FESTIVAL OFF Heureux les orphelins, quand le langage est une arme
Sébastien Bizeau reprend le mythe d’Électre dans sa pièce Heureux les orphelins, dans lequel il met en avant l’importance que peuvent revêtir les mots dans notre société.
« Le langage est une arme, et la parole est devenue un instrument clé du pouvoir » Ces mots de Georges Orwell dans 1984 posent le postulat de départ de Sébastien Bizeau, l’auteur et metteur en scène de Heureux les Orphelins. La pièce est adaptée de l’œuvre de Jean Giraudoux, elle-même inspirée du mythe grec d’Électre. Électre est la fille d’Agamemnon, roi de Mycènes, et de Clytemnestre, et la sœur d’Oreste, Iphigénie et Chrysothémis. Alors qu’elle est absente, son père se fait assassiner, et elle décide, à l’aide de son frère Oreste, de le venger.
Dans Heureux les orphelins, le roi devient un chef cuisinier, Oreste un conseiller ministériel. Electre, elle, est toujours en recherche de vérité. « Il y a plusieurs fils » explique Sébastien Bizeau, « un drame familial croisé avec une intrigue politique. On se rapproche un peu de la série Borgen en ce sens, avec son traitement des coulisses politiques. »
L’histoire, interprétée par cinq acteurs qui vont incarner à eux tous pas moins de 15 personnages, est « un mélange de drame contemporain et de comédie satirique », résolument moderne jusque dans son décor ultra-minimaliste. « Je suis heureux qu’il y aie du monde au plateau, il y a beaucoup de seuls en scène au Festival d’Avignon, alors je voulais de la pluralité, et ça plait au public. »
Mais le véritable message de la pièce, c’est l’importance du mot et le pouvoir du langage. « Je voulais mettre des mots sur les choses » explique l’auteur. « C’est un thème que je connais bien à titre personnel. » Pour Sébastien, le langage est tout sauf neutre. « C’est l’arme absolue, aussi efficace qu’invisible. » Il dénonce aussi « l’extrême sophistication du langage » d’aujourd’hui, qui enlève le pouvoir à celleux qui le maîtrisent mal, conduisant ainsi à une forme d’élitisme.
« C’est le dénominateur commun à de nombreux faits d’actualité ! Prenons l’exemple de Mee Too par exemple. Comment sortir de l’invisibilisation des faits ? Par les mots, parce que l’absence de mot empêche le combat. Reprenons le pouvoir par le langage : on a tous la capacité d’en interroger l’usage qu’on en fait : c’est la première pierre du questionnement de notre monde et de ses réalités. »
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Heureux les orphelins se jouera au Théâtre des Gémeaux, 10 rue du Vieux Sextier, 84000 Avignon, du 29 juin au 21 juillet à 16h45. Plus d’informations au 04 88 60 72 20