FAIT DU SOIR Agroof, fer de lance de l’agroforesterie partout en France
La société basée à Boisset-et-Gaujac mène de front formation, recherche et suivi de projets.
Spécialisée dans l’étude et le développement des systèmes agroforestiers, la société Agroof, implantée à Boisset-et-Gaujac, près d’Anduze, est devenue, en quelques années, un acteur incontournable de la reforestation des terres agricoles en France, à travers notamment son programme de parrainage d’arbres baptisé "20 000 pieds sur la terre" initié en 2020. Mais cette société, qui fonctionne sur le principe d’une Société coopérative et participative (Scop), parce que « penser différemment commence peut-être par travailler différemment », possède plusieurs cordes à son arc. Certes, elle accompagne les projets forestiers, mais elle réalise également des formations et mène des travaux de recherche et de développement en partenariat avec des organismes de recherche, des organismes techniques et des agriculteurs. C’est d’ailleurs cette branche recherche et développement qui a donné naissance en 2001 à la société, et cela grâce à la volonté de Fabien Liagre, spécialiste des systèmes agroforestiers historiques ou traditionnels, en France.
Projets environnementaux d’envergure
« Agroof contribue au développement de l’agroforesterie pensé comme un mode de production soutenable des points de vue agronomiques, économiques et environnementaux », explique Virginie Sanfelieu, responsable partenariat et animations au sein de la société. En 2004, Agroof, qui a pris ses quartiers à Anduze, initie et coordonne un programme national de développement de l’agroforesterie dans le cadre d'un appel à projets initié par la mission CASDAR* du ministère de l'Agriculture. La société gardoise en profite, cette même année, pour cofonder l’Association française d'agroforesterie. « Agroof est l’une des toutes premières structures spécialisées dans l’agroforesterie en France mais également en Europe. » Au cours des années qui vont suivre, Agroof prendra en charge la coordination de plusieurs projets environnementaux d’envergure nationale.
En 2014, les dirigeants décident de créer une branche formation. Celle-ci s’adresse à tous les publics intéressés par l’agroforesterie, scolaires et professionnels. « Nous sommes certifiés Qualiopi et formons des agriculteurs, étudiants et futurs conseillers agricoles, précise Virginie Sanfelieu. Nous mobilisons dans nos formations toutes les connaissances acquises grâce aux projets de recherches et à l’ingénierie de projet. » Trois ans plus tard, Agroof devient le premier organisme de formation en agroforesterie en France et s’associe avec Matthieu Archambeaud et Arnaud Richard pour fonder Icosystème, une entreprise dédiée à la formation agricole en agroécologie liée à l’innovation numérique. Depuis bientôt cinq ans, Agroof développe une plateforme de formation à distance consacrée à l'agroforesterie et à la haie en collaboration avec l’Association française arbres champêtres et agroforesteries (Afac) et la Bergerie nationale. Notons que la société gardoise est à l’origine également de la création de l’École française d’agroforesterie dont l’objectif est de former la nouvelle génération afin qu’elle devienne un accélérateur de la transition agroforestière.
Douze ans après la création d’Agroof, les salariés ont décidé de faire de la structure une Société coopérative et participative au sein de laquelle ils sont appelés à devenir associés autour d’un même projet. « Nous avons une organisation horizontale, décrit Virginie Sanfelieu. Les décisions qui sont prises doivent convenir à tous. Elles ne reposent pas sur un pouvoir issu d’une hiérarchie, mais plutôt sur une compétence et une expertise au sein d’un collectif. » Par ailleurs, il a été mis en place une équité des salaires ainsi qu’une liberté d’organisation du travail. Aujourd’hui, la Scop compte douze salariés et « bientôt treize » parmi lesquels onze sont des salariés associés.
Collaboration avec le monde agricole
La recherche reste le maître mot de la société. Elle en est d’ailleurs l’une des racines et sans doute la plus profonde. Car il faut rappeler que, dès sa première année de création, Agroof a été missionnée par l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture afin de mener des études dans le cadre du programme de recherche européen Safe coordonné par l'Inrae. « La recherche permet d’acquérir des connaissances sur les systèmes agroforestiers, lever des verrous techniques et imaginer des pratiques agroforestières plus adaptées à nos contextes pédoclimatiques, affirme Virginie Sanfelieu. Nous collaborons ainsi avec des chercheurs et des agriculteurs. » En effet, les équipes gardoises développent des projets incluant les agriculteurs dans les étapes de construction, réalisation et analyses des résultats de recherches. La recherche, avec ses nombreux retours d’expériences réalisées au fil des années, a permis de développer l’activité d’ingénierie de projets qui consiste à accompagner des agriculteurs, collectivités, particuliers ou organismes techniques et de la recherche dans la création de projets agroforestiers. « Aujourd’hui, nous travaillons essentiellement avec le monde agricole. Nous dessinons ensemble un projet, nous choisissons ensuite les essences d’arbres et nous formons à la plantation. » Dans le même temps, Agroof a la capacité de mobiliser pour le client des fonds d’aides, notamment au niveau régional.
Forte de son expérience, la société Agroof a acquis, il y a quelques mois, sous forme de bail emphytéotique, les Terres de Roumassouze à Vézénobres sur lesquelles est cultivé, notamment, du maraîchage de plein champ en agriculture biologique et qui accueille depuis 1996 un peuplement arboré. « Nous avons signé un partenariat avec Terres de liens propriétaire de l'exploitation », ajoute Virginie Sanfelieu qui rappelle que « de 2014 à 2020, le lieu a servi également de site pilote d’un projet multi-partenarial baptisé Arbratatouille. A présent, les 11 hectares de terrain permettent de tester de nouvelles cultures, tout en servant de vitrine afin de montrer au public notre savoir-faire. »
Reconnue depuis plusieurs années maintenant comme un outil majeur pour des systèmes agricoles plus résilients et écologiques, l’agroforesterie est considérée par beaucoup comme un pilier pour l’avenir de l’agriculture en France et en Europe. Et d’ailleurs, si on en croit les dirigeants d’Agroof, « face aux aléas climatiques, la pratique de gestion des terres agricoles basée sur l’agroforesterie va devenir indispensable pour nos systèmes alimentaires ».
Parrainage
20 000 pieds sur terre
Initiée par Agroof en 2020, cette opération a pour but de favoriser le développement de l’agroforesterie par le parrainage d’arbres. « Nous sélectionnons les arbres parmi les variétés locales. Des experts suivent leur évolution et mènent des programmes de recherches associés », indique Virginie Sanfelieu. A ce jour, une centaine d’entreprises agricoles a déjà participé à ce parrainage qui a permis de planter 15 000 arbres.
* Le CASDAR ou compte d'affectation spécial « Développement agricole et rural », est un levier pour accompagner la transition agro-écologique de l’agriculture française. Il permet de financer des actions relevant du Programme national de développement agricole et rural, le PNDAR.