PONT DU GARD L'exposition "Intelligence artificielle vivante" visible jusqu'au 7 novembre
On se sent saisi, presque oppressé en pénétrant dans l'antre de l'exposition "IAV-Intelligence artificielle vivante". Les murs sont noirs mats, l'ambiance sonore parfois inquiétante et, au fond de la salle, un personnage étrange crache des nuages de fumée. L'exposition est visible jusqu'au 7 novembre sur la rive gauche du Pont du Gard.
"IAV-Intelligence artificielle vivante". C'est un oxymore. Deux choses qui ne s'accordent pas mais qui sont liées en une expression finalement très sensée. On ignore si l'on peut dire pareil des oeuvres qu'elle rassemble. Mais il est vrai que les différents mondes artistiques s'entremêlent à la perfection pour ne créer qu'un univers vaste et pluriel.
Les dessins du Montpelliérain Jimmy Richer sont conjugués à l'ambiance sonore composée par Guilhem Causse et aux étranges "Babas" de Chloé Viton. Il y a aussi des oeuvres des FRAC (Fonds régionaux d'art contemporain) d'Occitanie et de Franche-Comté. C'est unique. C'est multiple. Passé et futur se confrontent, s'entrechoquent pour ne former qu'une temporalité indéfinie.
Un projet parti d'une résidence artistique au collège de Remoulins
C'est au collège Voltaire de Remoulins que tout a commencé. Jimmy Richer a effectué dans la classe d'arts plastiques d'Alice Bonnet une résidence, dans le cadre du dispositif départemental "Artistes au collège". Il y est resté quasiment deux mois entre mai et juin 2021, en associant les élèves aux différentes actions artistiques. L'idée était notamment de travailler autour de l'actuel collège Voltaire amené à disparaître pour laisser place au nouveau bâtiment.
La transformation du monde est en effet au coeur de cette exposition. En regardant les dessins de Jimmy Richer, on voit la nature en mouvement, et la force qui l'anime face aux constructions humaines. Certains peuvent y voir une catastrophe, un futur dystopique annonciateur de l'urgence climatique actuelle mais l'artiste l'affirme : "Il n'y a aucun jugement de valeur, je veux seulement exprimer le mouvement." Beaucoup de ses dessins sont quadrillés d'entrecroisements de lignes : "Ces lignes blanches reprennent le vitrail de la chapelle de la médiathèque d'Uzès où j'étais en résidence (*). Ça donne une symétrie et une impression de fenêtre, d'ouverture..."
Un voyage sonore à travers les époques géologiques
La contemplation est rythmée par l'ambiance sonore créée par Guilhem Causse. Une pièce d'une heure qui s'inspire des époques géologiques d'après le Big Bang : "Tout a lieu avant que les amphibiens arrivent sur terre. C'est un mélange entre sons électroniques au synthé et sons réels captés et enregistrés", indique-t-il. Guilhem Causse a effectué ce travail en se glissant dans la carcasse d'un robot détenteur de l'histoire de la Terre, mais dont la mémoire serait abîmée par moments. Il projette ainsi au public son interprétation d'intelligence artificielle.
Un nouveau jet de fumée sort de l'orifice d'une étrange créature. "C'est une Baba", répond Chloé Viton. Une deuxième lui fait face. Elle se mettra, elle aussi, vite en mouvement quand une artiste enfilera le costume pour une performance : "Elle va tisser les nouilles pour créer un oeuf blanc. Cela représente le changement d'état. Je me suis inspirée des araignées matriphages et d'un mythe japonais. J'aime associer phénomène scientifique et mythologie."
Vous l'aurez compris, cette exposition emmène le spectateur à travers un voyage déroutant, en dehors des repères spatio-temporels et des certitudes. Mais vers une nouvelle réalité : celle des artistes, celle de l'intelligence artificielle, celle du public ou peut-être des trois à la fois ?
Marie Meunier
Exposition IAV à la salle d'exposition temporaire, rive gauche du Pont du Gard jusqu'au 7 novembre. Horaires : du mardi au dimanche de 10h30 à 12h30 et de 13h30 à 17h. Pass sanitaire exigé et port du masque obligatoire.
(*) Jimmy Richer a également bénéficié d'une résidence à l'Échangeur 22, à Saint-Laurent-des-Arbres qui a accepté de l'héberger et de le soutenir.