ALÈS Le Parti socialiste critique la gestion de l'eau de l'Agglo et réclame des mesures "incitatives"
À l'initiative de la section alésienne du Parti socialiste, une conférence de presse était organisée ce vendredi matin dans une brasserie de la ville d'Alès. La situation de l’agglomération d’Alès en matière de gestion de l’eau et d'assainissement était notamment questionnée. Le PS milite ainsi pour le déploiement de mesures "incitatives".
Il y a quelques mois, en novembre dernier, la section alésienne avait remis en question la gestion locale des déchets à l'occasion d'une conférence de presse. Depuis une brasserie alésienne, elle en a fait de même ce vendredi avec celle relative à l'eau et l'assainissement. Face aux médias, le trio formé par l'hydrogéologue Bernard Vayssade, le conseiller municipal d'opposition Arnaud Bord, et la secrétaire de la section PS d'Alès Christiane Thomas.
"Les pluies tombées ces dernières semaines ne doivent pas nous abuser", avait esquissé la section en guise de préambule. Et si l'alerte renforcée sécheresse prononcée par la préfecture du Gard pour la capitale des Cévennes en mai dernier a été partiellement allégée le 16 juin dernier, la situation du bassin d'Alès reste "alarmante" aux yeux des socialistes alésiens à l'heure où l'été ne fait que commencer. "L’an dernier, l’eau n’arrivait plus à certains robinets de plusieurs communes de France. Ça n’était jamais arrivé !", rejoue Arnaud Bord.
"L’eau est une ressource limitée, vitale. La question de sa gestion revêt un enjeu crucial", a exposé en premier lieu Christiane Thomas, chargée par ses deux comparses de planter le décor. Or les récentes pluies offrant "un repos appréciable" n'auraient pas été suffisantes pour "reconstituer les réserves". Ainsi, "une réflexion de fond nous paraît essentielle en matière de gestion de l'eau", a posé la secrétaire de section.
Laquelle attend beaucoup de la déclinaison locale du plan gouvernemental de sobriété présenté fin mars, articulé autour de trois axes prioritaires que sont l'accentuation de l'économie de l'eau, la lutte contre les fuites et l'amélioration de la gouvernance de la gestion de l'eau avec la mise en place d'une tarification adaptée. De tarification il a été question avec Bernard Vayssade, ancien enseignant hydrogéologue à l'école des Mines, qui avait fait le déplacement avec quelques chiffres et des graphiques illustrateurs.
Si à Alès le prix de l’eau potable au m³ est plus bas (1,89€) que la moyenne Rhône Méditerranée Corse (1,99€), tout en étant aussi inférieur à la moyenne des villes comprenant entre 10 000 et 50 000 habitants (2,24€), le niveau de rendement est moins bon pour la capitale des Cévennes (63%) que pour ces dernières (79%). "Le rendement est vraiment mauvais à Alès", enfonce même Bernard Vayssade, attribuant cette "contre-performance" aux pertes générées par les fuites, entre autres.
Vers une tarification "incitative et vertueuse" ?
D'autres chiffres tirés de l'Observatoire des services d'eau et d'assainissement de 2020 invitent les socialistes alésiens à la comparaison avec Montpellier et son maire PS Michaël Delafosse. À Montpellier, si le prix de l'eau pour 120 m³ consommés (99,75€) est inférieur à celui d'Alès (125€), il augmente plus vite pour les gros consommateurs au point de passer nettement au dessus de la courbe alésienne. Il s'établit ainsi à 429,5€ pour 300 m³ consommés, contre 313€ pour la même consommation à Alès.
Cette "progressivité" de la tarification selon laquelle "plus on consomme, plus on paye" dans la cité héraultaise serait à prendre pour modèle à Alès où "on ne réfléchit pas", puisque "la courbe est une ligne droite". En effet, s'il se dégage aisément de tout rapprochement avec une éventuelle tarification "punitive" dont on a déjà vu "les ravages", Arnaud Bord tend volontiers vers l'application d'une tarification "incitative et vertueuse". Une démarche soutenue par Bernard Vayssade : "Si le prix de l’eau doit augmenter, il ne doit pas augmenter de la même manière pour tous les publics."
Car le Parti socialiste ne se leurre pas en indiquant que sur le bassin d'Alès comme ailleurs, "les plus aisés qui arrosent fréquemment leur jardin et ont une piscine", ainsi que "les entreprises", sont les plus gros consommateurs d'eau. Alors, pour illustrer son idéal de tarification "incitative", l'élu d'opposition y est allé de son exemple : "On pourrait proposer des chèques de 20 ou 30 euros à l’achat d’une bassine pour capter les eaux de pluie chez soi !"
"L’Agglo a eu tendance à mettre un peu la poussière sous le tapis"
Revenons-en au prix de l'eau. Pourquoi est-il amené à être multiplié par deux d'ici 10 ans alors qu'une augmentation de l'ordre de "20% a déjà été observée entre 2019 et 2021" ? À Alès, "c’est soi-disant inévitable du fait des travaux de modernisation des réseaux", indique Christiane Thomas. En effet, pour répondre à la vétusté de ses installations et à des normes de plus en plus strictes en la matière, l'agglomération a lancé en 2021 son grand plan baptisé Alès Aggl'eau, lequel vise à investir près de 20M€ par an jusqu'en 2030 pour remettre en état les réseaux et les équipements.
Trop tard selon Christiane Thomas. "La municipalité actuelle serait en place depuis 2020, ça pourrait se comprendre. Comment se fait-il que le réveil soit aussi brutal et récent ?", s'interroge la dernière nommée. Arnaud Bord pense avoir la réponse. "Traiter de l’eau et de l’assainissement dans les communes, ce n’est pas populaire. Ça coûte cher et ça crée de la gêne chez les habitants. Engager un décaissement du boulevard Louis Blanc où les réseaux sont très anciens, ça embêterait les commerçants, les automobilistes, potentiellement on ne pourrait pas faire de Feria. Je comprends que c'est compliqué. Mais il le faut ! Or depuis 30 ans, l’Agglo a eu tendance à mettre un peu la poussière sous le tapis", décroche sans ambages l'élu d'opposition.
À cet argument lié à la supposée impopularité d'une telle démarche s'ajoute le contexte local, celui de l'existence, "notamment en centre-ville", d'un réseau unitaire de traitement de l'eau. "Il faudrait du séparatif pour éviter d'engorger inutilement les stations qui se retrouvent à traiter de l'eau propre qui pourrait aller directement au Gardon et au Rhône", échafaude Arnaud Bord. Aussi, tandis que la Grand'rue Jean Moulin est en passe d'être métamorphosée dans le cadre de l'Anru (rénovation urbaine), "c’est peut-être le moment d’aller voir ce qu’il se passe en dessous et de vérifier l’état des réseaux", suggère le dernier nommé, lequel milite pour "qu’on lie vraiment les projets d’aménagement et la réfection de l’assainissement".
Le PS milite pour "plus de transparence"
Il l'admet sans difficulté, bien qu'elle a été à ses yeux impulsée "sous la contrainte", celle relative au sous-dimensionnement de la station d’épuration qui a un temps fait plâner l’interdiction potentielle d’urbaniser autour d’Alès, la création de la régie des eaux (REAAL) est "un bon premier pas". "Il faudra maintenant aller au bout des choses en se posant la question d’une régie globale", théorise Arnaud Bord. L'ancien candidat Nupes aux Législatives sur la 4e circonscription réclame également "plus de transparence" de la collectivité en ce qui a trait à son plan Alès Aggl'eau.
"C’est quand même plus de 100 000 millions d’euros. Ce n’est pas une paille ! Les habitants doivent être au courant de ce qui va se faire", estime le dernier nommé. À mi-mandat, cette conférence de presse était aussi l'occasion pour le membre du Printemps alésien de répondre à des questions "éminemment politiques". Interrogé au sujet du projet de construction de deux piscines intercommunales - une au nord et une au sud de l'Agglo -, Arnaud Bord valide : "Si ça peut limiter la construction de piscines individuelles, ça peut être une bonne chose. Il faut aussi offrir des îlots de fraîcheur aux habitants à l’heure où nos rivières se déssèchent."
"On arrivera avec des propositions concrètes"
C'est notamment le cas de la Cèze, fréquemment à sec l'été. Un projet de construction d'une bassine de 600 000 m³ est d'ailleurs à l'étude à Rochegude. S'il fait craindre au collectif Eaux à gué un ajustement par du pompage dans la nappe en cas d'extrême sécheresse, Arnaud Bord s'en fait une autre interprétation : "À Rochegude, on n’est pas sur les mêmes méga-bassines du Poitou ! On est plus dans l’idée que quand l’eau passe en fort débit dans la Cèze, on doit être en capacité de la capter. D'autant que l’eau de crue ne pénètre pas ou peu dans les nappes. L’idée des agriculteurs là-bas, c’est juste d’augmenter la capacité de pompage quand la Cèze est en crue. Aujourd’hui on est frileux car on mélange tout !"
À l'heure de conclure, Christiane Thomas regrettait le désintérêt des élus en matière de problématiques liées à l'eau. "Trop souvent, ils s’investissent insuffisamment alors que le sujet est éminemment politique. Il existe des choix politiquement de Gauche sur ces questions là", promet la secrétaire de section. Avec de la suite dans les idées, son acolyte Arnaud Bord a prévenu : "En 2026, je peux vous garantir qu’on arrivera avec des propositions concrètes pour les habitants, car être dans une opposition systématique sans faire de propositions, ça ne marche plus !"