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Publié il y a 7 mois - Mise à jour le 07.04.2024 - Sacha Virga - 5 min  - vu 3385 fois

FAIT DU JOUR Sébastien Rath : l'étoile des Cévennes

Sébastien Rath

Sébastien Rath dans ses cuisines.

- Photo DR Alès Agglomération

Au détour d'un repas, le couple passionné et passionnant, Sébastien et Gwladys Rath du "Saint-Hilaire", nous a accueillis pour nous raconter son histoire. Celle d'un restaurant qui se veut toujours plus proche de ses clients et de son territoire, dans une démarche inspirante et innovante. Un projet tout récemment récompensé par une étoile au guide Michelin. Rencontre.

Le lundi 18 mars 2024, Sébastien Rath a vu un autre de ses rêves, devenir réalité. "Le Saint-Hilaire" a décroché sa première étoile au guide Michelin, fruit d'un dur labeur qu'il entreprend en compagnie de sa femme Gwladys et de toute son équipe, en salle comme en cuisine. Par la même occasion, le restaurant obtient l'étoile verte, symbole d'un engagement entier dans une démarche éco- responsable et un minutieux travail de sourcing. « Tout passionné qui vit avec l'envie de la perfection ne peut pas travailler sans l'idée d'avoir une étoile. C'est comme si vous étiez pilote et que vous ne vouliez pas faire un record de tour de circuit », compare le néo-chef étoilé.

Ouvert symboliquement pendant la feria d'Alès 2023, "Le Saint-Hilaire" était l'étape d'après pour Sébastien et Gwladys, ayant pris conscience des limites du restaurant "Le Riche Hôtel". L'établissement jouissait d'une forte réputation après avoir été "L'Auberge de Saint-Hilaire", le couple en avait bien conscience. Ainsi, le hall d'entrée est dans son jus, la partie extérieure a été réhabilitée avec un parking aux larges places, de l'enrochement et un petit coin cueillette cher au chef. Une appropriation des lieux sans pour autant y enlever ses lettres de noblesse.

Les anciens employés, le lustre et de nombreux meubles du Riche Hôtel ont fait le déménagement dans ce nouvel écrin de Saint-Hilaire-de-Brethmas. La salle de restauration a retrouvé une seconde jeunesse : « On a essayé de rendre le lieu chic et cosy pour que les gens s'y sentent bien, que ça ne fasse pas trop sophistiqué, en faisant attention aux moindres détails », commente Gwladys Rath. Par la pose de moquette et la présence de rideaux, le côté acoustique a été repensé pour proposer une expérience plus agréable. Un espace destiné aux repas de groupe et aux séminaires s'est créé au fond de la salle, avec un vidéo-projecteur et un écran, pour séparer les grosses tables.

CUISINE GÉNÉREUSE ET CODE CULINAIRE

Quand on franchit la porte du 5 rue André Schenk, c'est un peu comme si on se laissait porter au gré du vent. Le restaurant propose deux menus, en cinq ou neuf services (72 € et 110 €), qui peuvent changer à n'importe quelle saison, à n'importe quel moment, puisqu'il n'y a pas de description précise. Mise en bouche, plat viande, dessert, mignardises... Les bases sont là, la forme est multiple : « Aujourd'hui si l'énergie est avec moi, je peux tous les deux jours changer tout mon menu », explique Sébastien Rath. « Parfois, avec les mêmes ingrédients, je suis capable de porter d'autres sensations. Ça permet de pouvoir réinterpréter en permanence, même si on reste dans un cadre de saison avec des produits du moment », continue-t-il.

Ne pas avoir de carte permet aussi à Sébastien de faire preuve d'improvisation, surtout quand le client a des contraintes alimentaires : « Il est très fort sur ça et c'est un peu le jeu. Ce qui est chouette aussi, c'est que les gens se laissent aller et sortent de leur zone de confort. » Ils nous disent : « Si on avait une carte, on serait allés vers des produits que l'on connait. Sur cette confiance là, on se doit d'être irréprochable », précise Gwladys. Assis à table, on sait sans savoir ce que l'on va avoir dans l'assiette.

En préambule, nous décidons d'opter pour un verre de vin rouge, originaire de Saint-Mamert-du-Gard. Pendant le repas, nous avons pu nous familiariser avec plusieurs textures et saveurs, le croquant d'un pain au levain fait maison, la douceur d'un beurre fumé au charbon végétal, la tendresse d'une viande cuite à souhait ou encore la fraîcheur d'un dessert, ponctué d'une particularité dont on ne vous révèlera pas le secret pour garder une part de mystère.

« Merci du fond du coeur, c'était un chouette moment », entendait-on sur place, de la part d'une table se dirigeant vers la sortie après avoir réglé la note. Très sensible à sa clientèle, Sébastien Rath s'enrichit des retours qui lui sont faits. Prenant soin d'aller remercier chacun des clients à la fin de leur repas, ces échanges lui permettent d'entretenir son côté perfectionniste, parfois son ennemi parce qu'il ne se contente jamais de ce qu'il a. Très attaché au code couleur de son assiette et sa cuisine "chauvine", Sébastien Rath veut créer une forme de séduction pour les yeux avant le coup de fourchette.

L'une des raisons pour laquelle "Le Saint-Hilaire" détient l'étoile verte, c'est sa capacité à travailler avec les acteurs locaux quelle que soit la saison. L'intérêt est que le producteur ne donne pas le produit quand il n'est pas prêt, pour trouver sa bonne maturité. « Depuis que les gens savent que l'on a pas de carte, ça a ouvert le champ des possibles pour les tout-petits producteurs qui parfois ne viennent que deux fois dans l'année se présenter à moi », déclare Sébastien Rath. De Mialet, Nîmes, Le Grau-du-Roi, Alès, en passant par Vézénobres ou la Lozère, un grand périmètre local est défini pour la provenance des produits.

MICHEL KAYSER ET LE FUTUR DU COUPLE RATH

Lors d'une rencontre l'année dernière, Sébastien Rath avait évoqué son rêve de servir le chef doublement étoilé Michel Kayser, un mentor pour lui. « C'est pour moi un Dieu vivant, avec toute une âme, un charisme, une humilité et un professionnalisme qui ne sont plus à discuter aujourd'hui », dévoilait-t-il avant de fermer le Riche Hôtel. Ce souhait est devenu réalité, lorsqu'il prend place à l'une des tables du "Saint-Hilaire" le vendredi 8 mars dernier.

« Michel Kayser nous a connus très jeune, il nous a vus à notre départ. Il y a tout un chemin qui a été franchi, et je suis tellement heureux de l'avoir servi », commente le néo-chef étoilé. Malgré l'obtention de l'étoile, l'installation du couple Rath au sein du restaurant "Le Saint-Hilaire" ne pourrait être qu'éphémère. Sébastien et Gwladys ont toujours en tête leur projet insolite d'installer un établissement gastronomique avec vue panoramique au pied de l'Ermitage, point culminant de la capitale des Cévennes.

« On redimensionne le projet mais on ne le perd pas de vue. C'est un projet de vie, si je le mets en place je ne pourrais pas faire chemin arrière », affirme Sébastien. « On fait bien les choses parce qu'on veut garder l'environnement tel qu'il est, se noyer dans ce côté forêt et bien sûr comme nous sommes en France il y a des démarches », ajoute son épouse. Prudence est mère de sûreté. En attendant si vous vous rendez au "Saint-Hilaire", renseignez- vous et écoutez-bien, il se pourrait qu'on vous emmène dans un endroit surprise, en plein milieu de votre repas.

Sacha Virga

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