NÎMES Un exemple unique au monde
La Maison carrée, classée à l’Unesco, a une histoire dont il faut connaître la profondeur pour apprécier l’édifice qui a traversé les millénaires.
Le 18 septembre 2023, la 45e session élargie du Comité du patrimoine Mondial, réuni à Riyad en Arabie Saoudite, a prononcé l’inscription de la Maison Carrée de Nîmes sur la liste du patrimoine Mondial de l’Unesco.
Classé monument historique dès 1840, la Maison Carrée est un temple romain hexastyle pseudo périptère de style corinthien de 31,81 mètres de long sur 15 de large et 17 mètres de hauteur.
Si vous décidez de monter les 15 marches, faites-le à la manière des Romains, commencez par le pied droit pour ne pas arriver en haut avec le pied gauche qui porte malheur !
Édifié du vivant d’Auguste entre 10 av. J.-C. et le tout début du Ier siècle de notre ère, le temple se compose de trente colonnes de neuf mètres de haut, dont vingt sont engagées et enserrent la cella (la salle intérieure), précédée d’un pronaos (l’espace désignant le vestibule ou l’entrée) auquel on accède par un escalier de 17 marches.
La pierre utilisée pour sa construction est une belle pierre calcaire du bois des Lens. Élevée sur un podium à escalier frontal, la Maison Carrée dominait son environnement et se trouvait à l’origine sur le forum romain au centre d’une esplanade entourée de portiques aujourd’hui disparus mais dont nous conservons le relevé précis. Au nord la Curie lui faisait face.
La Maison carrée serait directement inspirée de temples importants à Rome que sont les temples de Mars Ultor et d’Apollon in Circo et que les plans de sa réalisation seraient directement venus de Rome. Le Temple de Nîmes a ainsi été construit avec la participation des populations locales qui voulaient ainsi marquer leur adhésion au nouveau régime et leur attachement à Auguste et sa famille. Des artistes locaux auraient pris en charge ce chantier.
Concernant l’opulence de son décor, c’est cette fois un autre monument symbolique qui est en relation avec la Maison Carrée : l’Autel de la Paix, l’Ara Pacis, édifié sur le Champ de Mars à Rome.
En la regardant de face le visiteur observe des trous au-dessus des colonnes. Cette ancienne inscription dédicatoire déchiffrée par J-F Séguier en 1758 était scellée avec des lettres de bronze. « À Caius Caesar consul et Lucius Caesar consul désignés, fils d’Auguste, princes de la jeunesse », le Temple était ainsi dédié à la gloire des deux petits-fils, fils adoptifs et héritiers présomptifs d’Auguste : les consuls et chefs militaires Lucius Caesar et Caius Julius Caesar, les fils d’Agrippa, morts prématurément.
Parfait exemple d’architecture impériale en Gaule narbonnaise, la Maison Carrée de Nîmes est, avec le Panthéon de Rome, le seul édifice cultuel de l’antiquité qui nous soit parvenu pratiquement intact avec son décor extérieur.
La frise de la Maison Carrée, ornée de rinceaux de feuilles d’acanthes et habitée d’oiseaux, est considérée par les spécialistes comme l’un des exemples les plus accomplis d’un décor symbolique lié au culte impérial datant des premières années de notre ère.
Mais l’empire romain n’était pas éternel… Pourtant l’édifice est encore fièrement élevé en plein centre de la cité des Antonin. Pourquoi ? Comme pour les arènes, parce que les Nîmois des époques qui nous séparent de l’Antiquité l’ont toujours utilisé.
Demeure particulière, sorte de mairie puis de préfecture, église conventuelle des Augustins, premier musée et musée archéologique de Nîmes puis salle d’exposition et de médiation… Il a même été envisagé de la transformer en tombeau !
Véritable bijou, la Maison Carrée de Nîmes est l’unique et plus ancien représentant de l’ordre corinthien Augustéen toujours en élévation, ayant conservé intact l’ensemble de son décor.
Le décor de la Maison Carrée est sculpté en pierre de Lens, un très beau calcaire à grain fin provenant d’une carrière située à une vingtaine de kilomètres de Nîmes. La corniche à modillons possède un larmier orné d’un méandre, elle est couronnée par une cimaise décorée de godrons et de mufles de lions.
Au-dessus de l’architrave (partie inférieure de l’entablement qui porte directement sur le chapiteau de colonnes), se déroule sur trois façades du temple, une frise végétale luxuriante habitée d’oiseaux. Le traitement très naturaliste des feuilles d’acanthe, l’épanouissement du feuillage de la frise à rinceaux, matérialisent, comme l’a démontré l’historien Gilles Sauron, l’idée d’abondance promue et garantie par la Paix d’Auguste.
Elle est l’un des témoignages les plus importants de l’architecture et de la diffusion du culte impérial dans les provinces de l’Empire. La valeur universelle exceptionnelle de ce bien repose sur la démonstration que la Maison Carrée de Nîmes, édifiée du vivant de l’Empereur Auguste au premier siècle de notre ère, représente l’une des plus anciennes expressions, et des mieux conservées d’un temple romain consacré au culte impérial et qu’elle est un monument d’une qualité architecturale remarquable qui, par les circonstances historiques de sa création, par l’importance politique de sa consécration et des choix stylistiques qui ont présidé à son édification, témoigne des valeurs de paix durable, de concorde et de prospérité que promut et chercha à garantir l’Empire romain.
Après les inondations de 1988, qui dévastèrent la place de la Maison Carrée, sans porter atteinte au monument, Norman Foster l’architecte de Carré d’art – Musée d’art contemporain/Bibliothèque alors en construction, fut missionné par le maire de l’époque pour reconcevoir totalement le nouveau forum que l’on connait de nos jours.
Dans ce contexte, la fouille de 1990-1991, qui a précédé l’aménagement actuel de la place a permis une meilleure connaissance de l’histoire du lieu. Les archéologues y ont découvert des vestiges d’habitat du début du 1er siècle avant J.-C.
Les bâtisses, dont certaines étaient richement pavées, ont été détruites pour permettre entre 25 et 10 avant J.-C. la construction d’un premier forum. Celui-ci n’a pas été achevé et a laissé la place au forum Augustéen et à l’édification de la Maison Carrée au cœur de l’espace civique de Nîmes.
Tarif plein six euros, réduit cinq, enfants de sept à 17 ans, trois euros.