LE 7H50 SPÉCIAL Intervention télévisée du Président Macron : ce que les politiques gardois en pensent...
Silencieux depuis plusieurs jours en dépit du mouvement des gilets jaunes et des événements qui agitaient l'Hexagone, le président de la République s’est exprimé, hier soir, sur TF1.
Attendu au tournant, le chef de l’État est enfin sorti de son silence dans une vidéo préenregistrée d'une dizaine de minutes, pour annoncer une série de mesures. Si le but poursuivi était d'éteindre la colère des gilets jaunes, mobilisés depuis trois semaines pour une hausse de leur pouvoir d’achat, chez les responsables politiques gardois les réactions sont mitigées.
Face à la Nation, hier soir, Emmanuel Macron a annoncé une hausse du SMIC de 100€ à partir de janvier 2019 (supportée par l’État), la suppression de la hausse de la CGS (Contribution sociale généralisée) pour les retraités qui perçoivent moins de 2 000 € mensuel, la défiscalisation des heures supplémentaires et une prime de fin d’année qui reste toutefois assujettie au bon vouloir des entreprises... Découvrez les réactions des responsables politiques locaux.
Olivier Gaillard, député La République en marche de la 5e circonscription du Gard : "Emmanuel Macron répond à l’urgence. Les mesures annoncées représentent un peu plus de 12 milliards d’euros pour l’État. Ce lundi soir, il y a eu une allocution avec un mea culpa nécessaire et indispensable. On répond à l’instant T, mais derrière il y a une fracture territoriale. Ces deux prochains mois, lors de la grande concertation, les corps intermédiaires devront retrouver leur place et les élus locaux devront être entendus. Désindustrialisation, fermeture des services publics… Quelque part, les habitants des territoires ruraux sont considérés comme des citoyens de seconde zone. Par ailleurs, il faut que l’ordre soit rétabli sur le territoire. Beaucoup de chefs d’entreprise souffrent des blocages ce qui impacte l’économie de notre territoire et met en danger des entreprises."
Annie Chapelier, députée La République en marche de la 4e circonscription : "J’ai apprécié son ton, ses mots et la forme. Ses annonces apportent des réponses immédiates au pouvoir d’achat des travailleurs pauvres avec l’augmentation du SMIC et rattrapent cette injustice de la hausse de la CSG des petites retraites. Mais surtout, il invite chacun à la table des négociations pour apporter les solutions de demain et j’ai été particulièrement sensible aux sujets des questions institutionnelles et de l’organisation de l’État ainsi qu’à son engagement de consulter les maires région par région. [...] J’attendais beaucoup de ces annonces et ce depuis longtemps. Aussi suis-je satisfaite des mesures annoncées. Cela ne suffira pas à déloger les gilets jaunes mais cela donnera des arguments aux plus raisonnables qui voient bien combien leur action est préjudiciable. Le temps de la concertation est venu. Sur Alès, la situation économique est catastrophique. Les barrages doivent disparaître, sinon nous sombrerons dans un suicide collectif."
Françoise Dumas, députée La République en marche de la 1ère circonscription du Gard : "Le Président a entendu les Français. Le ton était grave. Il a énormément insisté sur deux éléments prioritaires : des mesures immédiates et concrètes pour répondre à l'urgence sociale et économique. De ce point de vue là, on peut saluer son pragmatisme et sa volonté de répondre aux impatiences. Mais il a aussi mesuré la distance qui s'était installée avec les institutions locales et en particulier les maires, qui ont une place importante dans notre démocratie locale."
Philippe Berta, député La République en marche de la 6e circonscription du Gard : "Hier soir, on a entendu un grand Président qui, enfin, a pris la mesure de la situation. Je salue les annonces pour l'augmentation significative du SMIC et pour l'annulation de la hausse de la CSG pour les retraités que l'on réclamaient depuis longtemps. C'est un vrai début. Le travail va pouvoir commencer. D'autant qu'il a insisté sur ce point en souhaitant ne pas remettre à plus tard l'urgence d'aujourd'hui. Je suis à Paris, ce mardi matin, pour participer à la co-construction de ce projet et j'en suis ravi."
Jean Denat, premier secrétaire fédéral du Gard : "Il aura fallu près d’un mois de mobilisation pour que le Président semble enfin prendre conscience de la situation. Les annonces d’hier permettent de corriger certaines erreurs votées en 2017, mais le compte n’y est pas. La seule avancée notable et concrète est la décision concernant la CSG pour les retraités, cependant indexer le montant des pensions de retraite à l’inflation serait aussi une mesure nécessaire. Pour le reste c’est flou... Hausse du SMIC de 100€ ? Par quel biais ? Net ou Brut ? Les salariés proches du SMIC seront-ils concernés ? Prime de fin d’année ? Quelle entreprise prendra une telle initiative sans y être contrainte et dans les difficultés économiques que nous connaissons ? Défiscalisation des heures supplémentaires ? Qui en bénéficiera ? Comment va-t-on palier à l’absence de cotisations sociales ? Dans tout les cas il faudra trouver un financement pour ces mesures, celui-ci passera inévitablement par des économies drastiques. Le service public en sera-t-il la grande victime ? Il y a des chances, et malheureusement nous en faisons déjà les frais dans nos départements ruraux de province ou celui-ci disparait peu à peu. En définitive, le scandale d’hier soir c’est que pour faire les dépenses annoncées, les recettes ne viendront pas des grandes fortunes mais de nos concitoyens eux-mêmes."
Franck Proust, premier adjoint Les Républicains à la ville de Nîmes et député européen : "Sur la forme, j'ai trouvé l'intervention du Président théâtrale. Il était assez crispé. On comprend bien qu'il a subi cette séquence comme un choc. Sur le fond, effectivement, il a enfin annoncé ce que l'on suggérait depuis plusieurs semaines ! Après, il essaie de faire porter la responsabilité sur la politique exercée depuis trente ans, mais c'est lui qui a provoqué cette crise par la taxation sur le gazole ou encore la hausse de la CSG sur les retraités. Il parle aujourd'hui de la défiscalisation des heures supplémentaires. Une mesure qui date de plus de 10 ans mise en place par Nicolas Sarkozy ! Le problème, je crois, c'est que les mesures sont bien sur le papier mais dans le réel, j'attends de voir. Encore une fois tous les chefs d'entreprise ne pourront pas donner une prime en fin d'année. Encore moins ce qui ont subi cette crise de plein fouet. Pour l'annulation de la hausse de la CSG, pourquoi uniquement les retraités touchant une rémunération de moins de 2 000 euros ? Là encore, cela crée des inégalités. Idem pour le SMIC. Il avance que les entreprises ne prendront pas à leur charge les 100 euros d'augmentation. Mais qui va payer alors ?"
Vincent Bouget, secrétaire départemental du Parti Communiste : "Le compte n’y est pas ! Des premiers reculs qui montrent que les mobilisations peuvent bousculer mais au final, des mesures qui ne remettent pas en cause la logique de la cordée et du ruissellement. Qui paye l’augmentation du SMIC ? Les cotisations sociales ? L’État ? Rien sur la nécessaire augmentation des salaires, rien sur la nécessaire taxation des revenus du capital, rien sur le CICE (Crédit d'impôt compétitivité emploi, NDLR), rien sur les services publics, le transport, l’Éducation... Toujours pas de retour de l’ISF (Impôt sur la fortune, NDLR)... Beaucoup de flou sur le reste ! Ce lundi soir, pour le Président, qui a commencé par un couplet moralisateur toujours aussi méprisant, c’est plutôt « courage, fuyons ». Pour nous ce doit être «ce n’est qu’un début, continuons le combat !"
Julien Sanchez, maire Rassemblement national de Beaucaire : "On se demande où il était ces 18 derniers mois ? On a l’impression qu’il découvre le pays ! C’est un bon communicant. Il a repris les griefs et essaie de désamorcer. Les annonces sur le pouvoir d’achat ? Beaucoup n’ont aucun impact pour l’État. Une prime de fin d’année éventuelle, versée par les entreprises si elles le souhaitent… Oui d’accord, mais je ne pense pas que les artisans, commerçants qui sont assaillis de taxes puissent le faire ! D’ailleurs, qu’est-ce qu’il fait pour eux ? C’est aussi eux qui font vivre l’économie réelle ! 100 € de plus pour le SMIC ? Ça ne pèsera pas sur les entreprises, d’accord. Mais quand Marine Le Pen proposait , pendant la campagne pour la Présidentielle, de verser 200 € de cette même manière aux Français, il disait que c’était n’importe quoi et délirant… Voilà, on appréciera la constance du Président. Et puis, comment va-t-il financer tout ça ? Je crains que ce qu’il donne d’une main il ne le reprenne de l’autre."
Propos recueillis par Abdel Samari et Coralie Mollaret (avec Philippe Gavillet de Peney)