CULTURE La Bohème de Puccini : première ovationnée à l'opéra d'Avignon
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Puccini
- Studio DelestradeUn an après l'anniversaire des cent ans de la mort de Giacomo Puccini, Frédéric Roels révèle avec justesse l’intensité dramatique du compositeur italien dans une mise en scène épurée.
Il ne fallait pas ajuster son fauteuil car dès le début, Musetta gifle Marcello, qui vient de détacher son corsage. La jeune soprano traverse alors la scène, le haut découvert, derrière un rideau de voile transparent. Le moment est extrêmement sensuel.
La Bohème est un opéra en quatre tableaux sur un livret en italien de Giuseppe Giacosa et Luigi Illica, d’après le roman d’Henri Murger "Scènes de la vie de bohème", créé le 1ᵉʳ février 1896 au Teatro Regio de Turin par Puccini. Tout en italien, mais pas de panique, l'opéra d'Avignon est doté de prompteurs qui assurent la traduction simultanée.
Coups de foudre
Dans une mansarde parisienne, que l’on appellerait aujourd’hui Loft, Mimi, la jolie couturière aux mains froides (Che Gelida mamina) jouée par la soprano Gabrielle Philiponet, rencontre Rodolfo (Diego Godoy), le poète à la flamme : « elle est ma poésie », clame-t-il régulièrement.
C’est l’amour fou. Même chose entre Musetta (Charlotte Bonnet) et Marcello, joué par l’excellent baryton Geoffroy Salvas. Pour ces deux-là, c’est un peu plus compliqué et l’affaire ressemble plus à la mégère (non) apprivoisée de Shakespeare… Pour preuve, la toute première scène éclair de la claque, derrière un rideau transparent, d’une sensualité incroyable et qu’il ne faut absolument pas louper. En réalité, Musetta n’est rien d’autre qu’une femme libre.
Paris en hiver
Le Paris de la bohème y est compté avec romantisme autour du café Momus, la veille de Noël. Et il neige, c’était avant le réchauffement climatique.
Les artistes vivent ensemble dans la pauvreté et le rêve. Un vieux chapeau devient un seau à champagne qui accueille un petit pichet. Les arias "Che gelida manina" et "Quando men vo" s’élèvent, incarnant la passion de l’auteur et la légèreté de l’amour.
La musique prend le lead
Mais alors que le rideau se lève sur le troisième acte, la joie disparait, cédant la place à la tristesse et à la jalousie. Chez les Puccini, on est organiste à San Martino de père en fils et musiciens avant tout. Ainsi, ce n'est pas une surprise si la musique guide la scène. Les violons s’estompent et les flûtes et la harpe reprennent le flambeau.
Les cuivres s’emparent du quatrième acte, scellant le sort de la pauvre Mimi. Ovation du public avignonnais, connaisseur, devant la révérence du ténor chilien Diego Godoy (Rodolfo), submergé par l’émotion.
Grâce à une mise en scène épurée et une partition magistrale, Frédéric Roels révèle avec justesse l’intensité dramatique de Puccini.
Distribution
Direction musicale Federico Santi
Mise en scène Frédéric Roels
Décors / Costumes Lionel Lesire
Lumières Arnaud Viala
Assistanat à la mise en scène Nathalie Gendrot
Études musicales Thomas Palmer
Chef de Chœur Alan Woodbridge
Responsable de la Maîtrise Florence Goyon-Pogemberg
Mimì Gabrielle Philiponet
Rodolfo Diego Godoy
Musetta Charlotte Bonnet
Marcello Geoffroy Salvas
Schaunard Mikhael Piccone
Colline Dmitrii Grigorev
Alcindoro / Benoît Yuri Kissin
Chœur de l’Opéra Grand Avignon
Maîtrise de l’Opéra Grand Avignon
Orchestre national Avignon-Provence