FAIT DU JOUR Affaire de la SENIM : la journée où tout bascule pour Franck Proust
Coup de théâtre ce jeudi. La cour d’appel de Nîmes a condamné Franck Proust, président de Nîmes métropole, à 15 000€ d’amende, 12 mois de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité. Un énième rebondissement dans l’affaire de la SENIM qui met un coup d’arrêt à la carrière politique de l’élu Les Républicains.
8h30 : Stupeur au palais de justice
Le président de Nîmes métropole Franck Proust et ses avocats arrivent au palais de justice de Nîmes. Ce jeudi marque le jour où les juges de la cour d’appel livraient leur arrêt dans l’affaire de la SENIM. En juillet dernier, le tribunal correctionnel avait prononcé la nullité liée au délai raisonnable de la procédure, l'affaire sur le fond n'avait pas été jugée. C’était sans compter sur l'appel du procureur de la République, Éric Maurel.
En février dernier, le président de Nîmes métropole comparaissait devant la cour d’appel pour trafic d'influence et favoritisme. Ce jeudi 14 avril, lors du délibéré, c’est la douche froide : Franck Proust est condamné à 15 000€ d’amende, 12 mois de prison avec sursis et cinq ans d’inéligibilité. Au moment où la peine d’inéligibilité est prononcée, Franck Proust se retourne vers son avocat, comme s'il n'y croyait pas.. À l'issue, l'édile part sans aucune réaction pour la presse.
10h : L'étrange réaction du maire de Nîmes
Suite à la condamnation, les premières réactions des responsables politiques se sont connaître. Ami de 40 ans avec Franck Proust, le maire de Nîmes Jean-Paul Fournier se dit "terriblement attristé par cette décision de justice. Cette condamnation est très dure, peut-être trop [...]. Je prends acte de cette terrible décision et nous en tirerons ensemble, le moment venu, toutes les conséquences politiques". Dans le monde politique nîmois, certains s'interrogent : la municipalité de Nîmes est-elle en train de démissionner Franck Proust ? Le président de Nîmes métropole peut-il rester président ?
11H30 : La nouvelle se répand au Colisée
Quelques heures après l'annoncé de sa condamnation, la nouvelle circule dans les couloirs du Colisée, siège de Nîmes métropole. « Quelle incidence cette condamnation aura-t-elle sur nous ? », s’inquiète une fonctionnaire qui compte parmi les 450 agents de Nîmes métropole. À l’étage, certains sont abasourdis : « J’étais en réunion, j’ai reçu pas mal de messages me disant que l’on pensait fort à moi. J’étais à mille lieux de m’imaginer que c’était en lien avec Franck Proust… ! », commente un autre employé. Plus tard, le président de Nîmes métropole enverra un mail à ses agents expliquant : « Je prends acte de cette décision qui m’affecte au plus haut point… Mon avocat m’a conseillé de former un pourvoi en cassation […]. Mon devoir, mon honneur et mon engagement avec vous me conduiront prochainement à vous réunir afin de vous rendre compte de la situation. »
15H L'avocat Franck Proust annonce
son pourvoi en cassation
L'après-midi, une conférence de presse s'est déroulée dans le bureau des avocats de Franck Proust et du promoteur Jean-Luc Colonna d'Istria. « Cette décision a été reçue avec consternation ! La condamnation est au-delà de ce que les avocats généraux présents à l’audience avaient pu solliciter ! Nous envisageons un pourvoi en cassation, annonce l’avocat de Franck Proust, Philippe Expert. Le tribunal correctionnel avait prononcé l’annulation, considérant qu’il n’était pas possible de tenir ce procès au regard du temps qui a été écoulé. La cour d’appel a eu une analyse différente… Cette question mérite indiscutablement d’être soumise à la Cour de cassation. »
Quand au fond de l'affaire, « cette décision a un caractère humiliant parce que l’inéligibilité qui n’avait pas été sollicitée est assez mal vécue. Franck Proust ne comprends pas et considère que tout au long de son procès, il a avait le sentiment d’avoir établi son entière bonne foi. Sur un volet des poursuites, c’est une décision de relaxe qui a été prononcé et c’est heureux. Par contre, sur le volet ayant trait à la cession d’un terrain, alors même qu’il n’est pas démontré d’existence de pacte de corruption, la cour a cru devoir condamner. Nous ne sommes pas d’accord avec cette analyse… Humainement, c’est quelque chose qui lui est insupportable. »
15h30 : Franck Proust restera président
de Nîmes métropole
Au cours de cette même conférence de presse, les avocats ont indiqué que Franck Proust pouvait rester président de Nîmes métropole. Selon maître Philippe Expert, sa peine d’inéligibilité (ainsi que ses 15 000€ d’amende et ses 12 mois de prison avec sursis) sont suspendus en raison de son pourvoi en cassation. « Juridiquement, M. Proust est présumé innocent et tant qu’il n’y aura pas de décision définitive, c’est-à-dire tant que la Cour de cassation n’aura pas prise une décision sur le maintien ou non de l’arrêt qui vient d’être prononcé, il est présumé innocent. » Âgé 58 ans, Franck Proust est l’une des personnalités incontournables de la politique nîmoise. Président de Nîmes métropole depuis deux ans, est également le patron des Républicains dans le Gard et été perçu, jusqu'alors, comme l’avenir de la politique nîmoise.
18H30 Frédéric Touzellier et Daniel-Jean Valade en soutien
« Nous avons été très surpris de cette décision… Ça nous a perturbé ! Ce matin, la quasi totalité des maires de Nîmes métropole m’ont appelé pour exprimer leur soutien à Franck Proust », commente Frédéric Touzellier sur le plateau de Bonsoir Le Gard. Avant d’ajouter : « Franck Proust a porté de l’apaisement, du travail et du sérieux ! Aujourd’hui, il n’y a pas de raison que Franck démissionne de sa Présidence. »
De son côté, l’adjoint nîmois Daniel-Jean Valade a assuré du soutien de la ville de Nîmes à Franck Proust : « Je connais Franck Proust depuis l’époque Bousquet. C’est un homme fidèle, droit et efficace. Il profite grandement à l’Agglo ! Ne serait pas immoral en droit de ne pas attendre la décision des juges suprêmes pour avancer et voir comment l’avenir est tissé. »
19H30 Yvan Lachaud appelle Franck Proust à se mettre "en retrait" de la présidence
En fin de journée, l’ancien président de Nîmes métropole, Yvan Lachaud, et le député MoDem, Philippe Berta, sont venus également s’exprimer sur la plateau de Bonsoir Le Gard. Yvan Lachaud : « Je me suis assez souvent exprimé sur ce dossier et j’en ai même y laisser des plumes… J’ai refusé de signer des marchés saucissonnés, des ventes de terrains et j’ai même saisi la chambre régionale des comptes ! J’ai toujours dit la vérité aux Nîmois ! Dans la vie politique, on a le devoir d'être exemplaire ! »
Philippe Berta se dit « attristé. Toute cette affaire porte préjudice à l’image de ma ville. Je suis intéressé par la problématique de la moralisation de la vie publique. Quand François Bayrou a été mis en examen, il a été démissionné ! Je dis ça à tous les politiques… On a un problème majeur, c’est retisser le lien avec la population ». Et à Yvan Lachaud d’ajouter : « Au moins, il se retire de la présidence. Quelle image ça peut donner à celles et ceux qui ont élu une équipe ? S’il n’est pas condamné, il peut reprendre sa présidence. » Reste à savoir si, dans ce scénario, Yvan Lachaud aurait aimé joué un rôle...
20 heures : et maintenant ?
La soirée de Franck Proust s’est terminée chez le maire de Nîmes pour partager un moment « entre amis » pour clôturer une journée à rebondissement. Le sort du président de Nîmes métropole se trouve dans les mains des juges de la Cour de cassation. La SENIM étant décidément une affaire où la seule certitude est, justement, qu'il n’y en a aucune.
Boris De La Cruz et Coralie Mollaret