HOMMAGE Quand Bernard Pivot faisait la « dictée de la bouvine » à Saint-Gilles
Le célèbre journaliste décédé ce lundi à l’âge de 89 ans s’était rendu à la manade Bilhau en octobre 1997
Connu pour avoir créé les émissions littéraires « Apostrophes » et « Bouillon de Culture », diffusées sur Antenne 2 (puis France 2) pendant plus de 25 ans, le journaliste Bernard Pivot est décédé ce lundi à l’âge de 89 ans, à Neuilly. Cet amoureux des mots était aussi connu pour ses championnats d’orthographe et sa célèbre dictée qui a rencontré un immense succès populaire pendant 20 ans de 1985 à 2005.
En octobre 1997, il s’était rendu à la manade Bilhau à Saint-Gilles pour venir présenter la 12ème édition des Dicos d’or quelques semaines avant la demi-finale à Nîmes. Une journée que le manadier Jean-Marie Bilhau, habitué depuis des décennies à recevoir des personnalités en tout genre, a gardé intacte dans sa mémoire. « Les deux personnes dont j’ai gardé le plus grand souvenir c’est Bernard Pivot et Léo Ferré », confie-t-il.
Ce jour-là, l’ambassadeur de la bouvine avait fait découvrir au journaliste parisien nos traditions locales comme la course camarguaise mais aussi l’abbaye d’Estagel et surtout notre parler provençal. Celui qui aimait tant les mots avait découvert l'argot local. Ainsi, il avait fait la dictée à environ 400 personnes, principalement à des manadiers et des journalistes. Boudiou, espalanquer, engavacher… faisaient partie des mots que Bernard Pivot avait intégré à son texte pour s’adapter au langage local.
La demi-finale des Dicos d'or dans les arènes de Nîmes
De ce moment, Jean-Marie Bilhau a conservé de nombreux clichés dont le moment où le présentateur était au pupitre pour faire la dictée mais aussi à côté de lui alors qu’il se trouvait sur son cheval. En compagnie également de Catherine Matausch, ancienne journaliste de France 3, qui présentait les Dicos d'or. « C’était un homme d’une gentillesse extrême et doté d’une intelligence hors-pair. Il était aussi passionné de foot. On avait passé un moment très agréable », se souvient le manadier saint-gillois qui avait pu échanger avec le Lyonnais de naissance au moment du déjeuner.
Le 9 novembre 1997 il était revenu dans les arènes de Nîmes pour animer la demi-finale en présence de 7 500 participants et devant des millions de téléspectateurs. Pour cette édition, la finale avait eu lieu au stade de France. « Il m’avait invité mais je n’avais pas pu venir », ajoute Jean-Marie Bilhau. Une figure de la littérature qui aura marqué de nombreux français sur tout le territoire et donc jusqu’en Camargue.
Voici la dictée de la bouvine de Bernard Pivot
Sous le signe du taureau
Moi qui, jusqu'à présent n'avais affronté que des gnafres et des chihuahuas, voilà que je me trouvais, dans les arènes de Nimes, parmi les raseteurs assez hardis pour couper les cocardes aux cornes des taureaux camarguais. Boudiou ! J'avais la pétoche ! Il eût été déshonorant que je chochillasse plus longtemps. Aussi m'élançai-je. Mais un taureau, qui abhorrait la télé ou qui m'avait pris pour un de ces paparazzi effrontés, me repéra et me chargea. Je pris mes jambes à mon cou et sautai par-dessus la barricade, derrière laquelle je m’espalanquai en m'embabouchinant dans du crottin. Tous les papets rigolaient de mon infortune. On me releva et, pour me réconforter, pour me rasséréner, on me fit tellement boire de ces bons vins du Gard que je m'engavachai. Le ridicule ajouté à la honte de l'esbroufe ! C'est alors que je me réveillai en sueur... Les natifs du Taureau ne font pas nécessairement de bons raseteurs.