USAM Steven George : des tibias en verre, un mental d'acier
Non conservé, à 15 ans, au pôle espoirs de Chartres après une nouvelle blessure au tibia, les médecins ont ordonné à Steven George de ne plus rejouer au hand. Mais son abnégation a fait la différence. Aujourd'hui, il profite simplement du plaisir qui s'offre à lui.
Dans l'effectif de la Green Team, ce n'est pas celui que l'on remarque en premier. Steven George mesure un mètre quatre-vingt-trois, ce qui fait petit en hand au milieu des géants et il est doté d'un caractère plutôt timide et posé. Au retour de la balade matinale de ce samedi, nous profitons d'un petit moment de répit avant le déjeuner pour faire le point sur sa jeune carrière. Il aura 23 ans, le 26 août prochain.
Rien de bien croustillant pour commencer, sa première passion était le handball. "J'ai commencé à l'école primaire vers neuf ans et après j'ai rapidement pris ma licence en club." Ce n'était pas le seul sport qui occupait ses journées. "Le mercredi, de 7h à 15h, je me retrouvais à la piscine comme il n'y avait pas l'école. Je faisais de la natation avec mon beau-père mais c'était juste pour le suivre. J'aimais bien mais je n'étais pas accro comme le hand. Ça m'a fait un peu les bras", acquiesce en souriant le natif de Saran.
À l'adolescence, il met tout son énergie dans le hand. "Je ne savais faire que ça. L'école, je n'étais pas mauvais mais ça ne m'intéressait pas plus que ça. Même pendant les vacances j'allais au gymnase avec mon coach. Je faisais de la musculation et des séances de tirs." À 15 ans, il intègre le pôle espoirs de Chartres. Le malheur s'abat sur lui de manière presque unique : "je me fracture les deux plateaux tibials en même temps, ce qui est très rare." Six mois plus tard, Steven est de retour sur les parquets. Mais le sort s'acharne : "je me refais le tibia gauche. Je pense que je suis revenu trop tôt. J'étais jeune, j'avais envie de jouer". Du coup, fin de l'aventure au pôle espoirs où il n'est pas conservé.
La roue tourne
Cette fois-ci, il est éloigné des terrains pendant dix mois et la possibilité de poursuivre le handball commence à s'obscurcir : "les médecins voulaient que j'arrête". Le jeune homme vit des moments de galère. "À chaque fois, je me retrouvais en fauteuil roulant. Je ne pouvais pas aller à l'école parce que c'était à une heure de chez moi. Je vivais chez mon oncle parce que mes parents habitaient au troisième étage sans ascenseur. C'était un peu l'enfer." Mais jamais il n'envisage de mettre un terme à sa passion. "Au moins continuer par plaisir", se disait-il.
Plus rien désormais ne lui fait peur. "Le match de reprise, là où je me blesse à nouveau, je n'avais pas joué pendant six mois et je fais un 10 sur 16 aux tirs. Je me suis dit, je suis déjà revenu une fois... " Retour aux sources, à Saran, pour renouer avec le ballon, avec les moins de 18 ans. Un nouveau départ pour un nouveau poste. "J'étais arrière mais les blessures ont complètement stoppé ma croissance. Depuis, je n'ai pris que deux centimètres alors que j'aurais dû être un petit peu plus grand." Steven passe du coup à l'aile. Il progresse à ce poste pendant deux saisons à Saran, en N1.
"J'avais appris par des amis de Nîmes que Franck parlait de moi. Il connaissait mon coach de Saran." À 18 ans, il réussit les tests et est admis au centre de formation de l'Usam. Lui, qui ne savait pas trop quelle filière suivre après l'obtention de son bac, "peut-être Staps pour continuer le hand", a l'opportunité de devenir pro. Il n'en a pas encore le statut lorsqu'il fait son apparition en première division. Ironie du sort, il profite de la blessure des deux ailiers droits pour s'imposer. Il met le pied à l'étrier face à Paris, on ne peut pas faire mieux comme monture pour débuter.
Une première saison quasi pleine (22 matches) avant de se blesser en fin d'année. Où ça, à votre avis ? Au tibia ! Un retour en novembre et dix matches disputés en fin de saison 2016/2017. Il joue en revanche tous les matches de championnat de l'exercice précédent, sans aucun pépin physique. "Maintenant je touche du bois, ça tient la route. Je suis mieux préparé, avec une meilleure gestion de la fatigue." Des moments difficiles qui lui ont forgé, malgré son jeune âge, un mental d'acier. "Quand je me prends trop la tête parce que je veux bien faire, je pense juste à la chance que j'ai d'en être arrivé là parce que j'aurais pu arrêter le handball. Positiver et se dire que ce n'est que du plaisir." Tiens en parlant de plaisir, Christian, l'intendant, vient nous chercher pour manger. Au menu, risotto !
De Poggibonsi (Italie), Corentin Corger