NÎMES C’est parti pour La Contemporaine !
La Contemporaine de Nîmes est une nouvelle triennale de création contemporaine portée par la ville de Nîmes. Tous les trois ans, un extrait de l’art d’aujourd’hui est présenté à travers la ville, autour d’une grande thématique.
L’édition inaugurale se tient du 5 avril au 23 juin 2024 et a pour titre « Une nouvelle jeunesse ». Le thème ? La jeunesse actuelle, ses préoccupations et ses liens avec les générations qui la précèdent, à travers les notions d’héritage et de transmission. Elle s’articule autour d’une grande exposition dans toute la ville, rythmée par de nombreux temps forts et événements, et rassemble plusieurs dizaines d’artistes reconnus et émergents de la scène française et internationale.
La programmation de cette « Contemporaine » a pour point de départ la grande exposition intitulée « La Fleur et la Force », en référence à la fleur et à la force de l’âge. Déployée sous la forme d’un parcours dans le centre-ville, elle se compose de douze projets artistiques dans autant de lieux : musées, lieux culturels, sites patrimoniaux, espaces publics…
Chacun d’eux rassemble un binôme intergénérationnel composé d’un artiste émergent et d’un artiste établi ou historique, ainsi qu’un groupe d’habitants de Nîmes associé à sa création. Le parcours de l’exposition est réparti en cinq secteurs qui peuvent être visités dans l’ordre de son choix : Gare, Arènes, Chapitre, Carré et Jardins.
Fasciné par l’empereur romain méconnu Héliogabale, l’artiste et cinéaste Valentin Noujaïm en a fait le protagoniste de son dernier projet vidéo, Les Trois visages d’Héliogabale, tourné à Nîmes, au Temple de Diane. En binôme avec l’artiste Ali Cherri, qui a réalisé les trois masques présents dans le film et exposés en miroir du dispositif vidéo en surplomb de la fosse de la Rue Romaine du Musée de la Romanité, Valentin Noujaïm rend hommage et reconsidère la figure controversée de cet empereur adolescent, qui a régné de 218 à 222, et a fait l’objet d’une damnatio memorae, un effacement des archives historiques.
En réinterprétant des codes du théâtre antique, l’œuvre (qui a été réalisée avec la participation de lycéennes et lycéens en spécialité cinéma) interroge notamment l’héritage anarchiste d’Héliogabale. Cette installation commune traduit le goût que les deux artistes partagent pour l’archéologie, les greffes temporelles et la relecture contemporaine des formes du passé. Ils nous invitent ensemble à traverser une passerelle, pour nous conter un morceau d’histoire fantasmé.
Le Musée des cultures taurines Henriette et Claude Viallat accueille une installation vidéo immersive de l’artiste Aïda Bruyère. Intitulée Make Up Destroyerz III, elle a été conçue en co-création avec des collégiens et des lycéens de Seine-Saint-Denis et de Nîmes.
Après un cataclysme planétaire, un groupe d’adolescentes et d’adolescents reçoit un message du passé les incitant à bâtir une nouvelle société, sans reproduire les erreurs du passé, liées notamment au patriarcat et aux inégalités de genre. Cette quête n’est cependant pas de tout repos : elle déchaîne les passions et engendre un conflit entre les survivants… Ce récit d’anticipation post-apocalyptique à plusieurs mains rend hommage aux attributs de la féminité et à la culture visuelle adolescente, et mêle (en les détournant sous un prisme féministe) des références à la culture tauromachique, au hooliganisme, ou encore aux spectacles de gladiateurs.
L’installation est introduite par un ensemble d’œuvres iconiques de l’artiste américaine Judy Chicago, pionnière de l’art féministe. Il retrace plusieurs de ses performances phares, où effets pyrotechniques et fumigènes deviennent les attributs de femmes puissantes.
L’artiste et cinéaste Rayane Mcirdi présente au Sémaphore, iconique cinéma d’art et essai du centre-ville de Nîmes, son nouveau film : La Promesse. Capsule temporelle et road movie mêlant fiction et documentaire, il réinterprète un voyage annuel d’été vers l’Algérie à la fin des années 1980, tel qu’il a été raconté à l’artiste par les femmes de sa famille, et imaginé à partir de photographies qu’il a retrouvées.
Se déroulant essentiellement à bord de la voiture de son grand-père, ce quasi-huis clos nous plonge dans l’intimité d’une famille, sur les routes qui relient la région parisienne au port de Marseille. Il est l’occasion d’aborder des questions de transmission intergénérationnelle et familiale, de racine, de retour dans le pays d’origine, de mémoire et d’identité, tout en considérant l’importance et la difficulté de se souvenir.
Rayane Mcirdi a été épaulé par le réalisateur Virgil Vernier tout au long de la réalisation de son projet, sous la forme d’un mentorat. Une publication accompagne le film, réalisée avec des femmes du quartier de Pissevin à Nîmes, adhérentes de l’association Les Mille Couleurs, afin de compiler d’autres histoires et d’autres témoignages issus de tel voyage.
Le Musée du Vieux Nîmes est le théâtre d’un duo posthume entre la jeune artiste textile Jeanne Vicerial et un monument de la peinture récemment disparu : Pierre Soulages. Les recherches du peintre ont été particulièrement importantes dans le parcours de Jeanne Vicerial.
En découvrant son travail, elle comprend que le noir associé à un geste répétitif ouvre des possibilités infinies. Car ce n’est pas de noir dont il est finalement question, mais de lumière et de portes vers d’autres mondes. Dans ce face à face inédit, Jeanne Vicerial a souhaité rendre un hommage au maître dans la ville qui l’a vu partir. Plusieurs de leurs œuvres entrent en dialogue au sein d’une installation multisensorielle qu’elle a entièrement créée sur place, et qui a nécessité d’habiter le musée pendant un mois avec son équipe et des étudiantes et étudiants en mode du Lycée Ernest Hemingway de Nîmes.
L’expérience proposée aborde autant l’idée de renaissance et de métamorphose, que l’état d’antériorité qui précède la naissance, le dernier souvenir avant que ne commence la vie. Présences féminines et outre noirs rythment ce parcours du blanc vers le noir, puis du noir vers le blanc, tout en mettant en lumière les nombreux parallèles qui existent entre les pratiques des deux artistes. Fils et sillons laissés par le passage du pinceau semblent parfois même s’interchanger. Ici, ils incarnent à la fois le passage du temps et la fragilité des destinées.
Les artistes Caroline Mesquita et Laure Prouvost ont imaginé ensemble une sculpture monumentale et interactive qui vient habiter la place du Chapitre, en dialogue avec la fontaine déjà présente. Plusieurs mains sont nécessaires pour l’activer, lui donner vie, et ainsi en révéler le cœur et les multiples messages.
Fruit d’un véritable travail collaboratif entre les deux artistes, elle mêle des personnages en laiton patiné de Caroline Mesquita aux jeux de mots et aux abeilles en verre de Laure Prouvost, dans un dialogue entre écriture, sculpture et installation urbaine. Les artistes ont également associé des élèves de l’école maternelle, dont la cour de récréation donne sur la place. En résulte un terrain de jeu grandeur nature, une roue de la fortune réinventée, un ballet en plein air, orchestré par les passants de tous âges.
La Chapelle des Jésuites, monument historique majeur de la ville érigé en 1678, est l’écrin de la projection du dernier film de l’artiste et cinéaste June Balthazard : Millennials. Récit d’anticipation écologique, il suit une communauté d’enfants qui, face à l’inaction des adultes, a fait le choix de vivre en quasi-autonomie dans des cabanes perchées dans les arbres pour lutter contre la déforestation.
Le film entre en résonance avec plusieurs œuvres de Suzanne Husky qui se déploient dans la chapelle et rendent hommage à l’activisme écologique, dont une installation réalisée avec la participation d’étudiantes et d’étudiants de l’École supérieure des beaux-arts de Nîmes située à deux pas, de l’autre côté de la rue.
L’ensemble forme une alerte face à une tragédie en cours, autant qu’une ode à la forêt et à celles et ceux qui s’y réfugient pour mieux la protéger.
Alassan Diawara a imaginé un nouvel ensemble photographique, pour lequel il a parcouru Nîmes et ses environs pendant plusieurs mois, en faisant de nombreuses rencontres. Les images du jeune photographe belge interrogent (à travers des tranches de vie) la jeunesse, les liens entre différentes générations à l’échelle de familles ou de communautés, et cherchent à saisir une certaine essence de l’imaginaire du Gard et de la Camargue.
Ses photographies sont mises en dialogue avec un corpus d’œuvres de Zineb Sedira, qui abordent le sujet de la transmission familiale et culturelle. L’artiste, qui a représenté la France à la Biennale de Venise en 2022, a également accompagné Alassan Diawara dans la construction de son projet, sous la forme d’un mentorat. L’installation présentée à Carré d’Art – Musée d’art contemporain de Nîmes, pensée en commun par les deux artistes, propose ainsi de nouvelles perspectives sur les manières dont se construisent les histoires et les cultures au fil des générations.
Les artistes Hugo Laporte et Katja Novitskova proposent à Carré d’Art – Musée d’art contemporain de Nîmes les fondations d’une institution muséale et archéologique d’un temps que nous ne connaissons pas encore, pourtant pas si éloigné du nôtre. Elle rassemble ce qui pourrait être les traces et artefacts d’une humanité à venir, aux prises avec des enjeux écologiques, technologiques, géopolitiques et culturels de plus en plus troublants.
« Oracle Museum » se développe autour d’une muséographie fictive, mettant en scène une grande diversité d’objets, d’images, de sons, de mythologies et de personnages fabriqués par les artistes avec des machines et des intelligences artificielles, pour nous donner à voir un futur encore évitable.
Une société fictive, Otherworld Communication, prend ses quartiers au cœur de la Bibliothèque Carré d’Art – Jean Bousquet. Elle propose un service de communication intergénérationnel entre vivants et défunts, qui consiste en la fabrication de téléphones votifs en carton contenant un message de son choix. Ils peuvent ensuite être activés par le feu, afin d’être envoyés à des personnes disparues.
En prenant appui sur des rites funéraires pratiqués au Vietnam et dans sa diaspora, l’artiste Prune Phi présente ainsi un vaste projet d’installation et de performance interactives. Il a été conçu avec la participation d’usagers de différentes bibliothèques et des collégiens de Nîmes, et en binôme avec SMITH, qui a réalisé une série de signaux lumineux pour accompagner l’expérience proposée.
Celle-ci s’inscrit dans la continuité des recherches que les deux artistes mènent respectivement sur les états modifiés de conscience, l’évolution des traditions ancestrales en lien avec les nouvelles technologies, et les formes de relations avec l’au-delà.
Une installation en bois monumentale prend place dans les Jardins de la Fontaine. Elle est le fruit de l’association de deux artistes et architectes de générations différentes. Leurs structures respectives – un aqueduc pour Feda Wardak, une gouttière aérienne pour Tadashi Kawamata – dessinent deux lignes aquatiques dans le paysage, en sortant l’eau de la fontaine de son lit habituel et en lui faisant vivre une aventure.
L’eau semble surgir d’ailleurs, dans une évocation à Nemausus, la source sacrée qui a donné son nom à Nîmes et autour de laquelle la ville a été fondée. Si les deux interventions artistiques sont distinctes, elles se rejoignent : c’est Feda Wardak, le plus jeune, qui passe l’eau à son aîné. L’ensemble rend hommage aux savoir-faire ancestraux liés au transport de l’eau, et à certains principes de construction moins employés de nos jours, comme l’illustre notamment la présence d’un cintre conçu par des jeunes des Compagnons du Devoir de Nîmes au niveau de l’aqueduc.
Son utilisation peut rappeler un chef d’œuvre architectural situé à proximité, pour lequel des cintres ont dû être réalisés : le pont du Gard, partie monumentale d’un aqueduc romain construit au 1ersiècle. En révélant les dessous de l’eau, les deux artistes nous permettent d’en comprendre les rouages, tout en ouvrant des pistes de réflexion sur la gestion et la transmission de cette ressource essentielle, ainsi que sur les techniques et ouvrages nécessaires à sa préservation.
C’est un dialogue artistique intergénérationnel exceptionnel qui prend place au Musée des Beaux-Arts de Nîmes. La jeune peintre Neïla Czermak Ichti expose aux côtés de l’une de ses artistes préférées, Baya, icône de la peinture algérienne décédée en 1998, dont une trentaine de gouaches de différentes périodes sont rassemblées pour l’occasion.
Neïla Czermak Ichti a réalisé en réponse un nouvel ensemble de peintures et de dessins. L’installation met en lumière les techniques et les sujets qu’elles ont en commun, notamment leur amour pour la vibration des couleurs, la musique, les contes, ainsi que la représentation d’une enfance infinie, de femmes dans différents contextes et environnements, ou de mondes peuplés d’étranges chimères et animaux fantastiques, à la fois compagnons et alter egos.
Le paysage onirique et immersif qui en résulte permet de poser un nouveau regard sur l’œuvre de Baya, qui se révèle, au contact de la jeune artiste, étrange, mélancolique, complexe. À rebours de l’aspect « joyeux », « naïf » et « merveilleux » auquel elle est encore souvent associée. Un mobile composé d’un bestiaire fantastique a également été réalisé par des élèves d’écoles élémentaires de Nîmes, avec l’accompagnement de Neïla Czermak Ichti et en écho à l’univers de Baya, pour que le rêve se prolonge.
L’artiste et tisserande Delphine Dénéréaz, en collaboration étroite avec la poétesse, écrivaine et metteuse en scène Sonia Chiambretto, présente une installation textile monumentale dans l’espace public. Elle se déploie tout au long de l’avenue Feuchères, qui relie la Gare de Nîmes-Centre aux Arènes.
Des bulles de conversation, des messages cryptés et divers symboles perchés à la manière d’étendards entre les platanes rendent compte de l’intimité, des préoccupations et des rêves de futur d’une jeunesse, lorsqu’elle regarde le ciel et s’autorise à inventer son propre langage.
Le projet est le fruit d’un long processus de création associant des élèves de 4e du Collège Feuchères, situé sur l’avenue. Ce sont leurs mots, leurs gestes et leurs paroles qui ont guidé les artistes pour concevoir avec eux ce gigantesque poème visuel, qui exige que nous levions, nous aussi, les yeux vers le ciel