait mal au cœur. L'an dernier, on en a refusé 54 ! On est obligé de limiter. Après, tant que je serai à la tête de ce club, je ferai tout pour intégrer des gamins des quartiers et des villages alentours. J'ai des enfants des Près-Saint-Jean, de Rochebelle, des Cévennes, de La Grand'Combe, d'Uzès. Cette saison, il y a un papa d'un joueur qui était réticent. Il était toujours resté dans son quartier parce qu'il avait peur d'échanger avec les autres. Son fils était capitaine en U15. Il a fini champion et a gagné la Coupe Gard-Lozère avec les U17. En fin de saison, il a payé un couscous pour 30 personnes en me disant "merci, j'ai découvert des cultures différentes". Ça c'est ma fierté, c'est ça qui me fait rester.
Le coup de gueule de Mouss Guiza
À Rousson comme partout ailleurs, certains parents sont persuadés d'avoir donné vie au nouveau Leo Messi, ce qui génère parfois des tensions sur le bord des terrains et au-delà : "La grosse difficulté dans le foot amateur, c'est la gestion des parents. À la limite, les joueurs ça se gère très facilement. C'est un phénomène qui n'est pas propre à Rousson, mais qui s'aggrave. On ne fait rien et à un moment donné il faudra trouver des solutions. Car c'est inquiétant ! Ça se passe maintenant dans les plus petites catégories. Les entraîneurs reçoivent des coups de fil de parents mécontents toute la semaine après les entraînements. C'est pour ça que j'insiste auprès des éducateurs en leur disant de ne pas recruter les joueurs qu'en fonction de leurs qualités. Je leur demande de regarder aussi l'environnement autour du joueur. On en arrive là, c'est triste."