NÎMES EN FERIA Encore Tomas Rufo !
Corrida de Victoriano del Río pour Sébastien Castella (oreille et vuelta) Emilio de Justo (silence et silence) et Tomás Rufo (deux oreilles et oreille).
Attention, cartelazo ! Nous sommes dimanche soir et cette course, placée au cœur de la feria, promettait monts et merveilles aux aficionados. Une course dont les toros assurent habituellement le triomphe des piétons et des piétons qui sont en bonne forme. Les toros n’auront pas été de fins collaborateurs et les piétons ont connu de meilleurs moments à l’épée.
Deuxième paseo pour Sébastien Castella. Le Biterrois ne surjoue pas, il avance pas à pas et se dévoile. Grand il est, grand il reste. Mais son Victoriano ne le sera pas. Sans classe sa charge est fade et Castella ne pourra rien y faire. Il essaiera bien, en parfait professionnel qu’il est, de bricoler avec ses trucs et astuces mais le toro se décompose peu à peu et la muleta ne passe plus, sauf à gauche où le maestro semble prendre du plaisir. Une entière que l’on croit concluante, les subalternes font bien trop tourner le toro pour faire jouer la lame, personne ne dit rien, les étagères grondent de plus en plus. Castella met du temps à prendre le descabello et encore plus à s’en servir ce qui irrite l’assemblée qui pétitionne un tantinet pour une oreille qu’il obtiendra du palco tenu par Frédéric Pastor.
Dernier et quatrième toro de sa feria, Castella aborde son Victoriano du bon côté et les tendidos le remarquent. Comme la veille, on sent que le Biterrois est revenu pour sortir à nouveau en triomphe mais cela ne se fera pas. Pas cette fois. Pourtant il avait enfin mis toutes les chances de son côté pour y parvenir en se liant avec son toro pour offrir aux gradins une faena équilibrée, sérieuse, calme, posée, simple, douce, en parfaite adéquation avec la musique jouée par l’orchestre des arènes Chicuelo II. Sous le charme, on se prend à rêver, le public commence à y croire mais l’épée lui ôtera cet espoir déçu. Pas d’oreille, immense déception pour Castella qui a mis du temps à sortir du burladero pour entamer une vuelta méritée.
Au tour d’Emilio de Justo. Le natif de Cáceres retrouve peu à peu la forme qu’on lui a connu. Certes, ce n’est pas le maestro le plus élégant, le plus doué, le plus technique, le plus brave, le plus… Mais c’est un torero que l’on aime retrouver au centre du ruedo car il est l’un des plus généreux ! Il tombera sur un toro peu malléable, en tout cas pas facile à comprendre bien que très noble avec un fond d’encaste. Pas d’alchimie possible, les deux adversaires ne se comprennent pas et l’Espagnol subit une débâcle à l’épée. Silence.
Pour ne pas l’oublier, rappelons juste qu’Emilio de Justo a coupé 83 oreilles et une queue après avoir participé à 50 courses en 2023. Il repartir de Nîmes sans rien dans sa besace. Pourtant et même si son premier duel n’avait pas tourné assez rond, Emilio de Justo met les chances de son côté et les bouchées doubles. Enfin on l’aura revu créer une faena de magie, notamment à gauche où il canalise la charge variable de son opposant. Il tire, il allonge les passes, il baisse la main, il se met dans les bons terrains et n’hésite pas à en changer. Ses manoletinas auront sans aucun doute séduit mais c’est hélas aux aciers que le maestro perdra tout. Dommage… Silence.
Enfin, comment oublier Tomás Rufo ? Quel torero ! Il l’a démontré, encore une fois à Nîmes en 2023 où il a coupé les deux oreilles d’un de ses opposants lors de l’alternative de Solal. Rebelote pour son premier duel… Quand Rufo passe, les autres trépasse ! Encore deux oreilles et pas grand-chose à dire de plus tant ces deux trophées sont logiques. Il faut dire qu’il décroche le meilleur toro de la tarde, le plus brave, celui qui a la charge la plus émouvante et celui qui ne baisse pas constamment la tête. Face à) lui, l’homme a construit un faenon, série après série, passe après passe, naturelle de face après naturelle de face. Aucune faute de style, pas de faute de goût, sans vulgarité ni gémissements, Rufo s’en est allé chercher son triomphe avec la plus belle des armes, son cœur. Les tendidos ont vite compris qu’ils tenaient ici un des futurs noms des arènes de Nîmes qui deviennent sans doute des arènes talisman pour Tomas Rufo. Le toro sera quant à lui honoré d’une belle vuelta al ruedo et donc deux oreilles pour le piéton.
Natif de Resino (Tolède), Tomás Rufo est en acier trempé. Corps et mental sont durs comme le métal. Son second toro donne de sales coups de tête et a une charge complexe à maîtriser mais le maestro le reçoit les genoux vissés en terre. Tomas Rufo sait qu’il n’a besoin que d’une oreille supplémentaire pour sortir par la Porte des Consuls et autant vous dire qu’il est le seul de la tarde à avoir la capacité de le faire. Alors ? Alors il l’a fait pardi ! Pourtant avec et opposant rien n’était gagné… Et même l’épée s’y met, deux envois mais le public n’est pas chafouin, il pétitionnera sans fourberie aucune. Retour en arrière sur une faena déstructurée qui eut peu d’impact sur les gradins mais au cours de laquelle le jeune a encore montré d’autres qualités comme la pugnacité et la sérénité en toute circonstance. Une oreille, celle de la valeur, olé !