ÉDITORIAL Migrants : ni naïf, ni inhumain
Depuis des dizaines d'années, la France, l'Europe se confrontent à la question migratoire.
D'élection en élection, de la Droite à l'extrême-Droite, le sempiternel sujet est sur la table matin, midi et soir : il y a trop d'immigrés dans le pays. Et surtout, il ne faut plus accueillir de nouveaux migrants. Une diatribe qui se fracasse sur le mur de la réalité. Confrontée à un afflux massif de migrants venus d'Afrique et de pays en guerre comme la Syrie, l'Union européenne rencontre les pires difficultés pour faire face au défi humanitaire et politique qui en découle. En témoigne le dernier épisode en France avec le navire Ocean Viking qui a accosté le 11 novembre dernier à Toulon, suite au refus de l'accueil par l'Italie avec, à son bord, 234 personnes secourues en Méditerranée. Après vérification, une quarantaine de mineurs isolés ont été pris en charge par l’aide sociale à l’enfance. Les adultes en attente dans des centres de rétention fermés ont été auditionnés par l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) pour déterminer le bien-fondé de leur demande d’asile. Les refus (pour la très grande majorité) auraient dû entraîner un retour immédiat vers le pays d'origine. Mais les recours devant les tribunaux pour non-respect des délais ont permis à la quasi-totalité de ces nouveaux migrants de gagner un peu de temps et d'être libérés du centre fermé. Pour les autres, dont la demande d'asile est acceptée, ils ont été répartis dans les pays européens qui se sont portés volontaires pour les accueillir. La France assurant surtout un rôle de zone tampon sur ce coup-là. Reste à savoir si d'autres épisodes vont se produire à l'avenir. Bien évidemment. Les passeurs en Méditerranée n'ont pas l'intention de mettre un terme à leur petit business sur le dos de malheureux. Des malheureux avec ou sans papiers qui vont désormais vivre un véritable parcours du combattant dans les pays qui ne veulent pas d'eux. Une Europe de moins en moins accueillante, particulièrement dans les pays qui ont porté à leur tête des nationalistes qui ne veulent plus entendre parler d'immigration. Mais ce n'est pas aussi simple. Confronté à de nombreux défis démographiques et économiques, le Vieux Continent ne peut pas tirer un trait définitif sur une immigration dite "choisie". Les membres de l'UE ont en effet besoin des travailleurs saisonniers. Mais aussi d'employés hautement qualifiés, d'étudiants et de chercheurs pour préparer son avenir et faire face à la concurrence, notamment de l'Asie. En contrepartie, ils doivent accepter de prendre leur part de solidarité avec le monde qui les entoure. Sans naïveté, et surtout sans inhumanité.