GARD Taux de TVA dans les centres équestres : "Combien de nos cavaliers vont pouvoir continuer ?"
Ce lundi après-midi, les gérants de centres équestres du Vaucluse et du Gard ont laissé un temps leur cavalerie pour se donner rendez-vous à l'île Piot à Avignon. Ils ont marché jusqu'à la préfecture. La raison ? Ils veulent un taux de TVA harmonisé à 5,5 %.
La grande majorité des centres équestres et poney-clubs français sont des entreprises privées. Les gérants sont donc assujettis à la TVA. En 2014, l'État a dû se conformer à la législation européenne et a dû revoir les taux applicables à la filière équine. Depuis les structures équestres se soumettent à un régime de TVA "complexe et fragile du point de vue juridique", soulignent la Fédération française d'équitation (FFE) et le syndicat Groupement hippique national (GHN). L'enseignement de l'équitation sportive est taxé à 20 % tandis que l'utilisation des installations sportives et l'équitation scolaire est à 5,5 %.
Le 22 avril dernier, la Directive TVA a été révisée et "la France a l'opportunité de sécuriser le dispositif mis en place fin 2013". La filière veut le retour d'un seul taux à 5,5 % ce qui "sécuriser(ait) juridiquement les établissements équestres". Dans le flou pour l'heure, beaucoup de propriétaires de centres équestres et poney-clubs craignent a contrario un passage global définitif à un taux de TVA de 20 %. L'inquiétude est partagée par Ingrid, à la tête du Haras de Balouvière à Laudun-L'Ardoise depuis 15 ans, et par Audrey, propriétaire du centre équestre de Saint-Anthelme à Pujaut depuis 2009. La première compte une cinquantaine de chevaux dans sa structure, la seconde près de 90.
"À l'inverse des autres sports, c'est 7/7 jours"
Toutes deux souhaitent ardemment que le taux de TVA global repasse à 5,5 %, comme avant. D'autant que le contexte inflationniste fragilise déjà la situation des centres équestres : "On subit nous aussi les augmentations. Le prix du gasoil en hausse se répercute sur le coût des livraisons de foin (qui fait une mauvaise récolte à cause de la sécheresse cette année, NDLR). Dans mon cas, le foin a pris presque 100 € de plus la tonne. Les granulés, qu'on donne à manger aux chevaux et qui proviennent majoritairement d'Ukraine, ont aussi augmenté de 20 % peut-être... Sans compter qu'avec la nuit qui tombe tôt, on doit éclairer la carrière pour donner des cours le soir. On va bientôt recevoir la facture d'électricité aussi en hausse", listent les deux femmes.
Un taux de TVA à 20 % serait le coup de grâce. Audrey témoigne : "Il devient difficile de continuer à entretenir et développer correctement nos centres. (...) Quand le cours est fini, on ne se dit pas juste "À la semaine prochaine". À l'inverse des autres sports, c'est 7/7 jours et les poneys mangent même s'ils ne travaillent pas. C'est un métier dur, qui prend beaucoup d'énergie, de temps avec des marges déjà faibles."
"On est en train de transformer l'équitation en sport élitiste"
Pourtant l'équitation figure parmi les sports les plus pratiqués en France et compte 700 000 licenciés. Mais si le taux de TVA basculait à 20 %, beaucoup de propriétaires songent à augmenter les tarifs. C'est le cas de Marilyn et Perig, propriétaires depuis septembre du Haras du Nizon à Saint-Laurent-des-Arbres : "On pratique des prix abordables pour le plus grand nombre de gens. Mais si la TVA augmente, on va être obligé de le répercuter sur les licenciés. Actuellement, l'heure de cours est à 23 €, il faudrait au moins augmenter à 26 €. On réfléchit encore", lâchent-ils.
Tous ont à coeur de faire passer le bien-être de leur cavalerie avant tout et de pouvoir nourrir correctement et suffisamment. La Laudunoise Ingrid poursuit : "Cela fait trente ans que je fais ce métier et ce serait une grande réflexion. On n'est plus des agriculteurs mais des gestionnaires. Et l'équilibre est de plus en plus difficile à trouver. Si la TVA passait à 20 %, je devrais probablement réduire ma cavalerie et ne prendre plus qu'une apprentie au lieu de deux."
Elle aussi craint que la hausse des tarifs fasse fuir certains cavaliers : "Combien de nos clients vont pouvoir continuer ? Aujourd'hui, certaines familles se saignent déjà pour payer le poney à leur enfant. On est en train de transformer l'équitation en sport élitiste alors qu'on essaie de le démocratiser depuis des années. On repart en arrière." Pourtant "40 % des scolaires sont déjà passés dans un centre équestre. Au-delà du sport, nos structures ont un rôle social et d'inclusion", tonne Marie Moya du Groupe hippique national (GHR). Le syndicat a appelé à une manifestation nationale le 8 décembre à Paris.