Publié il y a 1 an - Mise à jour le 30.01.2023 - Corentin Migoule - 4 min  - vu 1044 fois

ALÈS En pleine inflation, l'épicerie solidaire de l'école des Mines connaît un pic de fréquentation

école des mines

Laury Rottier (2e en partant de la gauche) préside l'Entr'Ema. (photo Corentin Migoule)

Grâce à l'apport de denrées alimentaires et de produits d'hygiène collectés par la Banque alimentaire, l'épicerie solidaire Entr'Ema, gérée par des élèves de l'IMT Mines Alès, connaît un pic de fréquentation et rend de précieux services aux apprentis ingénieurs.

À quelques mètres de l'entrée de l'épicerie, Axel (*) fait les cent pas, hésite, puis finit par se décider à franchir le cap. Le jeune étudiant, fils d'un papa ouvrier dans le bâtiment et d'une maman secrétaire médicale, se laisse convaincre pour la première fois par des achats à l'épicerie Entr'Ema, un petit local situé à l'entrée de la Maison des élèves. "Je m'étais toujours dit que je n'en avais pas besoin", expose Axel, du haut de son mètre quatre-vingt-dix. "Mais là je suis obligé car j'ai trop faim", lâche le jeune homme avec un rire qui traduit une forme de gêne.

Ce dernier consacre 120 à 130€ "maximum" par mois pour les courses alimentaires assorties de quelques produits d'hygiène. "Avant toutes ces hausses de prix, je m'en sortais très bien avec ça", reconnaît Axel. Véhiculé, l'apprenti ingénieur avait ses habitudes dans un supermarché situé sur la rocade-est alésienne auquel il réservait l'exclusivité de ses achats alimentaires. Mais, pour la toute première fois, l'étudiant finira le mois grâce aux aliments sortis à très bas prix de l'épicerie solidaire.

épicerie solidaire
L'épicerie solidaire de l'école des mines dépanne plusieurs centaines d'élèves. (Photo Corentin Migoule)

À l'école des Mines, combien sont-ils à s'accrocher à cette bouée de sauvetage ? "C'est difficile à dire", répond Laury Rottier. "On a enregistré 560 cotisants depuis l'ouverture en janvier 2021, mais certains ne viennent plus car ils ont quitté l'école. Ce que je peux dire, c'est qu'il y a beaucoup plus de monde qui vient par rapport à l'année dernière", analyse la nouvelle présidente d'Entr'Ema. L'épicerie solidaire, gérée par une quinzaine de bénévoles qui se succèdent, est ouverte deux jours par semaine (lundi de 18h30 à 20h et jeudi de 16h30 à 20h). 

Ce jeudi 26 janvier, à l'heure de notre venue, le petit local est en ébullition. Quelques minutes après l'ouverture, la file d'attente grossit au fil des minutes et d'aucuns attendent leur tour dehors dans le froid. "L'ouverture est toujours très attendue. On a beaucoup de monde qui arrive en début de créneau. Comme on n'est que deux à la caisse, c'est parfois un peu long, mais ça va, on s'en sort", sourit Laury Rottier. D'autant que le jeudi, c'est jour de livraison chez Entr'Ema qui recueille les denrées que lui fournit son partenaire de toujours : la Banque alimentaire.

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Laury Rottier (2e en partant de la gauche) préside l'Entr'Ema. (photo Corentin Migoule)

Ce soir-là, Lila, élève de l'IMT Mines Alès qui vit sur le campus, passera devant l'épicerie solidaire sans s'y arrêter : "C'est une épicerie solidaire donc je pars du principe qu'il ne faut pas en abuser. Ça doit favoriser ceux qui en ont vraiment besoin et je ne me classe pas dans cette catégorie, même s'il peut y avoir des périodes difficiles pour tout le monde", justifie la jeune femme. "J'essaie d'utiliser l'épicerie raisonnablement", développe la dernière nommée, qui situe sa fréquentation à hauteur d'"une fois par mois". "J'achète essentiellement des produits alimentaires, notamment du frais, même si les légumes et la viande ça part vite", confie Lila.

À raison d'une cotisation annuelle de 5€, les adhérents se voient remettre un tote-bag à l'effigie de l'association Entr'Ema et ont tout le loisir de le remplir de produits à bas coûts en respectant tout de même quelques consignes. "On limite parfois les quantités en fonction de nos stocks. Particulièrement pour les œufs, c'est six par personne !", prévient Laury Rottier. Chez Entr'Ema, en fonction de leur provenance ou de leur date de péremption, certains produits alimentaires sont même totalement gratuits. De sorte qu'avec seulement 4€, "on peut faire ses courses et tenir une semaine", d'après la présidente. 

"Certains viennent prendre un ou deux aliments, d'autres font des courses plus conséquentes. Le but, c'est que tout le monde puisse venir, quels que soient les revenus de la personne ou ceux de ses parents", résume Laury, qui a tout fait pour faciliter la vie des cotisants. En effet, plusieurs modes de paiement sont possibles chez Entr'Ema. Si les espèces sont acceptées, l'application Lyf, réputée pour sa simplicité, est très appréciée, tandis qu'un terminal de paiement électronique est également en fonction. 

Du bon pain fournit gratuitement

Aussi, pour garantir son anonymat, chaque cotisant se voit attribuer un numéro à trois chiffres qu'il indique à haute voix au moment de son passage en caisse. Deux ans après l'ouverture de l'épicerie solidaire, si la fréquentation est en considérable hausse, la communauté internationale de l'école constitue toujours la plus grosse proportion de la clientèle. "C'est plus facile pour les élèves étrangers de venir ici car on fait l'effort de parler anglais avec eux, et en plus, ils n'ont pas forcément de voiture pour se rendre en centre-ville ou sur la rocade", explique la présidente.

Celle-ci met en exergue la "solidarité" qui s'opère entre les différentes associations de l'IMT Mines Alès et plus généralement entre les élèves ingénieurs. "Lorsque des étudiants partent en stage ou en vacances, ils vident leur frigo et leurs placards pour nous amener leurs produits qui sont encore bons à consommer", apprécie Laury Rottier. Celle qui fait perdurer la belle initiative de la fondatrice, Marion Fuzet, regorge d'idées pour diversifier l'offre de l'épicerie et rendre service au plus grand nombre. "On a beaucoup de pâtes, de riz, des conserves, mais on essaie aussi de demander des produits pour le petit déjeuner, fait savoir la jeune femme. C'est assez important pour les étudiants de démarrer avec un repas dans le ventre et ça fait partie des choses que les gens ont peu l'habitude de donner."

Récemment, un partenariat avec la boulangerie alésienne Gueule de pain (relire ici) a aussi été scellé. "Le gérant va nous fournir ses invendus. Ce sont des produits qui seront totalement gratuits", annonce Laury Rottier, laquelle est aussi à l'origine de l'installation imminente d'un distributeur de boîtes de protections hygiéniques à proximité de l'épicerie. Pour beaucoup, les temps sont durs et les ingénieux élèves de l'École des Mines prouvent - s'il le fallait - que la solidarité n'est pas un vain mot entre les murs du campus.

* Prénom d'emprunt choisi par le témoin qui a décidé de rester anonyme.

Corentin Migoule

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