L'INTERVIEW Arnaud Longuet : "Dans le Gard, le taux de grévistes dans les laboratoires privés est proche de 100%"

Peut-être avez-vous trouvé porte close en vous rendant à votre laboratoire d'analyse en ce début de semaine ? En effet, une grève inédite des biologistes libéraux a débuté ce lundi et doit durer au moins trois jours. Cette action fait suite à l'annonce du Gouvernement fin septembre, dans le cadre du budget de la Sécurité sociale pour 2023, de réaliser une économie de 250 millions d'euros sur le secteur de la biologie. Arnaud Longuet, biologiste médical, directeur général au laboratoire Inovie Labosud et secrétaire à l'URPS (Union régionale des professionnels de santé) biologie d'Occitanie, nous en dit plus sur la colère de la profession.
Objectif Gard : Trois jours de grève reconductible ont été décrétés dans les laboratoires privés. Pourquoi ?
Arnaud Longuet : Le Gouvernement, par le prisme de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM), prévoit un coup de rabot de 250 millions d'euros. Il va s'étendre dans le temps ce qui donnerait 1 milliard d'euros de moins sur l'enveloppe budgétaire consacrée aux actes de biologie jusqu'à 2026. En fait, ils veulent baisser la tarification des actes, fixés par la CNAM.
Pourquoi tant d'économies ?
Ils veulent profiter d'une circonstance conjoncturelle qu'est l'épisode covid. C'est vrai que ça a généré des chiffres d'affaires bien supérieurs pour les laboratoires par rapport aux autres années. Mais eux veulent imposer des baisses dans la durée qui sont pérennes et qui sont donc d'ordre structurel. La politique de dépistage a été indiquée par l'État qui a déterminé les circonstances de test tous azimuts. La profession avait d'ailleurs averti des risques financiers inhérents. La politique de test dépassait largement les enjeux de santé publique, notamment les dépistages dans le cadre des voyages. Le prix de remboursement des tests a aussi été fixé par l'État, pas par nous.
Donc aujourd'hui, les biologistes ont le sentiment d'avoir répondu présents pendant la crise et de subir désormais ?
On est en colère car on a été là, on a investi, on s'est réorganisé, on a embauché, on a augmenté nos effectifs de plus de 10%. On a acheté du matériel, ce qui était compliqué sur le plan économique au moment où il y avait des tensions sur les fournitures, et les réactifs. Les laboratoires privés ont assumé à plus de 90% la politique indiquée par l'État. Là, on nous demande de payer la politique que nous avons appliqué et que nous n'avons même pas initié. On a même tenté d'avertir sur les effets pervers en cours de route. D'où cette réaction unique sur les 30 dernières années.
C'est vrai que c'est une profession qu'on ne voit jamais en grève...
Oui, on a le sentiment d'être de bons élèves puisque globalement, on pense avoir fait économiser à l'État, à la Sécurité sociale, plus de 5 milliards d'euros dans les 10 ans qui viennent. Si on prend les chiffres entre 2013 et 2022, le volume des actes de biologie a augmenté de plus de 30% et pourtant le budget consacré n'a augmenté que de 2,8%.
Le mouvement de grève est-il très suivi ?
Dans le Gard, le taux de grévistes dans les laboratoires privés est proche de 100%. C'est plus qu'au plan national où on est à 95%. Cela signifie quelque chose.
Qu'espérez-vous à travers cette grève ?
La profession est tout à fait d'accord pour participer à l'effort. On n'est pas hors-sol. On est prêts à participer ponctuellement pour des circonstances conjoncturelles comme le covid. Mais on ne veut pas que l'effort s'inscrive dans la durée. Le nœud du problème est là. On est d'accord sur ce que demande l'État mais que sur l'exercice en cours. Prolonger l'effort dans la durée hors covid, ce n'est pas soutenable pour nous. On demande donc un engagement ferme de l'État, au travers de la CNAM, de ne pas s'inscrire dans la durée. On est d'accord pour une contribution exceptionnelle de 250 millions d'euros mais pas au-delà.
Quelles seraient les conséquences pour les laboratoires ?
Ce coup de rabot nous pénaliserait en terme de politique d'investissement mais aussi d'exploitation des sites, en particulier dans les zones reculées, de déserts médicaux. Au final, ce sont les patients qui en subiront les conséquences. Dans le Gard, il y a beaucoup de territoires ruraux notamment au nord du département, aux confins de la Lozère ou de l'Ardèche, qui sont déjà des déserts médicaux. Il est évident que le Gard n'échapperait pas aux conséquences.
Il y a déjà eu plusieurs actions moins spectaculaires avant d'en arriver à cette grève, c'est un peu votre dernière carte ?
Avant d'en arriver à la grève, on a arrêté de transmettre les données épidémiologiques liées au covid pendant quelques jours. Des discussions ont commencé à être ouvertes mais rien n'a avancé. Donc on continue les actions. On le regrette vis-à-vis des patients. On n'est pas habitué à ça dans la profession. Mais à un moment donné, on ne peut plus...
Malgré la grève, les prélèvements d'urgence sont assurés ?
Il y a quelques exceptions en effet que sont les bilans qui ne peuvent pas attendre pour entamer les cures de chimiothérapie, les dialysés, les extrêmes urgences après dialogue entre le biologiste et le clinicien. On continue à assurer aussi les bilans urgents pour les établissements de soins partenaires privés. Tout ce qui est bilan préopératoire dans le cadre d'interventions programmées n'est pas assumé.
Propos recueillis par Marie Meunier
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