PONT-SAINT-ESPRIT Pour lutter contre l'habitat indigne, la Ville instaure le permis de louer
Pont-Saint-Esprit est la quatrième commune du Gard à instaurer le permis de louer (*). Ce dispositif permet à la municipalité de vérifier qu'un logement est bien digne d'accueillir des locataires avant d'être mis en location. Il entrera en vigueur à compter du 1er janvier 2023.
"Le logement digne, c'est un droit. (...) Depuis plusieurs années, à Pont-Saint-Esprit, on fait la chasse aux marchands de sommeil et aux propriétaires indélicats", indique en préambule la maire, Claire Lapeyronie. Grâce à ce nouveau dispositif, la municipalité va passer à la vitesse supérieure et avoir un droit de regard plus grand sur les biens mis sur le marché locatif. Le permis de louer s'appliquera au même périmètre que de celui de l'OPAH-RU (Opération programmée d'amélioration de l'habitat de renouvellement urbain) car c'est là que se trouve un grand nombre de logements non-décents, principalement construits avant 1945. Selon un travail de repérage, 240 immeubles de ce périmètre seraient en mauvais état, 76 en très mauvais état et 9 en état de ruine.
Le permis de louer a été créé en 2016 dans le cadre de la loi ALUR et aujourd'hui, plus de 450 ont été instaurés en France. "Ce qui est intéressant, c'est qu'on va pouvoir visiter les logements avant que les locataires soient à l'intérieur. Car une fois que c'est le cas, c'est difficile d'intervenir", explique François Coste, référent permis de louer à Pont-Saint-Esprit. Ces cinq dernières années, la mairie spiripontaine a passé une vingtaine d'arrêtés de périls, d'insalubrité ou de travaux d'urgence. "C'est quelque chose de lourd à mettre en place et quand on a le locataire à l'intérieur, on doit le faire sortir, lui trouver un hébergement d'urgence. Avec le permis de louer, on va pouvoir éviter d'agir dans l'urgence en contrôlant en amont", poursuit ce dernier.
80 visites d'appartements suite à des signalements
Jusqu'à présent, la municipalité devait attendre d'avoir un signalement pour pouvoir agir. Environ 80 visites ont été effectuées dans ce cadre en trois ans et demi. Désormais, le problème va pouvoir être "devancé". La plupart des propriétaires de logements indignes sont des personnes qui ne veulent pas y vivre, qui résident loin et ne souhaitent pas se déplacer.
L'agglomération du Gard rhodanien a délibéré favorablement en juin dernier à la mise en place de ce permis de louer à Pont-Saint-Esprit. C'est la première commune du territoire à adopter ce dispositif. À compter du 1er janvier 2023, dans le secteur de l'OPAH-RU, tout propriétaire (**) qui met ou remet en location (meublé ou non) son bien devra remplir un CERFA qui devra être envoyé par mail, remis dans une permanence physique ou par courrier postal. À compter de ce moment-là, la municipalité a un mois pour répondre (si elle ne répond pas dans les délais, cela vaut acceptation).
Entre 30 et 35 % de logements vacants dans le périmètre
La municipalité demandera des diagnostics immobiliers (plans avec surfaces du logement, amiante, gaz, électricité...), le projet du bail (pour savoir jusqu'à combien de personnes le propriétaire accepte dans le logement et éviter la suroccupation) et des photographies. "Si on voit que tout est nickel, on pourra donner plus facilement l'autorisation. Mais la plupart du temps, on demandera à faire une visite du logement pour vérifier qu'il ne s'agit pas d'une fausse déclaration ou de photos trompeuses", précise François Coste. Suite à quoi, les propriétaires recevront un courrier d'autorisation, d'autorisation avec prescription ou de refus. À chaque remise en location, le propriétaire devra refaire un CERFA, même s'il l'avait déjà fait et même si le logement n'avait pas eu de souci. L'autorisation sera délivrée sans souci.
Dans le périmètre de l'OPAH-RU, le taux de vacances des logements est aussi très élevé : selon une étude de terrain réalisée par le service urbanisme, cela représenterait entre 30 et 35 % de l'habitat. Ce sont donc autant de logements, pas forcément entretenus, qui sont susceptibles de revenir sur le marché locatif. Le permis de louer permettra de mieux surveiller ces mouvements.
Des amendes allant jusqu'à 15 000 € en cas de récidive
En cas de signalement, les agents demanderont désormais si les propriétaires ont demandé leur permis de louer. Si le début de location est antérieur au 1er janvier 2023, pas besoin, mais si le contrat a démarré après cette date sans autorisation, il y aura un signalement au préfet. "C'est le préfet qui s'occupe de toutes les infractions : ce sera 2 000 € d'amende sur les faits les moins graves, 3 000 € pour une amende classique et ça monte jusqu'à 15 000 € si jamais il y a récidive. L'argent prélevé n'ira pas à la mairie mais sera reversé à l'Agence nationale de l'habitat", décline-t-il. Et cela ne brisera pas pour autant le contrat du locataire qui ne sera donc pas expulsable pour cette raison-là.
À la mairie, on est conscient que rénover son logement peut être cher. C'est pourquoi, elle a choisi d'appliquer ce permis de louer seulement sur le secteur de l'OPAH-RU qui est aussi éligible à des subventions pour aider à réaliser les travaux. Plus d'informations en cliquant ici.
Marie Meunier
(*) Les villes de Vauvert, Beaucaire et Calvisson ont déjà instauré le dispositif. Nîmes a voté en conseil municipal un permis de louer expérimental sur le quartier de Pissevin pour l'année prochaine.
(**) Seuls les logements sociaux et les logements conventionnés (APL) sont exclus de l'obligation d'autorisation.