Leurs calculs sont formels. En 2023, l’association Temps libre de Saint-Génies-de-Malgoirès a fait économiser 4 millions de litres d’eau. « Nous avons vendu 1 631 articles dans notre friperie « Les frusques de Carole » et si on calcule qu’il faut 2 700 litres d’eau pour fabriquer un tee-shirt, cela fait 4 403 700 litres d’économisés pour une année », décrypte Stéfan Panafieu, directeur de ce centre social. En 2017, des bénévoles lancent une idée : ouvrir une friperie. Un propriétaire du village accepte de fournir un local en échange de travaux. Comment les financer ? Difficile de convaincre une banque quand on ne sait pas si on va arriver à vendre beaucoup de vêtements à petits prix. Un financeur s’y risque : les fonds Leader de l’Union européenne. Stefan Panafieu l’admet : il a fallu être « très précis, très rigoureux » pour présenter le dossier. Puis il a fallu être « très patient » car il y a eu un décalage de deux ans entre l’accord et le versement des fonds. Au final, Leader a versé 13 564 € sur un coût total de 8 681 €. « Une aide à hauteur de 64 % pour un projet c’est incroyable », se réjouit-il.

Effet d’entraînement

« Les aides Leader ont souvent un effet levier. Les municipalités, la Région vont suivre », observe Michael Stange de la maison de l’Europe. La commune de Saint-Dionisy a loué à une association de producteurs une boutique dans sa halte paysanne. Pour l’équiper, les producteurs sollicitent d’abord la Région. Puis ils se tournent vers le PETR qui gère les fonds européens Leader. Banco, ils acceptent de compléter les aides de la Région pour arriver à environ 80 % de subventions. Leader paie la plus grosse part : 57 %. La boutique ouvre au printemps 2021. L’argent de l’Europe est arrivé il y a trois mois. « On avait contracté un prêt pour faire l’avance. Les banques avaient accepté car il allait y avoir les subventions, se souvient Florent Rousseau, président de l’association de producteurs. On avait aussi recueilli 20 000 € avec une cagnotte en ligne ».

Entretien avec Jalil Benabdillah, vice-président région Occitanie

« 491 entreprises gardoises ont été aidées par le fonds Foster »

Objectif Gard, le magazine : Vous êtes vice-président de la Région en charge de l’Économie, l’emploi, l'innovation et la réindustrialisation. Le 17 juin, vous lancez Foster II à la cité de l’innovation de Toulouse avec des partenaires bancaires. De quoi s’agit-il ?

Jalil Benabdillah : Foster est un fonds européen qui me tient à cœur. Il permet d’aider les entreprises. C’est l’acronyme de Fonds Occitanie de soutien territorial aux entreprises régionales. Pour 2014-2020, la Région a mis une enveloppe budgétaire de 100 M€ et les banques ont prêté 1,2 milliard € aux entreprises. L’Europe garantit ces prêts à hauteur de 80 %. Dans cette période post-covid, beaucoup d’entreprises ont des difficultés de trésorerie. Avec Foster, le chef d’entreprise peut emprunter sans aucune garantie ni caution personnelle. Il ne met pas en danger sa famille. Pour Foster II, la région va mettre 60 M€ et les banques vont prêter environ 800 M€. C’est colossal.

Quelles entreprises gardoises ont été appuyées par les aides Foster ?

491 entreprises gardoises en ont bénéficié. Cela fait 104 M€ pour le Gard. D&S group, à Bagnols-sur-Cèze, qui travaille dans les métiers du nucléaire, en a bénéficié. Cette entreprise vient de fêter ses 20 ans et son développement est impressionnant. Le Comptoir cévenol d’emballages à Alès, les constructions métalliques du Sud, Sherco et Sud métal Provence à Nîmes ont aussi été accompagnées.

L’Europe est souvent caricaturée comme étant tatillonne et très éloignée des réalités quotidiennes. Vrai ou faux ?

70 % du budget européen est dédié aux actions de proximité qui touchent notre vie quotidienne : économie, emploi, attractivité, transition écologique, agriculture, pêche… Pour 2021-2027, l’Occitanie va toucher 1,4 milliard de l’Europe. Une partie correspond à des fonds sectoriels gérés directement par l’Europe comme Erasmus +. Le reste, ce sont des fonds structurels et d’investissement gérés par l’État et les Régions : le FEDER, le FSE, le FEAMP et le FEADER. Les 829 M€ du FEDER et du FSE sont par exemple gérés directement par la Région. C’est quasiment 1 milliard € que l’on peut flécher sur des projets structurants.

Quels projets concrets ces fonds soutiennent-ils ?

La Région propose la rentrée la moins chère de France en fournissant gratuitement un ordinateur portable aux élèves de Seconde, des manuels, une trousse à outils pour les élèves de lycée professionnel. C’est soutenu par des fonds européens. Les transports scolaires sont gratuits. On aide les Ehpad. On touche la vie des gens de tous les jours. Entre 2014 et 2020, on a aidé 3 000 projets. Cela a permis en Occitanie de former 174 000 personnes, de produire 33 MW d’énergie renouvelable... Pour la nouvelle période, on vise d’aider 6 000 entreprises, 53 labos et centres de recherche…

Juste après la pandémie, l’UE a adopté le plan d’urgence React EU. Comment cela s’est traduit localement ?

Ce fonds pour réagir aux situations de crise a permis d’attribuer 200 M€ supplémentaires dans le cadre du FEDER. Entre 2021 et 2023, cela a permis en Occitanie de rénover 1 600 logements sociaux, de numériser 1 500 établissements scolaires, d’aider 1 000 entreprises, 30 centres de santé, de développer 13 km de pistes cyclables…

Les détracteurs de l’Europe expliquent que tous les crédits européens ne sont pas consommés. Que répondez-vous ?

Il peut y avoir parfois une entreprise qui a demandé des subventions mais qui doit décaler, annuler, réduire la voilure à cause de l’inflation, car un client l’a lâché… Il peut y avoir des décalages. Mais les crédits non consommés sont réinjectés dans le budget suivant. Tout ce que la région Occitanie gère est bien consommé.