AU PALAIS Règlement de compte à la Saint-Valentin : il entre chez son ex' par la fenêtre et se fait tabasser par son rival
Benjamin a mis Jamal KO, alors que ce dernier était entré par la fenêtre du domicile de la mère de ses enfants, Aurélie, le 14 février dernier. Le nouveau compagnon violent et l'ex jaloux se font face à la barre du tribunal correctionnel de Nîmes, mardi 5 avril.
Depuis la récente séparation de son couple, Jamal s’est déjà montré jaloux à plusieurs reprises. Mais le soir de la Saint-Valentin, il tambourine à la porte d’Aurélie, prétextant vouloir voir leurs deux petits garçons. « Elle a fini par me répondre, de passer par la cuisine pour les voir. Quand je les ai aperçus, je suis passé par la fenêtre basse pour leur faire un câlin, raconte d’abord Jamal. Quand tout d’un coup, j’ai entendu un pas derrière moi, j’ai pris un coup violent et j’ai été pris de vertige »
« Je l’ai esquivé et je l’ai enchaîné »
Longue barbe et cheveux courts, allure athlétique, Benjamin assume tranquillement, les bras croisés. « Aurélie était en panique car il y avait déjà eu des incidents entre eux, quelques jours plus tôt. Je me suis caché pour ne pas que ça s’envenime. Puis j’ai entendu Aurélie crier lorsqu’il est entré, indique calmement le trentenaire. En arrivant dans la cuisine, il s’est tourné en furie vers moi… Je l’ai esquivé et je l’ai enchaîné. J’ai préféré le mettre JO pour ne pas qu’il se relève. Quelques jours plus tôt, il avait menacé de me briser en deux. Je ne pouvais pas ne pas me défendre, alors que ma compagne et ses enfants étaient là… » Fractures à la face, renfoncement des sinus, lésions au visage et à la bouche, possibles troubles neurologiques : Benjamin y tout de même allé fort, d’où son placement en détention provisoire après ces faits.
D’un ton vif et clair, Aurélie, lunettes rouges et voile coloré, prend la défense de son nouveau compagnon. « Jamal habite à 200 mètres de chez nous : il voit ma voiture de sa fenêtre et surveille mes allers-retours, ajoute-t-elle. Ce soir-là, il était clairement à la recherche de Benjamin, il a jeté un coup d’œil dans ma chambre en passant. Puis il s’est jeté sur lui, la main sur la gorge. » Mais en arrivant, c’est Jamal que les gendarmes spiripontains découvrent assis dans la cuisine, hagard, entouré de petites flaques de sang.
« Il a rameuté d’autres maghrébins en leur disant que j’étais une pute… »
Le président Jean-Michel Perez cherche à savoir comment s’est passée la rupture du couple. « Notre relation n’a été faite que de séparations depuis six ans et demi. On ne s’entendait pas, même lors des naissances des enfants, pointe d’abord Aurélie. Mais le 25 janvier dernier, alors qu’il gardait notre plus jeune garçon, il est venu me trouver devant la salle de sport, exigeant de voir Benjamin. Il m’a arraché ma clef de voiture avant de les jeter en pleine rue, puis il m’a balancé une bouteille d’eau pleine au visage. Il avait même rameuté d’autres maghrébins en leur disant que j’étais une pute… »
Le juge se tourne vers Jamal, l’air interloqué. « Ces évènements devant la salle de sport…. Il semble qu’à ce moment-là, vous n’aviez pas compris que vous étiez séparé ? », insiste le juge. « Non, c’est vrai. C’est pour cela que j’ai senti de la tristesse, d’être trahi comme cela, répond le père de famille de 43 ans, avant de reprendre de manière sibylline. Avec moi, elle a toujours été libre, sans foulard, ni rien. Elle a commencé à le porter quelques jours avant notre séparation, mais j’ai pas posé de questions car c’était fini entre nous… »
« J’ai été en détention avec des gens qui revenaient de Syrie »
Dans le box des détenus, Benjamin hausse un sourcil. Le trentenaire d’allure tranquille a déjà été condamné 19 fois, dont une peine de 8 ans pour vol avec armes rendue par la cour d’Assises de Saint-Denis. « Vous avez aussi une condamnation pour non-respect de vos obligations relatives à la prévention d'actes de terrorisme, de quoi s’agit-il ?, s’enquiert sévèrement le juge. « C’est parce que j’ai été en détention avec des gens qui revenaient de Syrie, c’est tout », élude Benjamin, l’air fermé. Le trentenaire assure depuis avoir quitté la région parisienne et coupé court avec ses anciennes fréquentations pour ouvrir une ferme pédagogique, chez sa mère, à Sabran.
« Ca ressemble à un mauvais film, sauf que c’est la vraie vie : l’ex jaloux se pointe chez son ex-femme où il tombe, manque de bol, sur son nouveau compagnon qui le roue de coups !, résume la procureur Julia Salery. Mais la date n’est pas anodine, c’est le jour de la fête des amoureux, donc peut-être qu’il voulait en fait voir avec qui elle se trouvait, surtout quand on voit l’horaire. C’est une histoire de jalousie ! Sauf qu’en face, on a un nouveau compagnon qui dépasse largement la légitime défense, au point qu’on peut s’interroger sur d’éventuelles séquelles neurologiques définitives de son rival. » La magistrate demande 4 mois avec sursis contre Jamal et un an ferme contre Benjamin.
« Il a été massacré au sol »
« Il n’avait même pas calculé que c’était le 14 février, rétorque l’avocate de Jamal, Youna Copois. Ce soir-là, il voulait voir les enfants une dernière fois avant de partir en voyage au Maroc ! » L’avocate tente de monter que la version du couple ne tient pas à grand renfort de moulinets des bras. « On nous dit qu’ils se battent dans la chambre qui est à plus de 10 mètres, puis dans le salon et enfin dans la cuisine, mime l’avocate en faisant de grands pas chassés. Or, les traces de sang sont toutes sur la base de la fenêtre, car c’est là qu’il a immédiatement été massacré, au sol. »
Jamal est finalement condamné à 6 mois avec sursis simple pour intrusion et 1 000 euros de dommages et intérêts, tandis que Benjamin écope de 12 mois à domicile.
Pierre Havez