ARLES EN TOROS Une oreille chacun et des toros un peu en dessous
Corrida Victoriano del Rio pour Daniel Luque (oreille et silence), Emilio de Justo (vuelta et oreille) et Juan Leal (oreille et silence).
Les Victoriano del Rio assurent les succès mais encore faut-il se mettre devant. Daniel Luque, dont le directeur des arènes Jean-Baptiste Jalabert s’occupe depuis peu, a réalisé une temporada 2022 plus que bonne et régulière. Emilio de Justo a su encaisser la saison qui l’avait propulsé parmi les plus visibles. Juan Leal, lui, continue son chemin et se fait un nom. La course du jour était aussi taillée pour lui. De tous les acteurs, la défaillance est venue du bétail.
Daniel Luque débute et se remémore les bons souvenirs qu’il a connu dans ces arènes. Ici, l’Espagnol est sorti quelques fois en triomphe et autant dire que le public arlésien l’apprécie. Premier en piste, un exemplaire portant le fer de Cortès, un toro plus qu’intéressant, peut-être le meilleur de la tarde. Luque ne le laisse pas passer. Il s’y colle d’emblée et fait voir les qualités de bravo de ce toro. Toujours à son aise quand il a les trastos, Luque trouve facilement le point de bascule. Avec lu, peu de situations demeurent incomprises. Il finit comme souvent avec ses luquecinas.
Sur son second, le natif de Gerena, nous fera mentir. Il tombe sur un toro violent mais avec un fond de vice. Pas grand-chose à faire si ce n’est faire n’importe et ça, ce n’est pas dans l’ADN du maestro qui abrège le duel.
Emilio de Justo touchait quant à lui un premier toro qui ressemblait beaucoup au deuxième de Luque, en tout cas qui avait les mêmes mauvaises manières. Emilio de Justo ne se démonte jamais et fait montre de savoir-faire et de patience. Il sait qu’il va ouvrir une brèche et que le public va le suivre. Il parvient à ses fins sur la gauche et calme les assauts du toro. Le public qui n’y croyait plus lui demande de faire un tour de piste. Pas d’oreille mais une vuelta, parfois, cela a plus de sens et de valeur.
Né à Caceres il y a tout juste 40 ans, Emilio de Justo va enfin couper son oreille arlésienne à l’issue de son second duel. C’est dans ce genre de situation que l’on se rend compte de la force mentale qu’il faut pour se mettre devant ce genre de bestiau. Même le cheval, Ulysse, de chez Bonijol, en fera les frais et chutera lourdement sans blessure apparente. De Justo est sûr de lui, autoritaire sans être vulgaire, il appuie chacune de ses passes et arrive à lier le tout dans un beau papier cadeau. Deux épées et une entière, une oreille.
Juan Leal est un peu ici chez lui, il y est pleinement d’ailleurs ! Son nom, son enfance et le reste. Il coupera une belle oreille grâce à son assiduité et son pouvoir de persuasion sur le toro et le public. Comme à son habitude, l’aficionado qui vient le voir toréer en a pour ses frais. Avec Juan Leal, on mange du courage et on boit de la bravoure en barre. Avec Juan Leal, il y a évidemment de l’émotion, du drame, du rire et parfois des larmes. Il se rapproche petit à petit, entre dans des terrains spectaculaires et continue son travail de sape. Une oreille de poids.
Dernier toro de la course et Juan Leal doit s’arrimer encore et toujours pour triompher. Hélas, la mort, le descabello, lui portera préjudice. Son toro, moins pesant que les précédents, ne marque pas les gradins et refroidit même l’assemblée. Juan Leal y met du sien mais il ne peut pas faire des miracles. Descabello en main il perd tous ses moyens, redevient humain et fend la carapace. Déception logique mais rien à redire sur son investissement et son concept. D’autres triomphes viendront !