L'IMAGE Harcèlement scolaire : les brochures des collégiens de Racine dédicacées en librairies
Fruit d'un travail de réflexion mené au cours de l'année scolaire par les élèves de 3e du collège Racine d'Alès, la brochure "Touche pas à mon camarade" qui s'attaque au harcèlement scolaire était dédicacée ce samedi 10 juin dans deux librairies alésiennes par les contributeurs.
Suivant le même modèle qui a fait ses preuves l'an dernier avec la brochure consacrée à la défense de la démocratie, Gilles Roumieux, professeur d'histoire-géographie au collège Jean Racine, a invité ses élèves de 3e contributeurs du troisième volet de la série à dédicacer leurs productions en direct des librairies Sauramps et Au bonheur des gens, ce samedi 10 juin.
Par petits groupes, les collégiens se sont succédé toute la journée pour apposer des signatures sur les nombreuses brochures "Touche pas à mon camarade" achetées par des Alésiens sensibles à la cause du harcèlement scolaire (relire ici). Qu'ils émanent de parents d'élèves ou de simples badauds interpellés par la démarche, Gilles Roumieux a été couvert de louanges et maintes fois remercié pour son engagement. "Bravo pour ce que vous faites pour nos enfants", a glissé une maman.
Quelques mois après leur contribution à cette brochure née de questions relatives à la problématique du harcèlement à partir du cas tragique de Jonathan Destin, les collégiens sont encore marqués par la démarche qui, si elle est devenue rituelle pour Gilles Roumieux, reste rare et originale dans un cadre scolaire. "Le harcèlement scolaire, c’est souvent les adultes qui en parlent. C’est bien que les élèves aient pu s’exprimer sur le sujet. Je ne pensais pas que ça prendrait autant d’ampleur", commente Maria, laquelle a préfacé avec brio la brochure.
L'ampleur est tel que la Casden a commandé 10 000 exemplaires de la brochure afin qu'elle soit distribuée aux jeunes professeurs dans les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l'éducation. Parce qu'il a toujours de la suite dans les idées, Gilles Roumieux s'échine d'ores et déjà à prolonger la démarche à travers une expo photo en noir et blanc qui devrait envahir la médiathèque Daudet du 20 au 24 novembre 2023, à l'occasion de la semaine des droits de l'enfant.
"Depuis, on fait attention à ce qu’on dit"
Ali Achouri, photographe émérite du bassin alésien, figure de la cité grand'combienne, a déjà tiré le portrait de 22 collégiens volontaires. "Le résultat est sublime", prévient le professeur. Dans la cour du collège Racine, alors que les vacances scolaires approchent à grands pas, les bénéfices de la démarche sont déjà palpables. "Depuis, on fait attention à ce qu’on dit. On essaie de ne laisser personne à l’écart. Quand un élève est seul, on va le voir", confie Maria.
Camille, sa camarade du même âge, abonde dans le même sens : "Ça a permis à certains élèves de se rendre compte de certains actes qu’il ne fallait plus faire. J’ai aimé le fait qu’on nous laisse la parole en tant qu’adolescents car on est les premiers touchés. Ce travail nous a soudés. Il y a une trace, c'est la brochure. Ça laisse une marque !" La résonnance de ce projet éducatif est tout à fait singulière pour Alexandre, jeune élève harcelé durant l'enfance.
"Il ne faut pas attendre des preuves, il faut agir !"
L'adolescent qu'il est aujourd'hui se dit heureux d’avoir pu "s’exprimer librement" en racontant son expérience du harcèlement. "Il faut changer les choses. Quand un élève parle du harcèlement, il ne faut pas attendre des preuves, il faut agir !", martèle Alexandre. Si le harcèlement scolaire qu'il a subi des années durant n'est plus qu'un mauvais souvenir, c'est parce que le jeune homme a trouvé la force d'y mettre fin.
"Je suis d’abord passé par la version légale", rejoue le dernier nommé. Et de poursuivre en délivrant au passage quelques conseils aux élèves harcelés : "Il faut en parler à l’école et aux parents, même si je sais à quel point c’est difficile. Après, il faut se défendre constamment !" Depuis, de manière autodidacte, Alexandre s'est même formé à la self-défense. "J’ai toujours voulu savoir comment se défendre sans blesser l’autre et sans se blesser soi-même", admet l'adolescent, sorti grandi de ce projet éducatif hors du commun.
"Coluche disait qu'on n'a pas le droit ni d'avoir faim ni d'avoir froid, moi je crois qu'on n'a pas le droit de mourir à cause du harcèlement scolaire", résume Gilles Roumieux qui, on le sait, s'attaquera bientôt à une nouvelle thématique d'actualité avec ses élèves.