GARD Le préfet Didier Lauga : « Mon but n’est pas d’être populaire ! »
Sécurité des ferias, fêtes votives et matchs de Nîmes olympique, etc. Depuis quatre ans, le préfet Didier Lauga, se frotte aux complexes réalités gardoises.
Objectif Gard : Vous êtes préfet depuis quatre ans. Un record de longévité ?
Didier Lauga : Oh, je suis loin du record. À la Libération, un préfet est resté 11 ans dans le Gard (Paul Chaumeil, ndlr) ! Cela dit, c’est vrai, je suis là depuis une période conséquente. C'est une vieille demande de la Cour des comptes : plus un préfet reste en poste, mieux il connaît les sujets. En revanche, il peut être plus sensible aux pressions locales. Je suis entre les deux.
« Je suis en CDD renouvelable tous les mercredis »
Les politiques gardois sont connus pour leur forte personnalité, à l'instar du maire d’Alès. Il y a aussi la guerre Fournier-Lachaud à Nîmes. Comment travaillez dans ces conditions ?
Je représente l’État et j’essaie de rester sur cette ligne. J’aime beaucoup le contact humain, je ne le fuis pas. J’ai été dans la Drome avec une autre forte personnalité, le député Hervé Mariton qui avait même désapprouvé ma nomination. On est parti de loin mais nous avons réussi à travailler ensemble. Lors de mon départ, il m’a même regretté !
Il y a parfois des sujets litigieux à arbitrer…
Oui, ça a été le cas pour le dossier sur le transfert des zones d’activités économiques. La ville de Nîmes a plutôt été contente, moins l’Agglo. Sur le dossier GEMAPI (Gestion des milieux aquatiques et la prévention des inondations), c’est l’inverse. J’apprécie les gens qui ont du caractère et qui ne refusent pas la confrontation. Tenez, même avec le président du Département, Denis Bouad, nous avons trouvé une solution concernant le barrage de Sainte-Cécile-d’Andorge.
Franchement, vous n’êtes pas lassé du Gard ?
Lors de ma nomination, j’ai dit que même à pied j’irai à Nîmes ! C’est un département magnifique et passionnant. Le dossier de Saint-Felix-de-Palière a constitué à lui tout seul un précédent national. J’arrive en fin de carrière. Je savoure chaque instant. Je sais que je suis en CDD, renouvelable tous les mercredis, jour de conseil des ministres. Mais pour répondre directement à votre question : je ne me sens pas usé.
Une autre particularité du territoire : les ferias. Quel est le dispositif de sécurité mis en place pour ce week-end ?
Entre 500 et 600 agents de la police nationale seront mobilisés. Nous avons également des liens étroits avec la police municipale. On a pris toutes les précautions possibles et travaillé d'arrache pieds pour que tout se passe bien. Après, le risque zéro n’existe pas. D'autant que l'on est l’un des départements les plus radicalisés de France.
Samedi, une manifestation anti-corrida est prévue. Un moment de tension ?
Cette manifestation a été déclarée. Elle sera silencieuse et pacifique selon les organisateurs. Elle devrait être différente de celle qui s'est déroulée aux dernières ferias de Pentecôte. L’an dernier, on s’est fait surprendre car le ministère n’a pas pu nous donner les renforts souhaités. D’ailleurs, il y a un sujet qui est posé : une circulaire a été prise pour que la sécurité soit assurée par la ville lors des événements festifs.
Cette circulaire est-elle appliquée dans le Gard ?
Non. Ce n’est pas d’actualité. D’ailleurs en France, elle est très peu appliquée. Un bilan est en train d’être fait par le ministère. À Bayonne, il y a un périmètre avec un droit d’entrée à payer pour indemniser les forces de l’ordre présentes.
« Le maire de Vauvert a perdu mon numéro »
Pour rester dans le domaine des festivités, quel bilan dressez-vous des fêtes votives qui se sont déroulées cet été ?
Plutôt positif. Désormais, il n’y a pas plus que quatre jours consécutifs de fête et leur nombre est stable. Alors oui, il y a eu quelques remous à Vauvert. D’ailleurs, j’attends de voir le maire, Jean Denat, dont les propos ont été excessifs. Visiblement, il a perdu mon numéro de téléphone… Il a fait des déclarations indiquant que les forces de l’ordre l’avaient abandonné. Ce serait très bien qu’il me le dise ! J’ai beaucoup de respect pour ces fêtes, mais on ne peut pas mettre des agents partout. Certaines communes en ont pris conscience et font appel à une garde privée.
Un mot sur Nîmes Olympique : les règles de sécurité exigées par la Ligue 1 sont-elles bien respectées ?
Oui. Et malheureusement pour Rani Assaf, président de Nîmes olympique, il paie le service d’après les besoins que la préfecture estime. Cela étant dit, avec le club, nous avons de réelles relations de confiance. Sur le match face à Marseille en début de saison dernière et en fin de saison face à Lyon, il y a eu des tensions que tout le monde n’a pas vues. Le bilan est donc très largement positif.
Un mot sur le projet de nouveau stade du Nîmes Olympique. Rani Assaf vous a-t-il sollicité pour l'organisation de la sécurité de ce futur stade ?
Oui, il m'a expliqué le projet. Nous devons d'ailleurs nous revoir prochainement pour avancer sur des aspects plus techniques car ce futur stade est en zone inondable "rouge". Par ailleurs, il y a quelques questions juridiques à régler mais je crois savoir que le président du Nîmes Olympique s'est entouré de personnes compétentes et d'architectes de haut niveau qui ont parfaitement l’expérience pour gérer cela.
Concernant les supporters, vous avez édicté certaines règles. N’êtes-vous pas trop strict ?
Mon but n’est pas d’être populaire mais d’assurer la sécurité des citoyens. J’en suis désolé mais on gère un département compliqué, avec de fortes personnalités. Quand je vois des mouvements de foule, une buvette prise d’assaut… Je ne veux pas exposer des policiers, gendarmes et même d’autres supporters à la minorité agissante qui attend un match de foot pour en découdre. On essaie de ne pas grossir les mesures mais il n'est pas possible de mobiliser des forces de l’ordre inutilement.
Propos recueillis par Abdel Samari et Coralie Mollaret