FAIT DU JOUR Interdiction de l'abaya : comment les établissements se préparent à Nîmes ?
Inconnue par un grand nombre il y a encore peu, l’abaya occupe désormais l’attention de tous les débats et inquiétudes. À la veille de la rentrée scolaire, comment les établissements se préparent face à l'interdiction du port de ce vêtement religieux ?
Considérant une montée en puissance de l'abaya, ce vêtement traditionnel porté par les musulmans – et de son pendant masculin le qamis – qui a fait naître un grand nombre d’interrogations auprès des chefs d’établissements, Gabriel Attal, nouveau ministre de l’Éducation, a décidé d’agir. L’abaya et le qamis sont interdits, considérés comme des vêtements religieux portant donc atteinte au principe de laïcité. Le ministre s’appuie sur la loi du 15 mars 2004 interdisant le port de tenues ou signes qui manifestent « ostensiblement une appartenance religieuse ».
Voilà pour la théorie, place maintenant à la pratique et la responsabilité aux établissements de faire appliquer cette nouvelle interdiction. Dans une note de service, Gabriel Attal a expliqué la démarche à suivre. Dès ce lundi, les jeunes filles portant l’abaya seront accueillies mais elles ne pourront pas se rendre en classe. Des membres du personnel seront chargés de leur expliquer le sens de cette interdiction et les raisons de cette décision. Dans les faits, cela risque de se passer autrement. Car qui va devoir jouer les législateurs ? Les professeurs ?
"Faire preuve de pédagogie"
Ce sujet cristallisait déjà les tensions vendredi dernier, dans un collège nîmois, lors de la journée de pré-rentrée. « On n’a pas envie de fliquer les enfants, ce n’est pas notre rôle », déploraient certains professeurs. Obligeant le proviseur à calmer d’entrée le jeu et à rassurer les professeurs en expliquant que c’est la vie scolaire qui s’en chargerait. Avant même la rentrée, le ton est donc déjà monté concernant cette tenue et la crainte de devoir refuser l’accès en classe à des élèves crée des inquiétudes. Pourtant elle est bien réelle.
Dans le Gard, plusieurs responsables de collèges et lycées s’attendent à voir arriver ce lundi matin des adolescentes vêtues de l’abaya. « C’est tout à fait possible ! », assure Mohamed Bouta, principal du collège Les Oliviers. Pour cette rentrée, son mot d’ordre est la pédagogie. « On va surtout dialoguer. Le personnel de vie scolaire va être amené à leur parler à tous et à leur indiquer la décision du ministre de l’Éducation nationale. Il est nécessaire de faire preuve de pédagogie et surtout de laisser un petit peu de temps », poursuit-il.
Des élèves déjà refusés l'année dernière
Pendant quelques jours, il souhaite faire preuve « d’élasticité » avant d’appliquer clairement la loi. « À un moment donné, je fixerai une date butoir à partir de laquelle effectivement je serais amené à rencontrer les parents et ne pas accepter l’élève », explique M. Bouta. Car dans le texte du ministre, il est prévu de mettre en place une procédure disciplinaire si l’élève refuse de renoncer à l’abaya ou au qamis.
Au sein de l’Institut Emmanuel d’Alzon, groupe scolaire privé catholique, son directeur Yvan Lachaud n’a pas attendu cette interdiction pour refuser l’entrée, l'année dernière, aux collégiens et lycéens se présentant avec cet habit religieux. « Comme les grandes croix, les signes religieux ne sont pas acceptés dans l’établissement. Nous sommes ainsi immédiatement intervenus en convoquant les parents. Parfois, il a fallu batailler mais ils ont accepté les règles. » Le directeur fait état de sept, huit cas sans jamais qu’un élève fasse le choix de quitter l’établissement.
Si jusqu’à présent, chaque directeur devait se « débrouiller » face à cette situation, l’interdiction règle le problème. Mais encore faut-il qu'elle soit acceptée et comprise ? Une décision « juste » car « il faut tenir bon » pour maintenir la laïcité insiste Yvan Lachaud.