FAIT DU JOUR Interview : Eric Giraudier défend "sa" présidence
Après une folle semaine à la CCI Gard : guéguerre par médias interposés, nomination d'un nouveau président, menace de recours en annulation (...), Eric Giraudier, à la tête de la Chambre consulaire (temporairement ou définitivement), a choisi Objectif Gard pour s'exprimer.
ObjectifGard : Quel est votre regard quelques jours après tous ces rebondissements à la tête de la CCI ?
Eric Giraudier : Ce n'est pas une solution voulue ni préméditée. Nous ne sommes pas dans un contexte de conflit Giraudier-Cabanat sinon j'aurai eu, en début de semaine, lors de l'assemblée générale, des voix contre moi. La décision appartenait à l'ensemble des élus de la Chambre et je la respecte. Maintenant, il est important de reprendre deux-trois points pour bien comprendre l'histoire. Depuis plusieurs années, avec l'UPE 30, nous avons fait un travail de fond auprès des acteurs économiques du territoire. M. Cabanat, que j'avais rencontré une seule fois à cette époque, m'a proposé de s'associer pour prendre la direction de la CCI après sa mésentente avec Henry Douais. Nous avons donc convenu d'un protocole d'accord.
Un protocole qui n'a pas duré, c'est le moins que l'on puisse dire...
La demande initiale de Francis Cabanat était déjà démesurée : à savoir prendre la tête de la Chambre durant deux ans en raison du poids du bassin alésien, qui pèse aujourd'hui 18% à peine. Cependant, je l'ai acceptée car ce protocole me semblait équilibré. Malheureusement, c'est un tout autre visage qui est apparu de l'ancien président d'Alès après le 5 décembre 2016. Il a voulu mettre un terme au protocole alors que j'aurais pu, vous vous en doutez, exiger la présidence immédiatement. Moi, j'ai tenu mes engagements. Et puis, que les choses soient claires : il n'aurait jamais gagné sans nous, sans le travail de mes équipes depuis des années.
Vous parlez de visages différents de M. Cabanat, pouvez-vous préciser votre pensée ?
L'ensemble des membres élus est monté au créneau très rapidement, y compris les élus alésiens sur les premiers dysfonctionnements. Aucune réunion inter-services n'a été mise en place. La première, je viens de l'organiser ce mercredi. Aucune organisation, aucun fonctionnement n'a été discuté. Rien n'était programmé, on allait droit dans le mur. Comment voulez-vous voter un budget ? Ou esquisser les premières mesures si rien n'est anticipé ?
Vos méthodes ont pu choquer certains chefs d'entreprise ...
Comprenez-moi bien : avant la fin mars, il était indispensable de voter le budget de la Chambre unifié au risque d'être mis sous tutelle. Derrière, ce ne sont plus des chefs d'entreprise qui pilotent la CCI Gard mais la CCI de région (CCIR). Vous pensez que c'est mieux pour les entreprises gardoises que la CCI Nîmes soit dirigée par Toulouse ? Moi, je vous le dit : la CCI était en danger, c'était une question de jour. D'ailleurs, les élus d'Alès ont compris tout cela.
Votre "putsch", comme l'appelle Francis Cabanat, était donc seulement lié au vote du budget dans l'urgence ?
Un budget c'est la feuille de route pour les cinq ans à venir. Au plus tard, le 13 mars, nous devions avoir mis en place une commission des finances afin de transmettre les éléments financiers à la CCIR. Nous avons donc une grosse semaine devant nous. Mais lundi dernier, rien n'était prêt. Aucun budget préparé. Heureusement, pour rattraper ce retard, je peux compter sur les élus de la Chambre extrêmement impliqués. Et puis franchement, M. Cabanat a lui-même reconnu lors de l'assemblée générale (AG) qu'un nouveau bureau devait être élu. Sauf qu'il souhaitait encore attendre. Il réclamait un délai supplémentaire. Mais pourquoi faire ? Pour être mis sous tutelle ?
"La CCI d'Alès était en cessation de paiement"
Dans le courrier adressé à la presse par les élus démissionnaires, ils font état d'une situation financière tendue à la CCI d'Alès. Vous avez quelques précisions ?
La CCI d'Alès était en cessation de paiement, c'est cela la réalité. Il y avait 400.000 euros environ de dettes fournisseurs, nous avons dû payer. Sans compter les frais de personnel qui représentent encore aujourd'hui 94% du budget global. Pour être le plus clair possible, je vais vous expliquer la mécanique d'un budget annuel : vous avez un budget primitif chaque fin d'année, un budget révisé en cours d'année et enfin, en septembre, un budget exécuté. Nous avons donc découvert la situation de 2015, vous avez bien entendu 2015, uniquement en septembre 2016 au moment de la validation définitive du budget réel. Comment pouvait-on connaitre la situation du budget 2016 ? Ils ont communiqué sur le primitif, une estimation de budget mais pas le définitif.
Quand avez-vous eu connaissance de ce budget 2016 exécuté alors ?
Le 27 janvier 2017 précisément, lors de la commission des finances. Francis Cabanat a tout fait pour reculer cette échéance. Alors comment voulez-vous que les élus s'engagent sur 2017 après ? Si M. Cabanat confond le budget primitif et le budget exécuté, ce n'est pas de notre faute. Et puis, soyons sérieux, on nous a mentis pendant la campagne et aujourd'hui, on reprocherait aux élus et à moi-même de ne pas avoir réagi plus tôt ... On ne pouvait pas, nous n'étions pas au courant de cette situation catastrophique.
Vous contestez en particulier la vente de l'aérodrome de Deaux à un prix bien inférieur à sa valeur ?
Mais c'est pire que cela ! Lors de la dernière AG, Francis Cabanat nous a demandé de valider une délibération concernant la vente de l'aérodrome à l'Agglo d'Alès alors que nous n'avions même pas eu accès à l'ensemble des documents. Quand des élus ont refusé prétextant ne pas avoir ni le compromis, ni les éléments notariales, M. Cabanat a botté en touche. Par ailleurs, concernant le prix de vente, tout nous échappe. Dans la délibération, il n'est pas fait mention de l'estimation des Domaines de France. On nous parle de travaux à effectuer qui expliqueraient la forte baisse du prix. Je veux bien mais on ne peut pas le vendre à ce prix-là. D'ailleurs, c'est illégal car le prix de vente ne peut pas être inférieur de plus de 10% de l'estimation des Domaines de France.
Donc, vous ne vendez plus à Alès Agglo ?
Je ne dit pas cela. Mais pour l'instant, on a une feuille A4 pour décider, ce n'est pas possible. Il nous faut rentrer dans le dossier complètement pour statuer. Enfin, quelque chose d'important : la CCI Alès n'a plus aucun patrimoine aujourd'hui. L'aérodrome est le dernier. Tout a été vendu pour éponger les dettes. Mais aujourd'hui, sans aucun patrimoine, il va falloir équilibrer les comptes. Moi, je mise sur la légalité et la transparence pour ce mandat, je ne prendrai pas de décision contraire aux intérêts de la Chambre et des chefs d'entreprise.
Et à la CCI Nîmes, la situation est meilleure ?
Nous ferons une conférence de presse à la fin du mois de mars pour exposer l'ensemble des chiffres et détailler ce que nous avons trouvé en arrivant à la tête de l'établissement.
"Les élus d'Alès ne voulaient pas voter contre moi"
Est-ce que vous pouvez nous confirmer que Jean-Pierre De Faria est maintenu à son poste de président de la délégation d'Alès ?
Il est président et le restera. Moi je défends tous les bassins d'emplois. Nous n'avons rien contre Alès, bien au contraire. Pourquoi les élus d'Alès sont sortis durant le vote de lundi ? Car ils ne voulaient pas voter contre moi, c'est cela la réalité. Je n'ai eu aucune voix contre moi y compris des élus d'Alès, dont on aurait pu spéculer sur un vote de protestation à mon encontre. Au contraire, ils se sont abstenus. C'est important de vous préciser que de nombreux chefs d'entreprise alésiens ont pris contact avec la Chambre depuis lundi pour exprimer leur soulagement de mon arrivée à la tête de la CCI du département. Considérant peut-être avoir été méprisé durant la mandature précédente...
Et en ce qui concerne le personnel d'Alès, vous parlez de 94% du budget consacré aux charges de personnel...
Depuis le 1er janvier 2017, cela ne vous a pas échappé, nous sommes CCI Gard. Une seule entité et un personnel unifié. Nous n'avons pas encore voté le budget, on est en train d'y travailler, nous vous répondrons à la fin du mois de mars.
Quelles seront vos premières décisions dans les semaines à venir ?
Nous allons élaborer un règlement intérieur, établir un vrai plan d'organisation et voter un budget réaliste. Ensuite, nous impliquerons l'ensemble des élus à l'occasion de séminaires de travail. L'objectif est l'appropriation des élus aux attentes et besoins de la Chambre. Aussi, comme nous y sommes engagés, nous mettrons en oeuvre le programme sur lequel nous avons été élus. Quelques exemples : la réduction du pouvoir du président qui sera transféré au bureau. Ce dernier devra valider les ordres du jour, les délibérations, transmettre à tous les élus les documents nécessaires avant tout vote... Toutes les décisions, tous les projets seront diffusés, en toute transparence, sur le site Internet de la CCI Gard. Enfin, des indicateurs de performance seront établis. Comme vous pouvez le voir, nous sommes mobilisés pour l'avenir. En tant que chefs d'entreprise, nous sommes responsables. C'est pour cette raison que face aux problèmes observés, nous avons pris des décisions rapides pour ne plus perdre de temps. Je suis un homme qui agit dans l'intérêt de tous et qui accepte d'être jugé sur les actions entreprises, à la fin du mandat.