CHAMBORIGAUD La galère des familles coupées du monde par la crue du Luech
Les Cévennes payent à nouveau un lourd tribut à la suite de l’épisode cévenol de ce dimanche 3 octobre. Du côté de Chamborigaud, la crue du Luech a détruit deux ponts et laissé plusieurs familles isolées dans leur hameau pour une durée… indéterminée.
Quitter leur maison ? Il n’en est pas question ! Martine Pascal, conseillère municipale, habite le hameau des Baumes à Chamborigaud. Elle fait partie de ces familles qui, depuis dimanche après-midi, se retrouvent coupées du monde après l’effondrement d’un pont qui leur permet de rejoindre le village. « On l’appelle le pont noyé, à Pont-de-Rastel », précise le maire, Émile Corbier, complètement catastrophé par la situation. Ce pont noyé - qui porte bien son nom - est bel et bien parti sous les eaux quand le Luech a pris des proportions inimaginables pour les Cévenols du coin qui n’avaient plus connu de dégâts d’une telle ampleur depuis 1958.
Une heure pour rejoindre le village
« Sur huit résidents permanents, nous sommes aujourd’hui cinq à vouloir rester chez nous, dont un monsieur de 79 ans qui est malade. Nous attendons qu’une piste soit accessible », indique Martine Pascal. « On va leur en aménager une, mais il faudra une heure pour venir au village et elle ne sera praticable qu’avec un véhicule tout terrain », explique Émile Corbier. Une heure au lieu des cinq minutes habituelles.
Une solution loin d’être idéale pour les habitants concernés qui ont une autre idée en tête, comme l’explique Martine Pascal : « J’envisage de faire une pétition pour que l’on aménage une piste de 200 mètres qui longe la rivière et rejoigne un autre pont praticable. C’est le bon sens, la cohérence. Elle traverserait des terrains privés, mais je ne vois pas pourquoi les propriétaires s’y opposeraient, ça ne gêne personne. Avec la volonté, c’est possible ! »
La volonté. Elle n’habite pas tout le monde de la même manière à en croire les différents discours. Le président d’Alès Agglomération, Christophe Rivenq, qui a passé sa journée dans les Cévennes, hier, était l’un des premiers à le déplorer : « Nous vivons dans un pays où il y a des endroits qui comptent et d’autres qui comptent moins. Dès que l’on passe Alès, La Grand’Combe, les gens n’existent plus. Pourtant, un habitant du Chambon, Pont de Rastel ou Génolhac compte autant qu’à Nîmes ou ailleurs ! »
« Dès que l’on passe Alès, les gens n’existent plus »
Sans doute une allusion à la venue tardive du sous-préfet de l’arrondissement d’Alès, Jean Rampon, qui a fini par se déplacer sur les lieux lundi après-midi. « Il était pressé et n’avait pas beaucoup de temps à nous accorder », regrette le maire de Chamborigaud, préférant l’attitude de Christophe Rivenq « qui était là dès le matin et est resté tout le temps avec nous. »
Un peu plus en amont, un autre pont qui dessert le hameau de Sentinel, a été emporté par les eaux en furie. L’eau et l’électricité n’étaient toujours pas rétablies ce mardi matin et une personne n’a pas souhaité être évacuée. « Elle n’en voit pas l’utilité. Elle est restée dans son mas. Heureusement elle a une source », indique Martine Pascal. Ces habitants vont devoir faire preuve de patience car la reconstruction s’annonce très longue et coûteuse. « On nous dit 300 000 euros pour chaque pont. Nous, communes, ne pouvons pas payer ! », lance Émile Corbier, qui se dit « effrayé par l’impact que cela va avoir ». Contrairement au Luech, la vie n’est pas prête de reprendre son cours normal dans ces villages cévenols habituellement si paisibles...
Élodie Boschet