FAIT DU JOUR Il y a 60 ans, -17,5° à Nîmes, le Gard frigorifié
Lors de l’hiver 1962-1963, l’Europe affronte une vague de froid d’une rare intensité. Le Gard n’y échappe pas et, au début du mois de février, les températures glaciales conjuguées à la neige et au vent paralysent les villes et campagnes. Retour sur les jours où le Gard avait des airs de Sibérie.
Si lors des dernières semaines, il vous est arrivé de vous plaindre du froid dans le Gard, les lignes qui vont suivre pourraient vous permettre de relativiser. L’histoire nous emmène en 1963. Ce bond dans le temps de six décennies rappelle que les Gardois de l’époque ont dû affronter des conditions particulièrement glaciales. Cette année-là, l’hiver est même le plus froid enregistré dans l’hexagone. La température moyenne est de 0,7° de décembre 1962 à février 1963*. Mais revenons-en à nos moutons, ou plutôt à nos flocons.
« C’est la seule fois où il n’est pas sorti. Il faisait tellement froid ! »
« Je me souviens du froid cet hiver-là. J’étais étudiante et le lycée Camargue (lycée Ernest-Hemingway depuis 2006, NDLR) avait fermé. Nous n’avions pas cours », se souvient Michèle qui était adolescente en 1963. Et la Nîmoise se rappelle d'un détail qui révèle le coté exceptionnel de la situation : « Mon grand père avait pour habitude de sortir à l’angle de la rue Traversière et de la rue des Tilleuls pour fumer sa cigarette. Eh bien là, c’est la seule fois où il n’est pas sorti. Il faisait tellement froid ! » Il y a 60 ans, au début du mois de février, cela fait plusieurs semaines que les Gardois, comme tous les européens, grelotent.
Au froid se rajoutent la neige et un vent violent
Plus que jamais, la météo est le principal sujet de conversation. On attend le redoux salvateur qui, tel Grouchy à Waterloo, n’arrive pas. Mais la situation glaciale atteint son paroxysme dans la nuit du samedi 2 au dimanche 3 février. Alors que les Gardois trouvent le sommeil emmitouflés sous les couvertures, à l’extérieur les éléments se déchaînent. Au froid, se rajoutent la neige et un vent violent. Quand vient la victoire du jour sur la nuit, les Nîmois, les Alésiens, les Bagnolais et tous les autres découvrent l’ampleur des dégâts. La neige paralyse le département et tout le monde à froid.
Des congères de 11 mètres
À cette époque, on se chauffe encore au fioul ou au charbon. Mais ces matières manquent et l’état des routes complique singulièrement le tâche des livreurs. Dans les Cévennes, où l’on est pourtant habitué aux rigueurs de l’hiver, on relève -15,6° à l’observatoire du Mont Aigoual. Dans ce secteur, les rafales de vent provoquent des congères de 11 mètres et les routes sont bien sûr fermées à la circulation. Mais la situation la plus problématique se situe dans le sud du département. À Nîmes, les services météorologiques enregistrent une température de -13,5° au sol. Les bourrasques qui balayent la ville pendant des heures et les dix centimètres de neige au sol rendent la circulation quasiment impossible.
À Bellegarde, 400 personnes bloquées dans leur voiture
Le froid est là avec son terrible cortège de désagréments. C’est d’abord une grande panne d’électricité qui touche certains quartiers pendant plus de 24h, dont le centre médical. Une partie de sud du Gard est plongée dans l’obscurité. Dans la nuit glaciale, des automobilistes restent coincés sur les routes de Générac et de Sommières. Les fossés regorgent de véhicules en perdition et près de Bellegarde, 400 personnes sont bloquées sur les routes enneigées.
Les Nîmois privés de chauffage, de radio, de télé, de foot et de PMU
Sans électricité, il est impossible de suivre les nouvelles à la radio ou à la télévision. Faute de chauffage, les écoles sont contraintes de fermer pour plusieurs jours. Le sacro-saint match de football du dimanche au stade Jean-Bouin est reporté. Les supporters des Crocodiles n’iront pas voir l’alléchant Nîmes Olympique – Racing de Paris prévu le dimanche à 15h. Pas de PMU non plus, car il est impossible de transférer les nombreux gains dominicaux à Avignon comme la sécurité l’impose. Alors, dans la journée, les Nîmois se retrouvent aux Jardins de la Fontaine, qui se transforment en station de sport d’hiver. Skis et luges sont de sortie !
« Le Gard était donc hier une succursale de Grand Nord, du pays de grand silence blanc »
« Le Gard était donc hier une succursale de Grand Nord, du pays de grand silence blanc » relate, tout en mesure, le journaliste Louis Boyer, dans "le Méridional" du 4 février. Ce jour-là, la station météorologique de Nîmes-Courbessac relève une température de -17,5° au sol, soit -10,5 sous abris. Après cet épisode extrême, le froid se retire lentement pour laisser sa place à un soleil plus que jamais apprécié des Gardois. Il y a 60 ans, nos prédécesseurs ont affronté des conditions climatiques glaçantes et ils ne l’ont pas oublié. Alors, vous avez toujours froid en 2023 ?
(*) Selon le site statista.com